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Liban: la monnaie locale à un creux historique, la population descend dans la rue

(Rome, Paris 03 mars 2021). La livre libanaise a atteint mardi un creux historique sur le marché noir, frôlant les 10.000 livres pour un dollar américain et suscitant la colère de la rue, dans un pays en plein effondrement économique. Officiellement, la monnaie locale reste indexée sur le billet vert au taux de 1.507 livres pour un dollar, observé depuis plus de deux décennies. Mais sur le marché noir, elle connaît depuis l’automne 2019 une dégringolade sans précédent. Mardi, le dollar américain s’échangeait pour 9.900 à 10.000 livres, ont indiqué à l’AFP plusieurs changeurs. Le Liban est englué dans sa pire crise économique, aggravée par une impasse politique et la pandémie de COVID-19. Cette chute de la livre libanaise a provoqué la colère de la rue. Des rassemblements ont eu lieu dans plusieurs régions du pays, y compris à Beyrouth, à Tripoli (nord), Saïda (sud) et dans la Békaa (est). Des dizaines de manifestants en colère ont bloqué des routes, parfois à l’aide de pneus incendiés et de bennes à ordures renversées. Certains ont repris des slogans de la révolution du 17 octobre 2019, date du début d’un mouvement de contestation inédit contre une classe dirigeante inchangée depuis des décennies et accusée de corruption et d’incompétence. « J’appelle tout le monde à descendre dans la rue, la situation est devenue insoutenable », a lancé une manifestante au micro de la chaîne locale MTV où ses envoyés spéciaux assurent courageusement une couverture en direct sur tous les points de rassemblement des manifestants. « Nous resterons ici jusqu’à faire tomber cette classe politique corrompue avec à sa tête (le président) Michel Aoun », a renchéri un autre manifestant en colère.

La chute de la livre intervient au moment où la Banque centrale (BDL) a commencé à évaluer la situation financière des banques, sur fond de pressions internationales pour une restructuration du secteur bancaire. Les banques libanaises avaient jusqu’à dimanche pour augmenter leur capital de 20%, une des mesures réclamées par la BDL.  Selon le quotidien libanais « Al-Akhbar », la chute de la livre est partiellement liée au retrait de dollars du marché par les banques pour satisfaire les demandes de la BDL. La dépréciation a déjà entraîné depuis 2020 une hausse drastique des prix et la pauvreté touche désormais plus de la moitié de la population. Le pays attend depuis plus de six mois la formation d’un nouveau cabinet. Le gouvernement actuel a démissionné après l’explosion meurtrière et dévastatrice du 4 août au port de Beyrouth, mais continue de gérer les affaires courantes. La crise économique au Liban affecte aussi la Syrie, où la livre syrienne a atteint un creux historique mardi, les banques libanaises ayant longtemps servi de base arrière pour l’approvisionnement en dollars du pays, étouffé par des sanctions occidentales et ravagé par 10 ans de guerre.

(L’Express/Radio Canada/Médias)

(Photo-Getty Images/Anwar Amro)

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