(Rome, Paris, 14.05.2023). La « journée spéciale » de Volodymyr Zelensky à Rome, parmi les diverses particularités de la personnalité du président ukrainien, a mis en évidence sa stature croissante en tant que leader international que peu l’accréditaient il y a encore quelques mois
L’arme secrète avec laquelle l’Ukraine résiste à l’invasion de la superpuissance russe et remporte probablement la guerre s’appelle Volodymyr Zelensky. Interprète et protagoniste absolu de la volonté de son peuple de ne pas se plier à l’agression de Moscou, le président ukrainien a assumé la direction morale et opérationnelle du pays dans les heures la plus sombres de Kiev, refusant au péril de sa vie d’être transféré en toute sécurité en Pologne alors que les spetnaz, les troupes spéciales russes, le traquaient pour le tuer.
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« J’ai besoin d’armes pour défendre l’Ukraine, pas d’un passage pour m’échapper », a-t-il répondu aux diplomates américains et britanniques qui voulaient le sauver, l’éloignant de Kiev en toute sécurité. C’est à ce moment précis que s’est opérée la métamorphose d’un comédien élu président par hasard en leader symbolique et leader de l’Ukraine. Une métamorphose qui a servi d’exemple et de guide à l’héroïque résistance ukrainienne. Il ne s’est pas passé un seul des quelque 500 jours de bombardements et de dévastation au cours desquels l’armée russe a tenté en vain d’envahir l’Ukraine sans que l’arme secrète de Zelensky ne mobilise les dirigeants mondiaux et l’opinion publique pour dénoncer les atrocités commises par les Russes et pour avertir l’Occident, que si Kiev tombait, d’autres pays et l’Europe elle-même seraient envahis.
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Invitant tous les dirigeants du monde dans la capitale ukrainienne à moitié détruite, de Biden à Macron, de von der Lyen à Johnson et Sunak, de Draghi et Giorgia Meloni au secrétaire général des Nations unies, António Guterres, le président Zelensky leur a montré la terrible évidence du génocide et des crimes de guerre perpétrés par les Russes, et a réussi à obtenir le soutien militaire et économique indispensable, d’abord pour résister, et contre-attaquer ensuite les troupes de Poutine. L’identification des Ukrainiens à leur président est totale et émouvante. Cela s’est aussi vu à Rome où ses compatriotes l’ont acclamé en larmes sous la pluie.
L’arrêt romain, après des visites aux sommets de Washington, Londres, Paris, Amsterdam, Bruxelles, Varsovie et aujourd’hui Berlin, a encore renforcé le rôle essentiel de Zelensky qui a réussi à parler, avant même les dirigeants institutionnels et politiques de notre pays, au cœur des Italiens, avec une attitude simple et courageuse et des paroles qui évoquaient la souffrance et la capacité des Ukrainiens à ne jamais baisser les bras.
Le président de la République Sergio Mattarella, qui depuis le début de l’invasion n’a cessé d’encourager l’Ukraine et de condamner fermement l’agression russe, a eu des mots et des expressions de grande participation et de solidarité à l’égard de Zelesnky, lors de la réunion qui s’est tenue aujourd’hui au Quirinal. Des mots si touchants et si sincères qui rappellent ceux que le chef de l’État utilise uniquement pour honorer les martyrs de la résistance italienne et les héros civils de la lutte contre la mafia. Des accolades et beaucoup d’affection au Palazzo Chigi (le siège de la présidence du Conseil des ministres italien, ndlr) également de la part de la Première ministre, choquée à plusieurs reprises et en larmes lors de sa récente visite en Ukraine, épicentre des atrocités commises par les russes, comme le souligne Gianfranco D’Anna dans son décryptage dans les colonnes du quotidien «Formiche».
« L’Italie mise sur la victoire de l’Ukraine et soutient l’indépendance et la souveraineté de Kiev. Nous espérons la paix, tant qu’il s’agit d’une paix juste », a affirmé de manière significative Giorgia Meloni, qui a rappelé l’engagement de Rome à accélérer l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne : « L’Italie était et est toujours du bon côté, du côté de la vérité dans cette guerre. Nous allons dans le sens de la victoire. La victoire signifie la paix pour notre Etat », a répondu M. Zelensky qui l’a remercié pour l’importante assistance militaire « qui donne à l’Ukraine, a-t-il dit, la capacité de résister à l’agression russe ».
La rencontre avec le Pape François, très chaleureuse et très suivie, a revêtu une grande importance internationale, à la fois diplomatique et humanitaire. Une audience pontificale qui a marqué le point culminant de la couverture médiatique mondiale de la visite du président ukrainien à Rome. Le pape François a remis à son hôte une petite sculpture représentant un rameau d’olivier, symbole de paix. Zelensky a offert au Pape une icône de la Madone peinte sur les restes d’un gilet pare-balles. De la confidentialité absolue qui a entouré les 40 minutes d’entretien à huis clos, seuls l’expression détendue et le regard satisfait du président ont filtré alors qu’il quittait le bureau privé du Souverain Pontife, qui aurait proposé diverses hypothèses de négociations et d’ouverture de pourparlers.
Du côté du Vatican, la possibilité d’impliquer l’Église orthodoxe russe pour vérifier la possibilité d’un retour d’information de la part de Poutine est implicite. Le chemin de la paix proposé par le pape François est un chemin de bonne volonté et d’espoir. Un cheminement piètre mais persistant qui vise à faire des incursions dans le cœur de tous ceux qui sont conscients des risques et des immenses carnages engendrés par la guerre en cours. « Il n’y a pas de chemin vers la paix. La paix est le chemin », disait le célèbre moine bouddhiste Thích Nhất Hạnh.