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Israël frappe (ce qui reste) de l’arsenal du Hezbollah. Les scénarios de la guerre

(Rome, 24 septembre 2024). Jusqu’à 50.000 combattants (100.000 selon l’enturbanné, lors d’une interview, en octobre 2001, au cours de laquelle il a menacé son principal adversaire et sa bête noire, Samir Geagea, Ndlr). En plus des «réservistes». Jusqu’à 150.000 fusées et missiles. Telles sont les estimations sur l’arsenal et la puissance du Hezbollah libanais pro-iranien, relancées par le Washington Post sur fond de craintes liées à l’escalade entre le Parti de Dieu dirigé par Hassan Nasrallah et Israël. Les missiles du Hezbollah sont capables de frapper jusqu’à Tel-Aviv, mais le groupe semble préférer la voie de la «prudence», souligne Orna Mizrahi, de l’Institut d’études sur la sécurité nationale de Tel-Aviv. Elle est convaincue que «nous ne sommes qu’au début de quelque chose de nouveau».
En février 2024, Orna Mizrahi avait déclaré que «six mois après le début de la guerre, nous sommes dans une situation de guerre d’usure quotidienne. Chaque jour, il y a un certain nombre d’attaques du Hezbollah et des ripostes des Forces de Tsahal».
Et Madame Mizrahi d’ajouter que «la situation actuelle est anormale et inconfortable pour Israël, car une zone tampon de sécurité a été créée du côté israélien de la frontière, ce qui constitue la principale réussite du Hezbollah. Le groupe veut maintenir cette zone et continuer à se battre».

Le Hezbollah peut compter sur des missiles d’une portée allant jusqu’à 500 kilomètres, souligne CNN, qui illustre un arsenal de munitions de différentes portées composé de 120.000 à 200.000 roquettes et missiles (des roquettes Katyusha aux missiles Scud), en plus de drones, presque tous fournis par l’Iran. Nasrallah a parlé plus tôt cette année d’une force de plus de 100.000 miliciens et «réservistes», alors que les analystes militaires estiment que le Hezbollah compte entre 30.000 et 50.000 combattants. Le bilan officiel des attaques israéliennes d’hier au Liban, dont l’objectif déclaré était de frapper le Hezbollah, s’élève à plus de 550 morts, dont 50 mineurs selon les autorités de Beyrouth. A l’heure actuelle, aucune distinction n’est faite entre combattants et civils. Ce fut le jour le plus sanglant pour le Pays des Cèdres depuis au moins la guerre de 2006. La «milice de Dieu» a tiré contre le nord d’Israël des centaines de missiles et de roquettes, rapporte le quotidien «Il Tempo».

Elargissement du conflit

Les hostilités entre le Hezbollah, un groupe chiite historiquement soutenu par l’Iran, et Israël, n’ont rien de nouveau, mais l’escalade de la semaine dernière fait craindre un nouvel élargissement du conflit. Pour les analystes, écrit le «Post», les mesures israéliennes prises au cours de la semaine écoulée visent à forcer le Hezbollah à mettre fin aux attaques transfrontalières liées au conflit dans la bande de Gaza et pourraient être le prélude à un engagement militaire plus large. Hier, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu a déclaré qu’Israël était en train de modifier l’équilibre dans le nord (où se trouvent plus de 60.000 personnes déplacées, selon les données rapportées ces derniers jours par le «Times of Israel») et au sein du cabinet de sécurité, comme l’a révélé un responsable israélien à CNN, qui a expliqué que l’objectif au Liban était de désolidariser «le Hezbollah de la guerre avec le Hamas». Depuis près d’un an, les forces israéliennes pilonnent la bande de Gaza, passée sous le contrôle du Hamas en 2007, en réponse à l’attaque du groupe contre Israël le 7 octobre 2023. Plus de 41.000 morts sont recensés dans l’enclave palestinienne. Le Hezbollah, écrit le «Post», est un «ennemi plus grand, plus stratégique et mieux armé» et des craintes existent quant aux «ressources et à l’énergie» dont dispose Israël pour faire face à une nouvelle offensive à grande échelle.

Plus puissant que le Hamas

L’arsenal du Hezbollah est plus «sophistiqué» et «destructeur» que celui du Hamas. La supériorité militaire et en matière de renseignement israélienne est incontestable. Selon CNN, le Parti de Dieu a perdu au moins 500 combattants depuis octobre, parmi lesquels des dirigeants tels que Fouad Choukr et Ibrahim Aqil, (aujourd’hui, Ibrahim Kobeïssi a été éliminé, Ndlr), Aqil, ayant été tué lors d’un raid qui a décapité plusieurs dirigeants. Et, selon les déclarations d’un responsable israélien aux médias locaux, les raids israéliens de ces derniers jours au Liban ont considérablement réduit l’arsenal de missiles du Hezbollah et réduit de moitié le nombre de missiles dotés d’une capacité de frappe de précision, tandis que nombre de roquettes d’une portée allant jusqu’à 40 kilomètres aurait été réduit d’un quart. Au Liban, outre le coût en vies humaines, une guerre risque de coûter cher au Hezbollah, ainsi qu’aux Libanais, avec le risque de perdre de l’influence politique. Hier, avant de lancer les attaques, l’armée israélienne a exhorté les civils libanais des régions du sud et de l’est du pays, où les raids étaient concentrés, à quitter les zones où se trouvent les armes du Hezbollah.

Mais, comme l’a souligné Lama Fakih, responsable de «Human Rights Watch» pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, cité par le «Post», il n’incombe pas aux civils de «savoir où se trouvent les objectifs militaires». Les experts en sécurité, poursuit le journal américain, ont mis en doute l’efficacité des avertissements, arrivés peu de temps avant les attaques et envoyés dans des zones du Liban qui n’étaient pas le théâtre d’opérations. Imad Kreidieh, à la tête d’Ogero, le gestionnaire des infrastructures de télécommunications au Liban, a confirmé que le pays avait reçu hier plus de 80.000 appels téléphoniques générés par l’armée israélienne. Le ministre de l’Information, Ziad Makary, a quant à lui parlé de «guerre psychologique».

Politique et religion

Une milice fondée par l’Ayatollah Khomeiny au début des années 1980 et parmi les plus puissantes du Moyen-Orient, le Hezbollah est bien plus qu’un groupe armé. Il s’agit d’une force politique, présente au Parlement de Beyrouth, et qui, même si en 2022 elle a perdu la majorité qu’elle avait avec ses alliés, elle continue d’avoir une influence importante. La popularité du Parti de Dieu, aujourd’hui en crise, repose historiquement sur les services garantis et rendus à sa population, notamment dans les zones à majorité chiite (les chiites représentent environ 32% de la population libanaise). Et l’Iran, dont l’identité politique est basée sur le chiisme, soutient le Hezbollah comme le Hamas, avec lequel le mouvement dirigé par Nasrallah partage des «positions» quant à Israël. Au lendemain du 7 octobre dernier, le Hezbollah «est entré en scène» précisément «en solidarité» avec le groupe palestinien. La République islamique ne manque pas non plus de soutenir les Houthis au Yémen, que le Hezbollah a formés au même titre que les combattants des autres groupes chiites en Irak. L’Axe de groupes dirigé par l’Iran traverse également la Syrie, où l’Iran dispose d’une présence directe. Et depuis le 7 octobre dernier, la coordination entre les différentes formations s’est renforcée. «Nous ne devons pas laisser de répit au Hezbollah», a déclaré ce matin le chef d’état-major de Tsahal, Herzi Halevi.

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