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Haute tension. L’Ukraine est désormais une (presque) impasse

(Paris, 21 février 2022). La table de l’OSCE, Macron de retour dans le jeu, les alertes de Washington. La crise ukrainienne est désormais une poudrière. Poutine s’ouvre aux négociations mais pour les services de renseignement occidentaux, l’invasion n’est qu’à un pas. Scénarios (réalistes) pour une sortie. L’analyse du prof. Giovanni Savino (Académie présidentielle russe, Moscou)

Les jours qui ont suivi la date annoncée de l’invasion russe ont été marqués par une nouvelle résurgence du conflit dans le Donbass, avec 1.566 violations du cessez-le-feu signalées par la mission de l’OSCE, l’évacuation de milliers de personnes vers la Russie, des accusations mutuelles de bombardements et d’attentats.

Alors que des villes du sud-est de l’Ukraine se sont à nouveau retrouvées au centre d’une guerre qui dure depuis 2014, plus de 53.000 réfugiés ont franchi dimanche soir la frontière russe, où les postes frontières ne fonctionnent qu’à l’entrée. Des réfugiés répartis dans les différentes régions russes, hébergés dans des camps de garde d’enfants et autres abris, dans le cadre d’une gestion d’urgence qui, dans les premières heures, a été marquée par le chaos, puis résolue par l’envoi de convois, dont certains ferroviaires, de la région de Rostov.

Ce que nous voyons en ces heures, est un conflit dans lequel la dimension de la communication l’emporte sur les bombes et tente de construire un consensus, explique Giovanni Savino dans les colonnes du quotidien italien «Formiche». Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré à l’émission de télévision Moskva.Kreml : Poutine craignait des provocations ou des étincelles dans le Donbass, ajoutant que la Russie a toujours été attaquée dans l’histoire et n’a jamais déclenché de guerres.

Le même jour, après l’annonce de la prolongation des exercices militaires conjoints en Biélorussie en raison de la situation en Ukraine, une longue conversation téléphonique entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine a eu lieu, suivie d’un entretien entre le président français et Volodymyr Zelensky.

L’activisme de Macron, aux prises avec une campagne électorale difficile où il serait le favori à la défaite, a visé ces dernières semaines à trouver une solution, agissant comme un intermédiaire possible entre Moscou et Kiev, en contact permanent avec les deux présidents. L’Elysée a annoncé une réunion du groupe trilatéral pour convenir d’un cessez-le-feu dans les prochaines heures, un fait non confirmé par le Kremlin pour le moment.

Les instances parlementaires russes, à savoir le Conseil de la Fédération et la Douma, ont été convoqués pour le 22 février. Alors qu’à la Douma, la session suit l’adoption de la motion adressée au président sur la reconnaissance des républiques séparatistes, l’ordre du jour du Conseil de la Fédération comprend actuellement des discussions sur des questions relatives aux dépenses militaires, à la fiscalité et à la justice.

Selon l’article 102 de la Constitution russe, le président doit demander au Conseil l’autorisation d’envoyer des troupes à l’étranger, comme cela s’est produit en mars 2014 pour la Crimée et en 2015 pour l’expédition en Syrie. En outre, dans la loi sur la défense, un paragraphe de l’article 10, introduit en 2009, un recours à l’armée est prévu en cas de danger pour les citoyens à l’extérieur des frontières : dans le Donbass, sur environ 3,7 millions d’habitants, il y a plus de 720.000 Russes détenteurs de passeports, et ces dernières semaines, selon des sources à Moscou, un autre million a demandé la citoyenneté.

Paris, après la conversation entre Macron et Poutine, a annoncé son intention de travailler à un sommet visant à redéfinir les bases d’un nouvel équilibre européen au nom de la paix et de la sécurité sur le continent, ajoute Giovanni Savino. Zelensky, lors de la conférence de Munich (désertée par Poutine et Lavrov), a demandé des assurances sur la défense de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, alors que l’incertitude grandit, et que la possibilité d’une nouvelle intensification des opérations de guerre dans le Donbass augmente.

Si les scénarios d’un conflit global paraissent (heureusement) encore improbables, une éventuelle motion de reconnaissance des républiques séparatistes, avec une intervention localisée dans ces territoires, pourrait entraîner une répétition de l’opération Attila mise en œuvre par la Turquie en 1974, et qui a conduit à la division de l’île (lancée le 20 juillet 1974 et qui conduisit à l’occupation de 38% du territoire chypriote par la Turquie, ndlr). Une perspective qui ouvrirait de nouveaux développements en Europe de l’Est.

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