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Exxon, gaz et F-35. Ce qui irrite Erdogan

(Rome, Paris, 20 décembre 2021). Haute tension dans la zone économique exclusive chypriote contestée par Ankara : les Américains s’apprêtent à forer alors que Cavusoglu menace de représailles

Des manœuvres militaires majeures à Chypre « pour protéger » Exxon qui s’apprête à forer dans la zone 10 de la ZEE chypriote, précisément dans le champ de Glafkos. Un cordon de sécurité sur la plate-forme Stena Forth, déclenché depuis plusieurs jours dans le port de Limassol, comme le rapporte le décryptage de Francesco De Palo dans «Formiche». Des provocations d’Ankara sont à craindre. La tension turque a également été renforcée par le fait que Moscou n’a pas donné à Erdogan son feu vert pour agir en tant que médiateur en Ukraine, donc le président turc est assez irrité (et même la nouvelle des F35 à Athènes ne le rassure pas non plus).

LE TABLEAU

La présence d’acteurs américains tel qu’Exxon (ainsi que des moyens et des militaires) à Chypre déstabilise Ankara, car elle démontre une fois de plus l’implication objective des Etats-Unis dans la macro-région. Une démarche qui s’inscrit dans le cadre des évolutions géopolitiques en Turquie, de plus en plus difficiles à prévoir. Malgré l’effondrement de la monnaie turque, Recep Tayyip Erdogan reste un dirigeant ayant une forte prédisposition à pénétrer les zones de crise, telles que la Libye, la Syrie et l’Ukraine. Mais la question énergétique transcende toutes les autres, car elle est interconnectée, comme en témoignent les propos du ministre des Affaires étrangères, Melvut Cavusoglu, selon lesquels « la Turquie ne permettra jamais à un pays, une entreprise ou un navire étranger de se livrer à des activités d’exploration d’hydrocarbures dans son juridictions « maritimes ».

La réponse du Conseil des affaires étrangères de l’UE consiste en l’expression de la solidarité exprimée envers Chypre et, en même temps, en une invitation adressée à la Turquie « à mettre un terme à toutes les menaces et actions qui portent atteinte aux relations de bon voisinage, à normaliser les relations avec la République de Chypre et à respecter la souveraineté de tous les États membres de l’UE ».

ICI CHYPRE

Comme l’ont fait remarquer les dirigeants d’Exxon lors de la récente convention de Houston, Exxon-Mobil a réduit son investissement global visant à limiter la production d’hydrocarbures en réponse à la pression des actionnaires. S’il est de la volonté du géant américain d’évoluer rapidement vers des énergies plus propres, force est de constater qu’à court terme le monde continuera à dépendre des énergies fossiles. Ainsi, à Chypre, Exxon-Mobil pourrait commencer par une collecte de données sur les recherches effectuées dans le bloc 10, sans aucune recherche dans le bloc 5 qui pourrait hypothétiquement être lancée à tout moment. Rappelons sur ce point que 40 % du bloc situé dans la partie nord de Chypre et revendiqué par la Turquie, ont un potentiel en hydrocarbures inférieur au reste des lots.

En réponse, un nouveau Navtex turc arrive à Chypre jusqu’au 31 janvier de l’année prochaine. Il s’agit d’une zone où le navire de recherche « Oruç Reis » mène des études depuis maintenant près de trois ans.

F-35

Ce qui a déjà été surnommé « le dernier chasseur avec équipage » pourrait être entré dans le cône d’intérêt hellénique (et a quitté celui du Bosphore). À la lumière de l’approbation formelle du budget américain de la défense, qui inclut le projet de loi Menendez-Rubio, il est écrit noir sur blanc qu’il accroît l’implication américaine dans le renforcement des capacités militaires de la Grèce, ajoute Francesco De Palo. Le texte comprend notamment un rappel pour accélérer les procédures d’acquisition des F-35. Si d’une part il est clair que la Grèce a déjà dépensé d’importantes sommes pour l’achat des chasseurs Rafale et des frégates françaises, de l’autre rien n’est à exclure à moyen ou à long terme, car la géopolitique plus que les budgets, pourrait influencer les décisions et les relations.

Les cinq prochaines années en ce sens, seront décisives en termes de calendrier, mais en attendant, la déclaration bureaucratique susmentionnée et la mise en œuvre sur le sol grec de la nouvelle alliance militaire Éline-américaine représentent deux piliers des nouvelles stratégies américaines en Méditerranée.

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