Après les élections, le Liban risque la paralysie politique totale

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(Paris, 18 mai 2022). Le bloc parlementaire du Hezbollah et de ses alliés a perdu la majorité au Parlement tandis que les Forces libanaises de Samir Geagea, ont conquis des positions, dépassant le Courant patriotique libre (CPL) du président Michel Aoun, allié du Parti de Dieu

Au Liban, après les élections de dimanche 15 mai, un changement a vu le jour, mais le risque de paralysie politique est pour bientôt, comme rapporté par l’agence italienne «AGI». Le bloc du Hezbollah et de ses alliés a perdu la majorité au Parlement tandis que les Forces libanaises de Samir Geagea (portrait d’un sauveur), ont conquis des positions, prenant le dessus sur le Courant patriotique libre (CPL) du président Michel Aoun, allié du Parti de Dieu.

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Aussi, étonnamment, il en ressort un Parlement fortement polarisé, qui peinera à trouver un accord sur la formation du nouveau gouvernement et l’approbation des profondes réformes exigées par les pays donateurs et le Fonds monétaire international (FMI) afin de fournir encore plus de fonds, indispensables à la survie.

Selon les données définitives annoncées par le ministre libanais de l’Intérieur, Bassam Mawlawi, le Hezbollah conserve ses 13 sièges, mais le bloc parlementaire s’arrête dans son ensemble à 58 sièges, perdant la majorité requise des 71 députés qu’il avait remportés en 2018. Un résultat imputable aux mauvaises performances de ses alliés : Amal, du président du Parlement, le chiite Nabih Berri, passe de 17 à 15 sièges, tandis que le CPL du chrétien maronite Michel Aoun obtient 17 sièges et se fait dépasser par le parti souverainiste des Forces libanaises (19, + 5 par rapport aux élections de 2018), qui est devenu le premier parti du bloc chrétien.

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Les candidats liés au président syrien, l’alaouite Bachar al-Assad n’ont pas fait mieux : des figures historiques comme le druze Talal Arslan et le vice-président du Parlement Elie Ferzli n’ont pas été reconfirmés, de même pour Fayçal Karamé, fils de l’ancien premier ministre Omar, et neveu du défunt Rachid. Le succès des forces contestataires qui ont marqué un tournant décisif, alors qu’elles ne se sont pas présentées unies dans la bataille électorale, ni sur un projet ni dans une liste, a été significatif.

Ils ont toutefois marqué une percée dans l’électorat, gagnant ainsi 13 sièges : s’ils s’unissaient en un bloc, ils deviendraient le quatrième groupe au Parlement et pourraient avoir une certaine influence pour déstabiliser certains équilibres. Les indépendants, quant à eux, comptent 16 députés, mais cette définition inclut des visages aux orientations politiques différentes. Du côté du camp sunnite, l’absence du Mouvement du futur dirigé par l’(ex) leader Saad Hariri s’est fait fortement sentir : sa décision de ne pas se présenter et son appel au boycott ont été en partie entendus et ont abouti à une fragmentation dont les tenants traditionnels sunnites, comme l’ancien Premier ministre Fouad Siniora mais aussi l’actuel chef du gouvernement Najib Mikati, ont dû subir les conséquences.

Dans cette perspective de forte polarisation, avec d’une part, le Hezbollah et ses alliés, et de l’autre, les Forces libanaises, ainsi que d’autres opposants aux pro-iraniens, la première épreuve sera l’élection du président du Parlement, où l’indéboulonnable Nabih Berri occupe ce poste depuis 1992, avant que les négociations pour désigner un premier ministre ne soient engagées.

Par ailleurs, à la fin du mois d’octobre, le mandat du président Aoun expire, et des répercussions sont également attendues à ce niveau, dans un pays en grande difficulté, marqué par des coupures d’électricité, dont la monnaie a perdu 95 % de sa valeur et dont plus de 75 % de la population est réduite à la pauvreté.