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Liban-Israël: à l’occasion du 14° anniversaire du 12 juillet 2006, les craintes d’une nouvelle édition se renforcent

(Beyrouth, 12 juillet 2020). Il y a 14 ans jour pour jour, le Hezbollah menait une embuscade à la frontière contre une patrouille israélienne et tuait quatre soldats, en emportant les cadavres de deux des victimes, provoquant une guerre de 33 jours qui a coûté au Liban des milliers de victimes et des milliards de dollars de dégâts.

Les Libanais se souviennent toujours de cette date maudite du 12 juillet 2006, tout comme les Israéliens. Ils s’en souviennent car elle est gravée dans leur esprit et dans leur chair, et parce qu’ils redoutent une nouvelle édition qui aura les mêmes objectifs et les mêmes conséquences. Le Hezbollah s’en souvient aussi et insiste, tous les jours, sur la « victoire divine » qu’il a marquée contre l’armée israélienne, l’une des plus puissantes du monde. Malgré ses pertes humaines et matérielles, le Parti de Dieu affirme régulièrement avoir renforcé ses capacités militaires et opérationnelles par rapport à 2006, grâce aux dizaines de milliers de missiles de haute précision, et à l’introduction de nouvelles armes comme les drones, la défense antiaérienne, les missiles sol-mer et, selon des sources de renseignements, de mini sous-marins basés à Ouzaï, dans la banlieue sud de Beyrouth, non loin de l’aéroport de Beyrouth. Le Hezbollah a creusé aussi des tunnels reliant le Sud-Liban au nord de la Galilée pour y mener des opérations commandos. L’armée israélienne qui en a découvert 6 ces dernières années, a organisé ce 11 juillet une visite guidée dans l’une des galeries pour sensibiliser le Conseil de sécurité au risque permanent que fait peser le Hezbollah, mais aussi pour rassurer que Tsahal est toujours vigilante dans la sécurisation des frontières. Plusieurs diplomates et représentants des pays membres du Conseil de sécurité ont été conviés à cette opération séduction, dont les ambassadeurs de France et d’Italie.

Le Hezbollah hausse le ton et baisse les bras

Avec l’aide directe des Gardiens de la Révolution Iranienne, le Hezbollah se dit prêt à relever tous les défis et à infliger de lourdes défaites à Israël lors des prochaines guerres. Ce message est d’abord destiné à l’intérieur, pour remonter le moral de ses combattants et ses sympathisants, et à l’extérieur comme un message de dissuasion adressé à Israël et aux Etats-Unis. Mais ces fanfaronnades ne convainquent pas les Libanais ni n’apeurent les Israéliens. Les Libanais considèrent que leur pays, affamé et assiégé à cause du Hezbollah, ne peut mener et gagner une guerre contre Israël. Et les Israéliens ne semblent pas terrorisés puisque, ironiquement, celui qui promet leur destruction en 7 minutes n’ose pas se défendre ni riposter pendant ou après leurs raids qui visent régulièrement les positions du Hezbollah, des Iraniens et du régime syrien en Syrie, et qui s’étendent ces derniers jours maintenant aux installations nucléaires iraniennes en Iran.

Mais malgré cette lecture, les Libanais et les Israéliens n’excluent pas le risque d’une guerre que provoquerait le Hezbollah dans les jours, semaines ou mois à venir. L’Iran est aux abois. Le pays s’asphyxie économiquement et souffre financièrement. En Irak, le Premier ministre leur échappe de plus en plus et cherche à mettre au pas les miliciens pro-iraniens. En Syrie, leur influence est en perte de vitesse face aux Russes. Au Liban, leur bras armé est sous forte pression. Pour toutes ces raisons, l’axe iranien estime qu’une guerre, même destructrice, peut le sauver car « tout ce qui ne tue pas rend plus fort ».

A en croire un général à la retraite de l’armée libanaise, selon lequel « une guerre avantage celui qui la provoque », il ne faut pas exclure une fuite en avant du Hezbollah, de préférence avant les élections américaines de novembre prochain. Un tel scénario détourne l’attention des Libanais de leurs difficultés, occulte la crise financière, économique et sociale qu’ils attribuent à la politique du Hezbollah, et cimente la population derrière la « Résistance ». Une telle fuite en avant focalise les regards sur le Liban et soulage de ce fait l’Iran, lui permettant d’accélérer son enrichissement d’uranium. Elle rebat les cartes sur le plan régional et force l’administration Trump à négocier un cessez-le-feu et donc à faire des concessions, dans l’espoir de remporter les présidentielles.

Bien qu’il ne s’agit que de spéculations, ce scénario a été évoqué à plusieurs reprises par les responsables du Hezbollah, ces dernières semaines. Plusieurs observateurs minimisent cependant le risque d’une escalade, car le Hezbollah est très affaibli et n’a pas les moyens d’agir sans fonds iraniens et appui syrien. Or l’Iran est désargenté et le régime syrien est moribond. Israël n’a aucun intérêt à tomber dans le piège de la provocation et à mener une guerre frontale puisqu’il gagne à l’usure. Les Etats-Unis ont d’autres priorités et ne cautionneraient pas une nouvelle guerre dans la région, en tout cas pas avant les élections. A l’inverse, d’autres experts pensent que tous les ingrédients sont réunis pour déclencher une nouvelle confrontation directe.

Lea P.

 

 

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