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Liban: Sleiman Frangié n’est ni leader, ni poids lourd

(Montréal, Rome, Beyrouth, 16 mai 2023). Le prestigieux quotidien français Le Monde a publié une série de tribunes et d’articles consacrés au Liban et aux élections présidentielles bloquées depuis l’automne dernier. Alors que deux tribunes de poids avaient mis en évidence l’erreur de la France à persister à soutenir la candidature de Sleiman Frangié qui signera le retour de l’influence syrienne au Pays du cèdre, le dernier article déçoit par les approximations, pour ne pas dire les erreurs qu’il contient.

Madame Hélène Sallon a publié, dans le quotidien Le Monde du 11 mai 2023, une correspondance depuis Beyrouth relative au soutien français de la candidature de l’ancien député et ancien ministre Sleiman Frangié à la présidence de la République («Sleiman Frangié, candidat controversé de la France à la présidence libanaise»). L’article, bien qu’équilibré par la tribune de Naji Abou-Khalil et Michel Helou («La diplomatie de la France au Liban suscite l’incompréhension parmi ses alliés et risque l’isolement»), publiée la veille, et par l’analyse de Jean-Pierre Filiu mise en ligne quatre jours plus tôt («Le retour du Liban sous l’emprise d’Assad»), supporte quelques éclaircissements et des précisions.

En effet, Sleiman Frangié est décrit comme étant « le candidat controversé de la France à la présidence libanaise » et considéré comme « un leader maronite ». Or, comment peut-on attribuer au chef d’un parti qui n’a qu’un seul député au parlement (sur 128), et qui est de surcroit cantonné dans une seule région du pays (Zgharta et une partie du Nord), le qualificatif de leader maronite, au moment où ses rivaux désignés dans l’article, les Forces Libanaises, disposent de 19 députés et sont présentes sur l’ensemble du territoire et sont transcommunautaires ? Il convient aussi de relever l’erreur de taille du diplomate français cité dans l’article selon lequel « Frangié est le seul poids lourd historique chrétien », alors qu’il ne dispose que d’un seul député !

Il est vrai que, comme le dit Madame Sallon, Frangié est le candidat du duo chiite (Hezbollah et Amal), et qu’il est très proche de Bachar al-Assad, comme le rappelait aussi Monsieur Filiu. Mais ces arguments ne sont-ils pas suffisants pour que tous les Libanais s’opposent à sa candidature ? N’est-il pas normal aussi que la France soit dénoncée pour son choix anti-démocratique et anti-souverain et qui est de surcroit rejeté par la majorité des Libanais ?

Ensuite, l’auteure de l’article rappelle le « lourd passé » entre Frangié et les Forces Libanaises, en s’appuyant sur des sujets qui restent infondés de la guerre civile, pour conclure que Samir Geagea lutte pour le leadership chrétien. Il convient de rappeler ici que les Forces Libanaises et leur chef se sont battus et se battent toujours pour un Etat libanais souverain et Libre, loin des intérêts personnels et communautaires.

Pour construire l’avenir du Liban il ne faut pas remuer son passé mais s’appuyer sur le présent. Or, ce présent est catastrophique et Frangié, qui fut l’un des dirigeants de l’ère post-guerre civile (plusieurs fois ministre et toujours représenté au gouvernement) en porte une part de responsabilité. Il est l’allié du Hezbollah, une milice armée considérée comme une organisation terroriste par plusieurs pays. Comment la France, qui prétend défendre la souveraineté du Liban, peut-elle cautionner une telle candidature ? Paris, qui affirme vouloir tourner la page de la classe politique pour relancer les réformes, se trompe lourdement en cautionnant la candidature de l’un des symboles de cette même classe politique. Comment l’Elysée, qui disait vouloir sanctionner les responsables de l’explosion du port de Beyrouth du 4 août 2020, peut-il soutenir celui qui refuse que son bras droit, alors ministre des Transports, soit interrogé par le juge d’instruction ?

L’article affirme que Frangié a donné des gages à la France. Mais les promesses n’engagent que ceux qui les croient. Le Hezbollah avait promis un bel été en 2006, ce fut la guerre des 33 jours. Il avait promis de collaborer avec la justice internationale, et ce fut le 7 mai 2008. Il avait accepté le gouvernement d’union nationale en 2009, ce fut le tiers de blocage puis la démission et le renversement du gouvernement Hariri en janvier 2011. Il avait approuvé le document de Baabda (neutralité), ce fut son engagement militaire en Syrie. Et durant toute cette période, le Hezbollah et ses alliés ont systématiquement bloqué les processus démocratiques. Ils atteignent le comble de l’hypocrisie en accusant les autres acteurs de vouloir prolonger le vide. Ce n’est qu’un subterfuge pour justifier leur recours à la force, étant les seuls qui disposent de milices et d’armements.

En effet, depuis les élections législatives de mai 2022, le Hezbollah et ses alliés, dont Frangié, ont perdu la majorité parlementaire malgré l’usage des pressions et des intimidations. Par conséquent, ils ne parviennent pas à élire leur candidat. Le soutien de la France à ce dernier ne va-t-il pas à l’encontre des règles élémentaires de la démocratie ? La seule explication semble se trouver dans le jeu de séduction envers l’Iran, ou dans la peur des armes du Hezbollah. Alors de grâce, que Paris cesse de dire que l’option Frangié est pragmatique, et qu’elle est la seule à pouvoir sortir le Liban de la crise.

Sanaa T.

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