(Rome, 22 avril 2022). L’armée française a filmé ce qu’elle présente comme des mercenaires russes en train d’enterrer des corps près de la base de Gossi, dans le nord du Mali. Selon elle, l’objectif de Wagner était ensuite d’accuser les soldats français d’exactions.
C’est une réponse à la désinformation dont elle assure faire l’objet. L’armée française a fait fuiter des images tournées par un drone montrant des mercenaires russes en train d’enterrer des corps près de la base de Gossi, dans le nord du Mali. D’après l’état-major, l’objectif de ces mercenaires était d’ensuite accuser les Français d’avoir laissé un charnier derrière eux.
Une réponse à la « décrédibilisation de la force française »
La vidéo a été prise à l’aide d’un drone et l’état-major français la qualifie d’«attaque informationnelle». Dans cette vidéo, que France 24 a diffusée vendredi, on peut voir des soldats s’affairer autour de cadavres qu’ils recouvrent de sable. L’armée française assure qu’il s’agit de soldats blancs qu’elle a pu identifier sur des vidéos et des photos prises sur d’autres lieux.
Avec cette vidéo, l’armée française a voulu répondre aux accusations publiées ces derniers jours sur les réseaux sociaux.
Via le compte d’un certain « Dia Diarra » a été publiée une photo de cadavres floutés enterrés dans le sable, avec pour commentaire : « C’est ce que les Français ont laissé derrière eux quand ils ont quitté la base à Gossi (…) on ne peut pas garder le silence sur ça ! » Dans un autre tweet, le compte accuse une nouvelle fois les soldats français d’exactions. « Les images des cadavres depuis la base de Gossi sont terribles. Un crime contre le peuple malien fait par les Français qui ont joué un rôle du pays ami depuis 9 ans ! Une vidéo depuis l’ancienne base française est diffusée sur les discussions WhatsApp… »
Ce dénommé Dia Diarra, se proclame « ancien militaire » et « patriote malien ». Il s’agit « très probablement d’un faux compte créé par Wagner », la société militaire privée russe, selon l’état-major français. « On assiste à une manœuvre informationnelle structurée », reposant sur la « montée en gamme d’un premier tweet », a commenté vendredi le porte-parole de l’état-major, le colonel Pascal Ianni. C’est la première fois que l’armée française diffuse dans un délai si court des images de drone militaire en vue de contrer une attaque informationnelle, alors que la lutte d’influence fait désormais rage sur les réseaux sociaux.
« Cette manœuvre de décrédibilisation de la force française anti-djihadiste au Sahel, Barkhane, semble coordonnée. Elle est représentative des multiples attaques informationnelles dont les militaires français font l’objet depuis de nombreux mois », estime l’état-major.
Selon l’armée française, « la comparaison des photos publiées sur Twitter et des images recueillies par le capteur spécialisé permet de faire un lien direct entre ce que font les mercenaires de Wagner et ce qui est faussement attribué aux militaires français ». D’après elle, ces « exactions témoignent des modes d’action mis en œuvre par les mercenaires de Wagner, qui sont observés en Centrafrique depuis (son) déploiement et qui ont été dénoncés par de nombreuses organisations internationales et ONG ».
Des attaques « informationnelles » attendues par l’armée française
Dans le cadre de son désengagement du Mali, annoncé en février, l’armée française a officiellement remis mardi aux forces armées maliennes (FAMA) les clés de la base de Gossi, qui accueillait 300 soldats français. Paris a décidé en février son retrait militaire du Mali, dans un contexte sécuritaire dégradé et sur fond de tensions entre la France et la junte militaire au pouvoir, accusée par les Occidentaux d’avoir recours aux services du groupe Wagner. Bamako évoque pour sa part de simples conseillers russes.
Mardi, l’état-major avait prévenu s’attendre à des attaques informationnelles à l’occasion de la rétrocession de la base de Gossi. Son porte-parole, le colonel Pascal Ianni, avait précisé qu’un état des lieux « documenté » de la base avait été dressé, pour protéger la France d’éventuelles accusations. Une allusion au sentiment antifrançais qui a gagné du terrain dans la région et a valu à la France de faire l’objet de campagnes de dénigrement sur les réseaux sociaux. « Il y a plusieurs mois, les forces françaises ont été accusées de participer à des trafics (…), d’armer les terroristes voire de commettre des exactions », avait rappelé le colonel Ianni.