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Le Kremlin se prépare à frapper l’Occident, «les espions russes en contre-attaque»

(Rome, Paris, 27 février 2024). Un rapport d’un groupe de réflexion britannique révèle comment les services de renseignement russes ont appris de leurs erreurs et se sont réorganisés pour semer de nouvelles divisions parmi les alliés occidentaux

Les espions russes sont de retour. Et ils sont plus forts que jamais. C’est ce qu’affirme le groupe de réflexion londonien « Royal United Service Institute » (RUSI) dans un rapport rédigé par les experts Jack Watling et Nick Reynolds en collaboration avec Oleksandr Danylyuk, ancien conseiller du ministère de la Défense et chef des services du renseignement extérieur de Kiev. Le document récemment publié utilise également des informations extraites des services de renseignement de la Fédération et analyse la capacité démontrée par le 007 de Moscou à tirer les leçons des erreurs commises et à redevenir l’une des principales menaces à la sécurité des pays occidentaux, nous explique Valerio Chiapparino dans «Il Giornale».

Les échecs russes

Les conclusions du centre d’études britannique sont d’autant plus impressionnantes, que le service de renseignement étranger (SVR) et les hommes des services de sécurité russes (FSB) ont commis une longue série de faux pas. Parmi ceux-ci, figure l’opération qui a conduit à l’empoisonnement d’Alexeï Navalny en 2020, qui ne s’est pas déroulée conformément aux plans du Kremlin, et la décision de Vladimir Poutine d’agir contre l’Ukraine, une initiative encouragée par les évaluations trop optimistes exprimées au tsar par ses espions convaincus des faiblesses de Kiev et enfin de l’hypothétique incapacité du gouvernement Zelensky à résister en cas d’affrontement militaire directe avec la puissance russe.

C’est précisément sur le dossier ukrainien que les 007 Américains et leurs alliés se sont montrés habiles à découvrir et à rendre publics les plans de Moscou bien avant le déclenchement des hostilités le 24 février 2022.

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Le SVR a payé cher la débâcle ukrainienne : 600 de ses des agents ont en effet été expulsés des ambassades du Vieux Continent. Un autre échec retentissant s’est produit l’été dernier lorsque les espions russes se sont révélés effectivement impuissants face à l’audacieuse tentative de coup d’État organisée par Evgueny Prigozhin, alors leader de Wagner.

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Le Kremlin frappe à nouveau

Faisant référence à ces échecs et au déroulement de la guerre en Ukraine, dont Poutine espérait qu’elle se terminerait dans quelques jours, le directeur de la CIA, William Burns, a qualifié le conflit en Europe de l’Est et la désaffection au sein des rangs russes d’opportunité pour son agence. Cependant, les analystes de «RUSI» notent que malgré les revers enregistrés, Moscou a réussi à entamer un processus de réforme de l’appareil de renseignement et à jeter les bases de nouvelles opérations redoutables contre l’Occident.

Déjà en 2022, dans l’intention de recevoir des rapports de renseignement plus réalistes, le tsar avait nommé Sergueï Kirienko, chef d’état-major adjoint du Kremlin, à la tête des «comités d’influence particulière».

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En conséquence, écrivent les analystes du groupe de réflexion britannique, les informations faisant état de campagnes de désinformation organisées par les Russes pour saper le soutien de la coalition à l’Ukraine se sont multipliées dans toute l’Europe.

La nouvelle vie du GRU

L’agence d’espionnage militaire russe (GRU), renaît de ses cendres le fiasco de la tentative d’empoisonnement de Sergueï Skripal à Salisbury en 2018 est encore gravé dans les mémoires, en réduisant «l’empreinte» laissée par ses agents sur le terrain et en augmentant les chances de succès de ses futures missions. En outre, les restes du groupe Wagner furent partagés entre le FSB, le SVR et le GRU, permettant ainsi une renaissance de l’influence de Moscou en Afrique.

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La découverte continue de taupes et de cyber-activités hostiles dans les pays occidentaux confirme que les espions du Kremlin ont déjà atteint un niveau d’infiltration sans précédent. Andrei Soldatov, journaliste d’investigation, a déclaré à The Economist que les Russes « ne sont pas aussi mauvais qu’on le pense » et que les 007 de la Fédération sont devenus plus inventifs. L’évasion d’Italie l’année dernière de l’homme d’affaires Artem Uss en est un exemple.

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L’hebdomadaire britannique rapporte que la priorité des dirigeants russes est de se préparer à un conflit avec l’OTAN «non seulement en volant des secrets, mais aussi en élargissant les divisions au sein de l’organisation, en compromettant le soutien à l’Ukraine en Amérique et en Europe et en érodant l’influence de l’Occident dans le sud du monde». Et à en juger par le flot d’alarmes venant de toutes parts, le sentiment est que, malgré les efforts déployés, les services de renseignement des alliés des deux côtés de l’Atlantique pourraient ne pas être en mesure d’intercepter à temps le prochain coup terrible du tsar.

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