L’homme qui contrôle le Liban depuis un bunker. Qui est Hassan Nasrallah

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(Rome, Paris, 02 novembre 2021). Hassan Nasrallah (en arabe : حسن نصر الله) est le leader du mouvement chiite libanais Hezbollah, soutenu par l’Iran et profondément enraciné dans le sud du Liban, où réside une grande partie de la population liée à la foi musulmane chiite. Le Hezbollah est présent au parlement et, par le passé, a également participé avec ses propres ministres aux structures gouvernementales libanaises. Par conséquent, Nasrallah est considéré chez lui comme un leader politique. Au contraire, il est perçu comme un leader terroriste dans d’autres pays, dont Israël, où le Hezbollah est officiellement répertorié comme l’un des groupes terroristes.

L’enfance de Hassan Nasrallah

Comme l’explique avec précision Mauro Indelicato dans le quotidien «Il Giornale/Inside Over», le futur chef du Hezbollah est né à Bourj Hammoud, une banlieue située à l’est de Beyrouth, le 30 août 1960. Sa famille est cependant originaire du sud du Liban et, notamment, d’un village non loin de la ville de Tyr. C’est une région à nette majorité chiite et, en effet, sa famille appartient à cette communauté.

Son père est d’origine modeste, mais il parvient à garantir à Hassan Nasrallah une éducation adéquate. Cependant, il décide, avec sa femme et ses enfants, de retourner à Tyr avec le déclenchement de la guerre civile en 1975. Cette année-là, Beyrouth et ses banlieues sont devenues des tranchées de conflit entre chrétiens, musulmans et miliciens de l’OLP. Par conséquent, le retour dans leurs lieux d’origine garantit un plus grand refuge pour la famille Nasrallah. Hassan termine ses études secondaires à Tyr.

L’entrée à Amal

Nasrallah n’avait que 15 ans lorsque le conflit a éclaté, mais il n’a pas assisté à la guerre en tant que simple spectateur. Au contraire, une fois de retour au sud du Liban, il rejoint le mouvement chiite Amal, fondé en 1975 et dirigé à l’époque par l’imam Moussa Al Sadr. Ce dernier ne voulait pas que sa formation entre en guerre civile. Mais, il maintenait plusieurs brigades armées comme bras étendu du parti. Nasrallah, dans ce sens, est considéré comme l’un des plus jeunes chefs militaires prometteurs.

Études dans la ville sainte de Najaf

Après avoir terminé ses études secondaires, Hassan Nasrallah décide d’approfondir ses études à caractère religieux. Au sud du Liban il connaît une figure importante parmi les chiites de son pays, un certain Mohammad al-Gharawi. Ce dernier le met en contact avec la Hawza (une école religieuse) de Najaf, l’une des villes saintes des chiites et cœur du chiisme irakien, où réside l’ayatollah Alì Al Sistani.

Hassan Nasrallah quitte ensuite le Liban pour le sud de l’Irak et c’est ici qu’il a commencé à parfaire ses études religieuses. Sa formation politique, apparaît profondément marquée par ce séjour même s’il fut de courte durée. A la fin des années 1980 en Irak, où le parti Baas était au pouvoir et où Saddam Hussein était sur le point d’arriver aux commandes, des lois contre les écoles religieuses ont été votées.

Nasrallah retourne alors au Liban et décide de poursuivre ses études dans son pays. Il fréquente notamment l’école de Baalbek, l’une des plus importantes du Pays du Cèdre. En plus de ses études, Nasrallah se consacre à la politique et devient l’un des représentants du mouvement Amal dans la vallée de la Beqaa.

