(Rome, 09 juin 2025). Le renseignement iranien est-il actif en Israël ? Dans les hautes sphères de Tel-Aviv, la question devient de plus en plus urgente et pressante, à mesure que plusieurs indices convergent vers une prise de conscience croissante de la vulnérabilité de l’État hébreu face aux infiltrations hostile de la République islamique, à un moment où la compétition géopolitique entre les deux puissances est extrêmement intense, écrit Andrea Muratore dans son décryptage dans «Inside Over».
L’Iran a-t-il volé les secrets nucléaires d’Israël ?
Samedi, PressTV et d’autres médias contrôlés par l’État iranien ont rapporté que l’Iran avait obtenu des documents sensibles concernant le programme nucléaire israélien, liant cette information à une opération de ses services de renseignement. Tasnim, un média proche du Corps des Gardiens de la révolution, a fourni des précisions, liant l’acquisition de secrets nucléaires grâce à l’infiltration de deux citoyens israéliens, Roy Mizrahi et Almog Atias, emprisonnés pour espionnage au profit de l’Iran sur des dossiers stratégiques.
Aucune preuve n’a été apportée par Téhéran. Le «Times of Israel» a rappelé que «Mizrahi et Atias, tous deux âgés de 24 ans et résidant à Nesher, près de Haïfa, ont été arrêtés fin avril à l’issue d’une enquête conjointe menée par le Shin Bet et l’unité des crimes graves Lahav 433 de la police israélienne» et que «Mizrahi est resté en contact avec des agents iraniens tout au long de l’année 2025 et a mené une série de missions liée à la sécurité, dont certaines avec Atias, en pleine connaissance de cause».
La référence au scénario nucléaire, sujet extrêmement sensible de la sécurité nationale israélienne, dont l’arsenal atomique n’est officiellement pas reconnu, est sans contexte un puissant outil de pression politique.
Pourquoi les espions de Téhéran inquiètent Israël ?
Tout d’abord, il s’agit d’une opération de guerre psychologique à bas coût, susceptible d’exacerber les tensions internes au sein de l’État hébreu. La question des prétendues défaillances des services de renseignement a provoqué une rupture entre le Premier ministre Benyamin Netanyahou et le directeur sortant du Shin Bet, Ronen Bar, bientôt remplacé par le général David Zini, considéré comme compétent sur le plan militaire, mais inexpérimenté en matière de renseignement et influencé par une vision du monde ultranationaliste.
Deuxièmement, cette annonce intervient dans une période politiquement instable pour la coalition de droite au pouvoir à Tel-Aviv, et tombe comme un coup de tonnerre sur des rivalités institutionnelles déjà bien enracinées.
Troisième point, l’Iran cherche à contrebalancer la pression croissante exercée par le tandem israélo-américaine, alors que des négociations entre Téhéran et Washington sur le nucléaire sont en cours. L’objectif de Tel-Aviv serait de faire capoter ces discussions, tandis que les «faucons» américains ne cèdent pas, exigeant de la République islamique qu’elle renonce totalement à l’enrichissement d’uranium. Faire croire que Téhéran détient des informations sur la bombe atomique israélienne peut donc être perçu comme un moyen de rééquilibrer les rapports de force et d’imposer un levier de négociation.
L’Iran vise à renverser la stratégie menée depuis des années par Israël : étendre la guerre de l’ombre, non déclarée et longtemps clandestine, en territoire ennemi, après des années où les espions de Tel-Aviv ont erré librement sur le sol de ce pays.
A lire : Ce que signifie l’élimination par Israël du leader du Hamas Ismaïl Haniyé
Des assassinats de scientifiques nucléaires à l’attentat qui a éliminé le chef du Hamas Ismaïl Haniyé fin juillet 2024 à Téhéran lors de l’investiture du président Massoud Pezeshkian, Tel-Aviv a démontré qu’il savait frapper. C’est désormais Téhéran qui veut répliquer.
Comment l’Iran infiltre Israël
Le journal «Israel Hayom» s’est penché sur la stratégie d’infiltration de l’Iran en Israël, expliquant que Téhéran, pour faire pression sur ses rivaux par excellence, «a abandonné les méthodes classiques lentes et coûteuses de l’espionnage : fini les formations interminables ou les fausses identités élaborées». A la place, il privilégie «des campagnes massives et agressives sur les réseaux sociaux, par lesquelles des milliers d’Israéliens sont contactés» sous prétexte d’offres d’emploi et de revenus faciles.
Conscient des capacités du contre-espionnage israélien, qui a déjà arrêté 30 suspects en 2025, «l’Iran ne mise pas sur une seule recrue», mais «ratisse large, sachant que quelques infiltrations suffisent à semer le doute et l’insécurité».
De ce point de vue, peu importe que l’annonce retentissante du vol de secrets nucléaires israéliens par l’Iran soit vraie ou non : ce qui compte, c’est le message politique, à savoir faire sentir à Tel-Aviv que les hommes de Téhéran sont présents sur son territoire. L’objectif est de nourrir un sentiment d’encerclement et relever le niveau du défi iranien, dans l’espoir de relâcher la pression sur d’autres fronts.