Pourquoi les chrétiens risquent de disparaître du Liban

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(Rome, Paris, 25 décembre 2021). Les chrétiens du Liban sont en danger. Comme le rapporte Vatican News, le patriarche d’Antioche de l’Église syro-catholique, Ignace Joseph III Younan, dans une interview à «Aide à l’Église» qui souffre, a exprimé sa tristesse face au danger de voir les chrétiens disparaître du pays des cèdres.
Comme l’explique Lorenzo Vita dans son analyse dans le quotidien «Inside Over», la raison de ce qui pourrait se transformer en une véritable diaspora est la situation dans laquelle se trouve le Liban. La crise qui a piégé le pays est une spirale dont il semble impossible, pour le moment, de trouver une issue. L’économie est incapable de se remettre de l’abîme, le sectarisme, qui pendant des décennies a caractérisé la politique libanaise, a révélé tous les problèmes d’un État fragile sans classe dirigeante adéquate. La population, en particulier la plus jeune, est très fatiguée et tente de fuir alors que même les manifestations de rue de ces dernières années n’ont pas réussi à débloquer la situation.
La crise économique devient inévitablement une crise sociale et creuse les clivages qui caractérisent la patrie libanaise. Les manifestations se soldent souvent par des violences avec des blessés et des morts.
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Les différents partis mènent les protestations, tentent de canaliser le mécontentement, mais l’impression est que cette fois-ci, aucun des représentants confessionnels et politiques historiques du pays n’est capable de gérer la situation. Un thème qui rejoint aussi l’attention des différentes puissances régionales sur ce qui se passe à Beyrouth, les pays du Golfe s’intéressant particulièrement à l’avenir du petit mais stratégique État de la côte orientale de la Méditerranée.
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La récente crise déclenchée par les propos du ministre libanais de l’Information, George Kordahi, en est encore une preuve.
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Ses critiques de la guerre au Yémen ont provoqué la colère de Riyad, qui a également décidé de bloquer les importations en provenance du Liban, portant un coup supplémentaire à l’économie déjà fragile du pays.
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Le patriarche maronite Bechara Boutros Al-Rai, inquiet des conséquences d’une éventuelle crise internationale et locale, avait également demandé aux autorités de « faire un pas décisif » visant à mettre fin à la crise.

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    Sur ces prémisses faites de pauvreté et de frustration, poursuit Lorenzo Vita, la communauté chrétienne risque de devoir payer un lourd tribut. L’absence de perspectives d’un avenir décent, l’inflation galopante, une classe politique qui n’offre pas de certitudes et l’effondrement de l’économie conduisent de nombreux Libanais à choisir la voie de l’émigration. Une voie empruntée par tous, y compris les minorités. Et il est clair que si de jeunes chrétiens décident de quitter le Liban, le poids de cette communauté s’en trouvera réduit au point de devenir insignifiante. Les seuls qui restent sont les personnes âgées. Mais sans jeunes et sans nouvelles familles, le risque d’une disparition lente et inexorable de l’une des plus anciennes communautés de fidèles au monde n’est plus si lointain. Nombreux sont ceux qui craignent, comme l’a également souligné le patriarche Ignace Joseph III Younan, c’est que « normalement, lorsque les chrétiens partent, comme cela s’est produit en Irak, en Syrie et en Turquie, ils ne reviennent pas ». Nombreux sont ceux qui décident de partir, mais personne ne semble disposé à retourner dans son pays. Et l’Occident, comme cela arrive trop souvent, semble être sourd au cri d’alarme lancé par le Moyen-Orient, qui voit lentement disparaître une partie fondamentale de son histoire et de son présent.

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