Syrie: Al Quraichi a péri. Quel avenir pour l’État islamique ?

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(Rome, Paris, 04 février 2022). Le «calife» de l’État islamique, Abou Ibrahim Al Hashimi Al Quraichi, est mort à Idlib en se faisant exploser avec sa famille pour ne pas être capturé par les américains

Abou Ibrahim Al Hashimi Al Quraichi, le « calife » de l’Etat islamique, a péri. Il a perdu la vie lors d’un raid des forces spéciales américaines à Idleb. Il n’est pas clair si le commandant suprême de l’ex-Etat islamique, qui avait pris la place d’Abou Bakr Al Baghdadi (qui est également mort à Idlib) a été tué lors d’un échange de tirs ou il s’est fait exploser pour éviter d’être capturé. Il est certain cependant, que 13 personnes sont mortes dans l’opération, dont six enfants et quatre femmes, et qu’une très forte explosion a été entendue. On présume donc qu’Al Quraichi (alias Amir Mohammad Sa’id Abdel-Rahman al-Mawla) a imité les actes de son prédécesseur, quant au sacrifice de la famille. Al Baghdadi, en effet, pour éviter d’être pris, a activé une bombe, mourant avec trois de ses enfants et deux épouses, selon Francesco Bussoletti, l’expert en Défense et Sécurité, dans le quotidien italien «Difesa & Sicurezza».

L’ex-Etat islamique a subi un coup dur mais non insurmontable. Surtout après les révélations selon lesquelles Al Quraishi était un traître

Pour l’État islamique, la mort d’Al Quraichi est un coup très dur, mais pas insurmontable. Le « Calife », en effet, ces dernières années, avait perdu une grande partie de son emprise sur les djihadistes. Notamment, après les révélations selon lesquelles dans le passé, il aurait vendu ses hommes aux Etats-Unis pour faire « carrière » au sein de l’ex-EI. Entre le 3 janvier et le 2 juillet 2008, en effet, il a sciemment coopéré avec « l’ennemi ». Al-Mawla, fournissant des informations décisives qui ont conduit à la capture et à la mort de plusieurs de ses camarades ou ses supérieurs, et a révélé les noms d’infiltrés dans des organisations telles que le Croissant-Rouge. Le cas le plus frappant, ajoute Francesco Bussoletti, est celui des « renseignements » à l’origine de l’opération dans laquelle est tué Abou Qaswarah, le numéro deux de l’État islamique en Irak (EI), dont le rôle a été repris par le même Al-Mawla.

L’ancien État islamique est aujourd’hui une galaxie fluide, qui a déplacé son intérêt du Moyen-Orient vers l’Asie et surtout vers l’Afrique. Les groupes locaux se battent sous un seul drapeau, mais sont autonomes et indépendants

Aujourd’hui, en outre, l’État islamique est devenu une galaxie aussi fluide qu’Al-Qaïda, composée de formations qui combattent sous un même drapeau, mais qui conservent une forte indépendance et une autonomie. De plus, le centre d’intérêt de l’ancien État islamique du Moyen-Orient s’est déplacé vers l’Asie et surtout l’Afrique. Un territoire lointain, dans lequel opèrent des groupes qu’Al Quraichi connaissait peu. Par conséquent, le dirigeant avait un contrôle général très limité, voire inexistant, et devait nécessairement le déléguer aux sommets locaux, se limitant à la fourniture d’une «simple adresse». Sans surprise, pendant les années de son « califat », Al-Mawla a diffusé très peu de messages à ses adeptes et a gardé un profil bas, évitant les apparitions publiques.

Quel sera l’avenir de l’EI ? Le nouveau « Calife » sera-t-il une figure plus proche de l’Afrique ? Pendant ce temps, les risques d’attaques de vengeance en Occident augmentent

La mort d’Al Quraichi impose désormais à l’État islamique à subir une révision interne approfondie. Tout d’abord, l’ex-EI devra nommer un nouveau « calife » et se réorganiser selon sa vision. Il n’est cependant pas exclu que le leader soit pour la première fois quelqu’un ayant des liens à la fois avec le Moyen-Orient et l’Afrique. Il s’agit de tirer pleinement parti de la forte poussée expansionniste en cours des groupes régionaux pro-EI (ISCAP, ISWAP et ISGS) sur le Continent. Ce processus ne sera toutefois pas immédiat et, dans l’intervalle, la formation sera plus faible et plus perméable aux attaques. D’autre part, les dangers d’attaques terroristes en Occident à des fins de vengeance, y compris par le biais de loups solitaires, vont également augmenter. Dans ce contexte, logiquement, les pays les plus à risque sont les membres de l’opération « Inherent Resolve ».