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Le «black-out» économique chinois: ce que se passe (réellement) à Pékin

(Rome, Paris, 17 janvier 2022). Comment se porte l’économie chinoise ? Cela dépend de la façon dont les données sont lues. En effet, si l’on se limite à un examen rapide des chiffres dévoilés par l’Office national des statistiques (BNS), il semblerait que le Dragon soit en difficulté, aux premières loges et incapable de réagir face à des adversaires bien plus puissants. Mentionnons tout d’abord l’ennemi invisible qui ne se lasse jamais : le Sars-CoV-2. En fait, Pékin a depuis longtemps réussi à endiguer les contagions, ramenant la coexistence avec le virus à un niveau plus qu’acceptable ; mais les sacrifices demandés au pays par le gouvernement ont été nombreux, à commencer par les politiques strictes adoptées pour contenir la propagation du Covid-19, comme le souligne l’analyse de Federico Giuliani dans le journal «Il Giornale/Inside Over).

Suivent deux autres facteurs déstabilisants, comme la crise immobilière et la crise énergétique, qui ont provoqué une forte contraction du marché de la consommation et de l’investissement. Les graphiques parlent d’eux-mêmes : à partir de février 2021, le produit intérieur brut, la production industrielle et les ventes au détail ont dégringolé. Pourtant, ce serait une erreur de clore la question en parlant d’une Chine en déroute, ou pire, d’une nation qui a perdu sa force motrice.

C’est exact, car, ayant constaté la présence d’un ralentissement marqué – qui a d’ailleurs touché le monde entier – au quatrième trimestre 2021, la République populaire a néanmoins connu une croissance de 4 % de son PIB. Pour être précis, il s’agit d’une décélération de 0,9 point de pourcentage par rapport aux neuf premiers mois de l’année, ainsi que de la plus faible augmentation du PIB enregistrée depuis le deuxième trimestre 2020 ; mais les autorités chinoises, contrairement à la quasi-totalité des gouvernements occidentaux, peuvent encore annoncer une croissance significative.

Ralentissement ou décélération ?

La Chine a terminé l’année 2021 sur une note positive, note Federico Giuliani, avec un PIB global de 18.000 milliards de dollars et une croissance de 0,1 point de pourcentage supérieure aux estimations précédentes de la Banque mondiale, qui prévoyait une expansion de l’économie de 8 %. Le principal moteur de la croissance en 2021 a surtout été la forte demande enregistrée au premier semestre, lorsque la Chine, la première des puissances mondiales à s’élever après le tremblement de terre de Covid-19, a exporté une grande quantité de biens et dispositifs médicaux. Toutefois, l’atonie persistante des secteurs de l’énergie et de l’immobilier a incité le gouvernement à prendre des mesures plus décisives sur le marché et à formuler des objectifs de croissance plus raisonnables pour l’année en cours.

Selon des informations publiées ces derniers mois par la « Nikkei Asian Review », le Parti communiste chinois a décidé de fixer l’objectif de croissance pour 2022 à 5,5 %. Alors, d’après ce qui est ressorti, il y a ceux qui continuent à parler de freinage chinois et ceux, plus exactement, de décélération. Et entre les deux concepts, il y a une différence notable, étant donné que le premier évoque un krach brutal, tandis que le second illustre un pays toujours en lice, mais à une vitesse de croisière plus lente que lors de son démarrage.

Le plus grand risque

En parlant de vitesse de croisière, cela mérite une évaluation plus approfondie. Le PIB de la Chine, comme mentionné, est positif, alors que les objectifs techniques fixés à l’ordre du jour ont tous été atteints. Attention cependant à la perception de la population face à un scénario bien éloigné de ce qui, il y a quelques années, était la toile de fond d’une croissance apparemment imparable. Qu’il suffise de dire qu’entre 1985 et 1989, le taux de croissance du PIB par habitant chinois est passé de 12% à 2,5%, provoquant d’énormes tensions sociales et conduisant aux incidents de la place Tiananmen.

Sans surprise, un article de l’hebdomadaire «La Lettura» a mis l’accent sur un risque que Pékin ferait bien de prendre en considération : « Le mécontentement de ceux qui perdent (ou ont l’impression de perdre) ce qu’ils ont (ou espèrent avoir) peut donner lieu à des crises sociales bien plus déstabilisantes que le mécontentement de ceux qui n’ont rien et ne s’attendent à rien avoir ». Pour en revenir au présent, la croissance du PIB par habitant a diminué de moitié entre 2010 à 2019, passant de 10 % à 5 %, pour atteindre ensuite 2 % en 2020. Si, du point de vue européen, la croissance chinoise apparaît presque comme un mirage, du point de vue du peuple chinois, elle est plus pauvre qu’il y a dix ans.

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