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Editorial: Mieux vaut tard que jamais. Le Patriarche appelle à la neutralité, à l’internationalisation, à la fin de l’armement milicien, pour sauver le Liban

(Montréal, 08 février 2021). Elu à la tête de l’Eglise maronite en mars 2011, le Patriarche Béchara Raï est devenu de facto l’héritier des premiers fondateurs du Liban, terre de liberté et refuge des persécutés, et a endossé l’habit du gardien du Liban moderne dans la lignée des Patriarches Elias Hoyek et Nasrallah Sfeir. Mais il aura fallu presque dix ans pour que le chef de l’Eglise puisse prononcer des mots « justes » et « forts », comme il l’a fait ce dimanche 07 février lors de son homélie dominicale. Il aura surtout fallu la destruction du Liban et des Libanais, économiquement, financièrement, militairement et moralement. Il aura surtout fallu un énième assassinat politique – celui de Loqman Slim – et un silence humiliant de la présidence de la République face au hold-up réalisé par le Hezbollah sur l’Etat, progressivement depuis février 2006 et la signature de la fameuse alliance stratégique entre Hassan Nasrallah, devenu Guide suprême, et le Général Michel Aoun, devenu son serviteur. Cette alliance du 6 février 2006 avait octroyé une couverture chrétienne à l’armement illégitime du Hezbollah et justifié tous ses égarements, ses crimes et ses ingérences extérieures et conduit à la destruction du Liban, dont l’explosion du port fut le dernier acte en date.

Mais mieux tard que jamais. L’appel de Monseigneur Béchara Raï redonne à l’Eglise son rôle historique dans le sauvetage du Liban et conforte les souverainistes dans leur défense du Liban et des institutions face à l’hégémonie du Hezbollah. Les propos du Patriarche, rejoints par l’ancien ministre et député démissionnaire Marwane Hamadé ce dimanche, devraient accélérer la création d’un large front souverainiste national qui regrouperait les meilleurs de « l’Alliance du 14 mars » et les « révolutionnaire du 17 octobre ».

Comme le Patriarche Raï, Marwane Hamadé, ce martyr vivant qui a échappé miraculeusement au premier attentat de la série attribuée au Hezbollah (octobre 2004, quelques mois avant l’exécution de Rafic Hariri), met le doigt sur la plaie et affirme que « sans les souverainistes du 14 mars, la révolution du 17 octobre sera laminée par le Hezbollah et ses alliés au pouvoir ».

En appelant à la neutralité du Liban, en demandant l’internationalisation de la crise pour garantir une issue favorable à la crise, et en appelant à mettre fin à l’armement milicien, le Patriarche ne fait que répéter et confirmer le discours que le parti des Forces Libanaises tient et défend depuis des années, et plus particulièrement depuis septembre 2019, plus de six semaines avant l’éclatement du Hirak. L’appel de Marwane Hamadé à la création d’un front souverainiste, regroupant le 14 mars et le 17 octobre vient aussi confirmer la justesse de l’approche des Forces Libanaise à l’égard du Hirak. Car, il faut admettre que si les militants des Forces Libanaises ont toujours été, spontanément, le moteur et le carburant des manifestations, la direction du parti avait porté les revendications du Hirak, avant le Hirak.

Il aura fallu près de dix ans après l’élection du Patriarche, tant de misères sociales, d’attentats terroristes, d’assassinats ciblés, de destructions matérielles, de violations des libertés, de corruption et de détournements de fonds publics, de descente aux enfers, de faillites économiques, de banqueroute financière, et d’effondrement moral pour que le Patriarche se ressaisisse et qu’il mette les points sur les « i », qu’il désigne les responsables de cette catastrophe et qu’il suggère une feuille de route. Pourvu qu’il maintienne ses positions et qu’il honore ses prédécesseurs qui ont fait le Liban et dont ils sont les détenteurs de sa Gloire.

Sanaa T.

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