La haine des Tchétchènes envers l’Italie: «un mangeur de pâtes tué». L’affaire

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(Paris, 04 juillet 2022). La Russie affiche son hostilité envers l’Italie, encore une fois. Le commandant Tchétchène Kadyrov annonce dans une vidéo le meurtre d’un soldat ukrainien, résident en Italie, «l’Etat des pâtes». L’homme vivait à Foggia et titulaire d’une carte de résident (italienne) depuis 2015. C’est le dernier épisode d’une escalade russe contre Rome

« Il aurait pu rester dans son Etat de pâtes, sirotant des boissons fraîches à travers une paille, réagissant avec indignation à tout ce qui était russe ». Ramzan Kadyrov, commandant des Tchétchènes, l’un des généraux les plus fiables de Vladimir Poutine, se moque de l’Italie. Par cette épitaphe sur sa chaîne Telegram (avec 2,5 millions d’abonnés) il annonce la mort aux mains de sa milice d’un soldat ukrainien, résident en Italie.

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Selon Francesco Bechis du quotidien italien «Formiche», Oleh Slobodyan, 32 ans, originaire de Khmelnytskyi, la capitale de la région du même nom dans le nord-ouest du pays, aurait été tué lors des combats dans le Donbass. Probablement entre Severodonetsk et Lysichansk, le dernier avant-poste disputé de la région de Lougansk occupé ces derniers jours par un bataillon tchétchène. Pour annoncer la mort du « citoyen italien », une vidéo tournée, a été publiée par le commandant des troupes tchétchènes Apti Alaudinov, chef de l’unité Akhmat.

Dans la séquence, devenue virale sur le web pro-russe après le partage de Kadyrov, le soldat prend une carte d’identité italienne sur un bureau. Il montre les détails personnels d’Oleh, que le document indique comme résident de Foggia, dans les Pouilles. Magasinier de profession, il a obtenu sa carte italienne en 2015. « Ce que l’on ne trouve pas parmi les dépouilles abandonnées des nazis et des satanistes », écrit Kadyrov à ses partisans, « cette fois, dans les mains d’Apta Alaudinov, s’est retrouvé le passeport d’un citoyen italien ».

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« Ce jeune homme voulait tellement aller sur le champ de bataille qu’à la première occasion, il a couru rendre visite à son chef idéologique », ajoute le Tchétchène, en faisant référence au président ukrainien Volodymyr Zelensky.

La nouvelle a reçu une large couverture dans les médias russes, relayée par Ria Novosti et par des sites comme «Life.ru». Sur twitter, la vidéo du document « Slobodyan » est diffusée par le compte @AZmilitary1, qui parle d’un « perdant italien de Call of Duty ». Le profil social qui compte près de 40.000 adeptes, est connu depuis longtemps comme l’un des plus actifs dans la diffusion de la propagande et de la désinformation russes. Parmi les canulars publiés puis rendus viraux pendant la guerre, figure l’existence d’un parent nazi du chancelier allemand Olaf Scholz et l’utilisation de la croix gammée comme symbole de l’armée de l’air finlandaise.

A la vidéo postée sur Twitter, qui compte des centaines de partages et de «like», le compte est accompagné d’une note sur le soldat tombé au combat : « Il s’agit d’une carte d’identité italienne mais ce serait un citoyen résidant à Foggia, dans les Pouilles, dans le sud de l’Italie. En l’occurrence, l’adresse à Foggia est la même que celle du bureau local d’un parti néonazi ». Une référence au siège local du mouvement d’extrême droite Casapound, situé au 29D via Pestalozzi, à quelques numéros de rue de l’adresse figurant sur la carte de Slobodyan (au numéro 39). On trouve peu d’informations sur Slobodyan sur le web. Cependant, sa page Facebook rapporte qu’il ne résidait plus à Foggia : depuis 2019, il est retourné à Khmelnytskyi, sa ville natale, où il a trouvé un emploi de barmen chez Kofeman, un petit café du centre-ville.

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Ce n’est pas la première fois depuis le début de la guerre que les troupes russes annoncent avoir tué des combattants italiens ou des personnes titulaires d’une carte d’identité italienne. Déjà, en avril dernier, comme l’avait déjà révélé le quotidien italien «Corriere della Sera», le ministère russe de la Défense avait envoyé au Palazzo Chigi (le siège de la présidence du Conseil des ministres italien, ndlr) une liste de onze « combattants étrangers » de nationalité italienne tués sur le champ de bataille. Un récit que Moscou voudra présenter à Rome, ont suggéré ces dernières heures les médias russes, citant l’ambassadeur en Russie de la République populaire autoproclamée de Lougansk, Rodion Miroshnyk, selon lequel « les documents retrouvés à Severodonetsk et Lysychansk attestant de la présence d’étrangers dans l’armée de Kiev », dont celle de Slobodyan, « deviendront des preuves devant un futur tribunal ».

Les insultes de Kadyrov à l’égard de l’Italie ne sont que le dernier épisode d’une escalade, également rhétorique, entre Rome et Moscou. Il y a à peine une semaine, le Kremlin a blâmé le Premier ministre Mario Draghi pour avoir affirmé que Poutine participerait au G20 indonésien en novembre « uniquement par vidéoconférence ».