Sommet Biden-Poutine: les ambitions limitées de la diplomatie russe

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La Russie n’attend de la rencontre entre Joe Biden et Vladimir Poutine ce mercredi à Genève que peu de résultats concrets. Le Kremlin aborde le sommet avec des objectifs modestes : renouer le dialogue, au plus bas depuis la fin de la guerre froide, et rétablir des relations diplomatiques apaisées.

Le Kremlin n’a cessé de le répéter ces dernières semaines : il ne faut pas s’attendre à une percée diplomatique majeure sur les bords du lac Léman. Néanmoins, le porte-parole de Vladimir Poutine, Dmitri Peskov, assure qu’il ne faut surtout pas minimiser l’importance de ce sommet.

Pour la Russie, le simple fait que la rencontre ait lieu, et que Joe Biden en ait été l’initiateur, est déjà un premier résultat. C’est le signe, estime-t-on à Moscou, que la Russie est prise au sérieux par le nouveau président américain – et c’est assez pour oublier, ou faire mine d’oublier, les déclarations très dures qu’a pu avoir le successeur de Donald Trump à l’égard de Vladimir Poutine.

« Il ne faut pas surestimer le potentiel de ces discussions, estime Andreï Kortunov, directeur du Conseil russe pour les affaires internationales, car les deux pays ont des états d’esprit et une vision du monde très différents. Mais il faut empêcher que la relation bilatérale se dégrade encore davantage, et mettre un terme à la guerre diplomatique entre les deux pays. »

Échange de prisonniers

Selon la presse russe, le Kremlin s’est fixé au moins deux objectifs concrets pour ce sommet : relancer le dialogue sur le contrôle des armes nucléaires, et reprendre une activité consulaire normale dans les deux pays. Un retour des ambassadeurs américains et russes à leurs postes respectifs – ils restent vacants depuis que Joe Biden, en mars dernier, a estimé que Vladimir Poutine pouvait être considéré comme un « tueur » – serait considéré comme un bon début.

« Plusieurs crises régionales peuvent également faire l’objet de discussions constructives, ajoute Andreï Kortunov. « Pas l’Ukraine, la Biélorussie ou la Libye… