L’Allemagne aux prises avec l’islam légaliste

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(Rome 02 janvier 2021). L’Allemagne est l’un des pays européens les plus exposés aux phénomènes de l’islam politique et du terrorisme islamiste, comme le montrent les chiffres sur la radicalisation et les attentats de ces dernières années. La pression d’enquête des services secrets, combinée à la prise de conscience de la dynamique démographique favorable à la communauté musulmane grandissante, a poussé diverses entités de l’islam radical à vivre un changement de forme, préférant le «soft power» à la voie de la violence.

La menace islamiste en Allemagne

Les derniers chiffres sur la présence de l’islam politique en Allemagne sont alarmants. Selon ce qui est certifié par l’Office fédéral de la protection de la Constitution (BFV, Bundesamt für Verfassungsschutz), le nombre d’islamistes croît à un rythme annuel de 5,5%: ils étaient 26.560 en 2018, ils sont devenus 28.020 l’année suivante. En 2015, le BFV avait enregistré 13.920 personnes comme appartenant au monde de l’islam organisé; cela signifie qu’au cours de la période de référence 2015-2019, le nombre a pratiquement presque doublé.

Les principales organisations islamistes surveillées par les services secrets allemands sont en symbiose avec la Turquie: les Frères musulmans, Milli Gorus (une organisation islamique européenne siégeant à Cologne, ndlr) et Furkan. Si les deux premiers sont mieux connus du public et intègrent la grande majorité des islamistes interrogés par le BFV, ce dernier n’est venu sous les projecteurs que ces dernières années, commençant à être surveillé pour extrémisme par le BFV en 2018, et aurait un suivi de 350 personnes.

Le trio d’islamisme pro-turc est également rejoint par le Hizb at-Tahrir, qui continue d’opérer sur le territoire – avec une petite armée d’au moins 430 fidèles – malgré son interdiction en 2003.

L’Islam légaliste, de quoi s’agit-il ?

Le BFV estime qu’environ la moitié des 28.020 islamistes interrogés officiellement en 2019 appartiennent à une réalité pernicieuse pour la sécurité nationale, car basée sur une préférence pour le «soft power» plutôt que pour la violence, et rebaptisée «islam légaliste». Cela peut sembler paradoxal, mais ce n’est pas le cas: une faible exposition médiatique, une propension au dialogue et une tendance apparente à l’intégration sont des outils utiles pour brouiller les services secrets et compliquer les activités d’enquête elles-mêmes (l’absence de crimes à attribuer) empêche et/ou ralentir l’ouverture de la procédure d’accusation.

Les islamistes légalistes, selon la définition du BFV, visent l’islamisation de l’Allemagne « non pas avec la force brute, mais avec une influence silencieuse », c’est pourquoi ils déguisent leur agenda derrière la reconnaissance de la suprématie de la Constitution allemande et évitent soigneusement devenir des protagonistes de crimes.

Contrairement au passé, même assez récent, la clairvoyance est préférée à l’action du moment, compétence nécessaire pour produire «un changement du système social et politique sur le long terme». Cette patience, accompagnée d’un prosélytisme méticuleux et incessant, aide la réalité islamiste à contourner la loi et rend le ciel au-dessus de Berlin particulièrement sombre et nuageux.

Emanuel Pietrobon. (Inside Over)