La fondation du Hezbollah

Au sein du mouvement chiite fondé par (l’imam) Moussa Al Sadr, des bouleversements majeurs ont eu lieu en 1980. Le parti est orphelin de son premier dirigeant, décédé dans des circonstances mystérieuses en Libye en 1978. Le laïc Nabih Berri a pris les commandes. Ce dernier décide de replacer Amal dans le contexte de la guerre civile en cours. Dans un tel contexte, il est toutefois difficile de maintenir l’unité de l’ensemble du parti. Il existe de nombreux courants et lignes de pensée, notamment dans la définition des relations avec les deux acteurs étrangers les plus importants impliqués dans la guerre du Liban, à savoir Israël et la Syrie.

En vertu de ces raisons, ajoute Mauro Indelicato, à partir de 1982, certains groupes au sein d’Amal commencent à se détacher. Les formations dissidentes pensent, au fil des mois, à donner vie à un nouveau parti chiite. C’est ainsi qu’est né le parti de Dieu, le Hezbollah. Hassan Nasrallah fait partie des chiites qui décident de quitter Amal pour adhérer le nouveau mouvement. En outre, le groupe profite d’un événement international important de ces années : en effet en 1979 en Iran, à la suite d’une révolution populaire, une théocratie chiite dirigée par les ayatollahs a été mise en place. Depuis Téhéran, l’argent et les moyens commencent à affluer en faveur du Hezbollah.

Le Hezbollah sous la direction de Nasrallah

Immédiatement après son élection, Nasrallah fait participer le Hezbollah aux premières élections d’après-guerre. En 1992, le mouvement obtient 15 députés au parlement. Dès lors, le groupe, en plus de constituer un mouvement enraciné dans le sud du Liban et dans les quartiers chiites de Beyrouth, est devenu un véritable parti. Dans les années suivantes, certains représentants du Hezbollah deviennent ministres.

L’ascension au sein du mouvement chiite

Contrairement à Amal, un parti visant la population chiite mais soutenu par une idéologie laïque, la référence à l’islam et aux valeurs islamiques est présente dans le credo politique du Hezbollah. Un fil conducteur très important avec l’Iran d’après 1979. Nasrallah, dans ce contexte, grâce à sa formation religieuse, réussit d’emblée à devenir l’un des représentants les plus actifs du mouvement.

Jusqu’en 1985, il est reconnu comme un point de référence du Hezbollah dans la vallée de la Bekaa, et à partir de cette année-là, Nasrallah s’est installé à Beyrouth où il siège avec les cadres les plus importants du parti. Un tournant intervient en 1987, lorsque les militants l’élisent à la tête de l’exécutif du mouvement. C’est un poste prestigieux, qui lui permet de dicter la ligne politique du Hezbollah.

En 1989, il décide de se rendre en Iran pour terminer ses études religieuses. Le choix de la ville dans laquelle il réside n’est pas accidentel. C’est Qom, le cœur du chiisme iranien et le foyer des principales écoles coraniques du monde chiite. En 1990, cependant, il est retourné au Liban. Après les accords de Taëf, le pays s’apprête à conclure la triste page de la guerre civile et Nasrallah est appelé, en tant que chef de l’exécutif, à donner une orientation politique au Hezbollah.

1992 : Nasrallah élu secrétaire général du Hezbollah

La formation chiite est considérée comme terroriste par Israël. Le mouvement revendique en 1983, la responsabilité de l’une des attaques kamikazes les plus graves survenues pendant le conflit, visant des bases militaires américaines et françaises (l’immeuble Drakkar). Mais ce qui inquiète l’Etat hébreu, c’est surtout l’affinité entre le Hezbollah et l’Iran. Israël craint que Téhéran exploite le mouvement chiite qui deviendrait sa branche armée à deux pas de sa frontière.

Pour cette raison, même après la fin du conflit civil libanais, l’armée de l’air israélienne prend souvent pour cible le Hezbollah. En 1992, lors d’un bombardement, Abbas al-Moussawi, chef de la formation, est tué. Hassan Nasrallah est nommé secrétaire général du parti en remplacement de Moussawi. A partir de ce moment, c’est lui qui guide le destin du mouvement.

