L'actualité du Proche et Moyen-Orient et Afrique du Nord

Libye: Exclusif «Nova», voici le projet des conclusions de la conférence de Tripoli

(Rome, 20 octobre 2021). L’indication explicite d’une date pour les élections législatives et présidentielles fait défaut

Soutien à la « souveraineté, l’indépendance, l’intégrité territoriale et l’unité de la Libye », rejet de « toutes les formes d’ingérence étrangère dans les affaires libyennes » et les « tentatives de violation de l’embargo sur les armes et d’envoi de mercenaires en Libye ». La fin de la « présence militaire en Libye » afin de « créer un environnement approprié » pour la tenue des « élections nationales équitables » dans ce pays d’Afrique du Nord à une date non précisée. Soutien à « l’initiative du gouvernement libyen visant à stabiliser la Libye » et aux efforts des autorités de Tripoli pour « rétablir l’unité » dans le pays. C’est ce que l’on peut lire dans le projet de déclaration finale de la Conférence ministérielle sur la stabilité de la Libye qui devrait être adopté demain à Tripoli. Il s’agit d’un document de six pages qui comprend 24 points répartis en six chapitres, publié en Exclusivité par l’agence italienne «Nova» : introduction ; processus politique ; volet économique et financier ; volet militaire et sécurité ; respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme ; et action complémentaire.

En Libye, toujours pas de date pour les élections

L’absence de date pour les élections législatives et présidentielles, qui devraient se tenir le 24 décembre, est plus que surprenante. Le texte mentionne les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et la feuille de route du Forum de dialogue politique libyen (LPDF) qui, en théorie, prévoient que les consultations parlementaires et présidentielles doivent se tenir la veille de Noël, date de la célébration du 70e anniversaire de l’indépendance. L’absence d’une référence explicite aux échéances électorales pourrait être mal perçue notamment par l’Egypte, qui fait pression pour que les Libyens se rendent aux urnes dans les plus brefs délais. Il convient de rappeler que le général Khalifa Haftar, l’homme fort de Cyrénaïque qui a tenté en vain de s’emparer de Tripoli dans le conflit de 2019-2020, a temporairement quitté le commandement de son armée nationale libyenne autoproclamée précisément pour se présenter aux élections présidentielles.

Migrants et terrorisme parmi les sujets abordés

Au point numéro neuf, le projet de texte mentionne « l’importance de prendre les mesures nécessaires pour instaurer la confiance et un environnement approprié pour des élections nationales équitables », tandis que le point dix exhorte « les partis libyens et les acteurs internationaux sont invités à accepter les résultats » des élections, soulignant « que des mesures punitives strictes seront prises contre ceux qui entravent le processus politique ». Au point 13 du projet, « les participants conviennent à l’unanimité que la fin du conflit et la réalisation de la sécurité et de la stabilité en Libye est essentielle pour instaurer la paix et construire l’État ». Les points suivants abordent le dossier de la migration irrégulière et de la lutte contre le terrorisme, sans nouvelles majeures ni condamnations de la conduite libyenne après l’arrestation d’environ 4.000 personnes, dont des femmes et des enfants, dans un quartier de Tripoli peuplé de migrants. Quant au volet « militaire et sécuritaire », au point numéro 19 du projet de déclaration finale, les participants « saluent » le plan d’action approuvé à Genève le 8 octobre par le Comité militaire 5 + 5 « concernant la fin de la présence militaire étrangère » dans le pays. Les mots prononcés (« présence militaire ») pourraient susciter l’opposition de la Turquie, qui prétend être présente en Libye sur la base d’un accord signé en 2019 avec le gouvernement libyen.

La Conférence sur la Libye et les participants

Pour la première fois depuis plus d’une décennie, une conférence se tiendra demain à Tripoli, la capitale de la Libye, qui réunira une quinzaine de ministres des Affaires étrangères, ainsi que des représentants de l’Union africaine, de l’Union européenne, de la Ligue arabe et des Nations Unies. Après Paris, Palerme, Abou Dhabi et Berlin, Tripoli va désormais accueillir une réunion internationale visant à stabiliser la Libye. Sur la rencontre fortement souhaitée par le gouvernement de transition d’union nationale (GUN), dont le mandat expirera dans quelques semaines, se trouvent des difficultés objectives, à commencer par le boycott de la Turquie et de la Russie, présentes avec des délégations de faible niveau. Non seulement ; Des sources libyennes ont indiqué à «Nova» que la déclaration finale ne pouvait être adoptée que par la présidence libyenne, sans la signature des ministres présents, signe qu’il existe de larges divergences notamment sur le dossier du retrait des forces étrangères.

