Un carrefour du gaz et un médiateur avec Poutine. Erdogan, l’homme aux deux visages

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(Rome, Paris, 15 octobre 2022). Le TurkStream, inauguré en janvier 2020, dispose d’une capacité annuelle de 31,5 milliards de mètres cubes et est composé de deux lignes offshore de 930 kilomètres et de deux lignes terrestres distinctes de 142 et 70 kilomètres : c’est ainsi que Moscou contourne l’Ukraine comme voie de transit vers l’Europe

Du gaz russe «via Erdogan» : médiateur et plus encore. Le rôle d’Ankara pourrait (encore) changer au lendemain du sommet d’Astana : non seulement le corridor céréalier ou l’élargissement de l’OTAN, qui sont sur la table, mais aussi le transport du gaz que Vladimir Poutine a identifié comme un nouveau vecteur en Turquie. Recep Tayyip Erdogan, selon le décryptage de Francesco De Palo dans le quotidien italien «Formiche», est désireux d’accroître ses échanges avec Moscou, alors qu’il cherche à stabiliser l’économie turque avant les élections de juin prochain.

En action

Erdoğan et Poutine, annoncent-ils, ont chargé les techniciens de procéder à la création du centre d’approvisionnement, d’imaginer le meilleur emplacement possible en Thrace à la frontière avec la Grèce et la Bulgarie : « Ils vont mener cette étude. Quel que soit l’endroit le plus approprié, nous espérons y établir ce centre de distribution », disent-ils.

A la suite des fuites du Nord Stream, Poutine a fait remarquer qu’il pourrait rediriger les approvisionnements destinés au gazoduc endommagé vers la mer Noire pour créer une plateforme gazière européenne en Turquie : « Nous pourrions déplacer les volumes perdus le long du Nord Stream, le long du fond du Mer Baltique dans la région de la mer Noire et ainsi créer les principales voies d’approvisionnement de notre carburant, de notre gaz naturel vers l’Europe via la Turquie, en créant le plus grand hub gazier pour l’Europe situé en Turquie ».

Où est-il

Le TurkStream, inauguré en janvier 2020, a une capacité annuelle de 31,5 milliards de mètres cubes et est composé de deux lignes offshore de 930 kilomètres et de deux lignes terrestres distinctes de 142 et 70 kilomètres : c’est ainsi que Moscou contourne l’Ukraine comme voie de transit vers l’Europe. Mais ce n’est pas tout, car grâce à une liaison, il transporte le gaz vers différents pays européens, dont la Serbie et la Hongrie.

Le rôle de la Turquie

Une invitation, celle de la Russie à la Turquie, qui s’inscrit dans le sillage des relations et des contingences d’avant et d’après-guerre en Ukraine : depuis un certain temps, la Turquie, membre de l’OTAN, entretient de bonnes relations avec la Russie et l’Ukraine et s’est livrée à un exercice de philosophie d’«équilibrisme» dès l’invasion, comme la décision de ne pas appliquer de sanctions contre Moscou contrairement aux nations occidentales. Erdogan à Astana s’est dit prêt à servir de médiateur dans le conflit, pour « une paix équitable », mais au-delà des déclarations, il est clair que le dividende politique incarné par le gaz et le gazoduc représente quelque chose de plus qu’un simple acte favorable, puisqu’il implique la redéfinition des politiques énergétiques méditerranéennes.

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Comment ne pas mentionner l’accord avec le gouvernement de Tripoli, par lequel la Turquie a décidé d’explorer le pétrole et le gaz dans les eaux libyennes, qui s’ajoute à l’accord entre le Liban et Israël, et à celui entre l’Égypte et la Grèce : un risque qui produit, physiologiquement, une série de répercussions en chaîne tant en Europe qu’au Moyen-Orient.

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