Nasrallah, en tant que chef du mouvement, évolue dans cet équilibre délicat : d’un côté, il conduit le groupe vers des responsabilités de gouvernance, de l’autre, il le transforme en une milice bien armée bien enracinée à ses propres territoires. Le Hezbollah est décrit comme un État dans l’État. Dans les provinces du sud, il se substitue dans certains cas aux institutions étatiques dans l’assistance et la prestation de services primaires, tandis que du point de vue militaire il renforce un arsenal jugé comme égal, voire parfois, supérieur à celui de l’armée régulière du Liban. Ceci est principalement dû au soutien iranien et aux nombreux dons collectés au Liban et à l’étranger.

Hassan Nasrallah maintient l’orientation anti-israélienne du Hezbollah. A plusieurs reprises, les miliciens mènent des attaques contre les forces de l’Etat hébreu. En 2000, lorsque les derniers soldats israéliens quittent le sud du Liban (où ils sont entrés en 1982 pendant la guerre civile), Nasrallah a revendiqué une victoire au nom du Hezbollah.

La guerre de 2006

Nasrallah s’exprime souvent en public et est apprécié par de nombreux militants pour son éloquence. Dans l’un de ses discours de 2005, le chef du Hezbollah menace explicitement Israël. Il déclare notamment vouloir kidnapper des soldats de l’Etat hébreu, puis il procède à un échange de prisonniers. Le 12 juillet 2006, Nasrallah lui-même s’est exprimé sur une chaîne de télévision proche du mouvement pour lancer l’opération «Faithful Promise-en arabe, الوعد الصادق)». Quelques heures plus tôt, les miliciens ont lancé des roquettes en direction du territoire israélien. Une diversion pour effectuer une incursion terrestre au cours de laquelle des soldats israéliens sont kidnappés et d’autres tués.

C’est ainsi qu’a commencé la guerre israélo-libanaise de 2006, même si en réalité, le conflit, qui a duré 34 jours, opposait plutôt Israël au Hezbollah. Le mouvement mène seul des actions armées, le Premier ministre libanais de l’époque Fouad Sioniora déclare ne pas être au courant des choix faits par Nasrallah. Israël bombarde le sud du Liban et les quartiers chiites de Beyrouth pendant des semaines. Le Premier ministre israélien Ehud Olmert lance également une opération au sol pour repousser les combattants du Hezbollah et détruire les rampes de lancement de missiles.

Un cessez-le-feu est conclu en août. Le Liban est à nouveau à genoux et en ruines. Nasrallah revendique cependant, immédiatement après la fin des combats, un prétendu succès stratégique contre Israël. Le Hezbollah se révèle une fois de plus être une entité étatique quasi autonome au sein du Liban.

Le projet du croissant chiite

Le leader du Hezbollah est considéré comme l’un des principaux protagonistes du soi-disant « croissant chiite », le projet dont la paternité est attribuée au général iranien Qassem Soulemaini, tué le 3 janvier 2020 par un raid américain à Bagdad. C’est la vision d’un grand axe chiite qui, de Téhéran, traversant Bagdad et Damas, atteint le cœur de Beyrouth, donc la Méditerranée.

Cela est dû à la domination chiite dans l’Irak post-Saddam, favorisée par l’avènement des partis chiites au pouvoir, l’appartenance du président syrien Bachar Al Assad à la branche chiite des alaouites, et la présence au Liban du Hezbollah. Nasrallah, également en vertu de son soutien au projet du croissant chiite, décide d’intervenir dans le conflit civil syrien qui a éclaté en 2011.

Des milliers de miliciens du Hezbollah sont envoyés en Syrie pour soutenir le gouvernement Assad. La contribution du mouvement à la victoire des forces de Damas apparaît comme l’une des plus décisives. Pendant la guerre en Syrie, la milice s’est révélée être l’une des armées les mieux préparées de toute la région du Moyen-Orient, (disloquée aux portes du quartier de Aïn el-Rammeneh à Beyrouth, le 14 octobre 2021, ndlr).

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