(Rome, 12 novembre 2021). Le gouvernement libanais manque à ses devoirs envers son peuple, a affirmé vendredi à Beyrouth un haut responsable de l’ONU, critiquant « l’inaction » des autorités devant l’effondrement du pays. Le « gouvernement manque à ses obligations envers sa population » et le pays risque de devenir un État défaillant, a souligné Olivier De Schutter, le rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’Homme et l’extrême pauvreté. « J’ai vu au Liban des scènes que je n’aurais jamais imaginé voir dans un pays à revenu intermédiaire », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse, au terme d’une mission de 12 jours dans le pays. Le gouvernement libanais, formé en septembre pour tenter de sortir le pays de l’effondrement économique, n’a pas encore pris de mesures sérieuses alors que selon les Nations unies, environ 80 % de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté.
Après avoir entièrement levé les subventions sur les carburants, les autorités réduisent progressivement celles sur les médicaments et la farine alors que la livre libanaise (LL) a perdu 90 % de sa valeur sur le marché noir depuis le début de la crise à l’automne 2019. Vendredi, le dollar s’échangeait pour 23.200 LL, la monnaie locale s’approchant de son plus bas historique. Un programme de cartes de rationnement, promis de longue date pour aider les plus pauvres, n’a pas encore démarré, les autorités à court d’argent ayant du mal à obtenir un financement de la Banque mondiale.
La faim au ventre
« Alors que la population tente de survivre au jour le jour, le gouvernement perd un temps précieux », a affirmé M. De Schutter, critiquant « l’inaction du gouvernement face à cette crise sans précédent qui a plongé la population dans la misère ».
Selon les dernières données du gouvernement libanais, le prix des denrées alimentaires de base a presque quadruplé en un an. Et pour faire le plein d’essence, les Libanais doivent payer plus que le salaire minimum, qui est toujours de 675.000 LL.
Le mois dernier, l’organisation Save the Children a prévenu que « les enfants au Liban sautent de nombreux repas car les parents ont du mal à acheter les aliments de base ».
Parmi eux, Mirna Mounmné, une mère de quatre enfants, craint de perdre sa fille de neuf ans atteinte d’une tumeur au cerveau car elle n’a plus les moyens d’acheter des médicaments ni même de la nourriture. « Chaque nuit, je vais dormir en m’attendant à ne plus trouver ma fille vivante au réveil », a affirmé cette femme de 33 ans à l’AFP.
Mirna et son mari, un ancien chauffeur de taxi, sont tous les deux sans emploi et survivent grâce aux dons de nourriture d’une mosquée locale. « Parfois, nous nous couchons la faim au ventre », dit-elle.
(La Presse)
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