Malgré quelques défections, le plateau de la conférence de Tripoli reste exceptionnel. Selon les sources de « Nova », l’Italie sera représentée par Luigi Di Maio, ministre des Affaires étrangères, un vétéran de la Libye, où il s’est rendu une dizaine de fois. Est également attendu dans la capitale maghrébine le ministre Français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, un homme puissant de la diplomatie française, ancien ministre de la Défense de 2012 à 2017. Les ministres des Affaires étrangères d’Espagne, de Malte, de Tunisie et d’Algérie sont également présents à Tripoli ainsi que ceux d’autres pays voisins. L’ONU sera présente avec la sous-secrétaire Rosemary Di Carlo, qui a rencontré hier la ministre libyenne des Affaires étrangères, Najla el Mangoush, ainsi que l’envoyé des Nations Unies Jan Kubis. Pour la Ligue arabe, il devrait y avoir le secrétaire général Ahmed Aboul-Gheit, actuellement en visite en Tunisie tout comme la vice-secrétaire d’État américaine, Wendy Sherman. L’Allemagne, aux prises avec la formation d’un nouveau gouvernement, sera présente avec un ministre d’État. L’ambassadeur José Antonio Sabadell sera présent pour l’Union européenne, alors qu’il n’est pas encore clair qui représentera l’Égypte. La Turquie et la Russie, les deux pays les plus impliqués dans le conflit militaire libyen de 2019-2020, sont pratiquement absents : Ankara sera représenté par un vice-ministre tandis que de Moscou, seul un directeur du ministère des Affaires étrangères sera présent.

Les dossiers sur la table

Les dossiers sur la table de la conférence sont essentiellement au nombre de deux : le retrait des forces étrangères et les élections de décembre. Sur le premier point, l’idée du gouvernement libyen est de soutenir l’accord trouvé il y a quelques jours à Genève sur la feuille de route visant à retirer « les combattants, les mercenaires et les forces étrangères » de Libye. Le problème, c’est que la Turquie n’est pas d’accord avec le terme « forces étrangères », car elle estime que sa présence militaire en Libye est légitimée par l’accord signé en 2019 avec le gouvernement libyen du Premier ministre de l’époque Fayez al Sarraj. Au contraire, l’Egypte fait pression pour expulser les forces turques du pays voisin dans les plus brefs délais, tandis que la Fédération de Russie fait bonne figure : la situation actuelle du statu quo permet en effet à Moscou de maintenir en Libye, à travers les mercenaires du groupe Wanger, une épine dans le pied de l’Alliance atlantique et en même temps une garnison stratégique pour la pénétration dans le Sahel.

Le nœud des urnes

Quant aux élections, la situation est assez compliquée. La feuille de route du Forum de dialogue politique libyen (l’organisation parrainée par l’ONU) prévoit des votes simultanés pour les élections présidentielles et législatives du 24 décembre, date symbolique du 70e anniversaire de l’indépendance de la Libye. Cependant, les soi-disant « spoilers » (les facteurs de trouble) ont longtemps manœuvré pour retarder ou diviser les consultations. La présidence de la Chambre des représentants de Tobrouk (Est) souhaite d’abord des élections présidentielles et ensuite les parlementaires. Au contraire, le Conseil d’Etat de Tripoli (ouest) pousse à la tenue des élections parlementaires d’abord et les présidentielles seulement après un référendum constitutionnel. D’après ce qu’on a appris à « Nova », les conclusions générales des travaux – comme l’a dit la présidence libyenne – devraient éviter de mentionner un réel engagement concret à tenir les élections comme convenu, sous prétexte de défaut sécurité et de stabilité.

Recevez notre newsletter et les alertes de Mena News


À lire sur le même thème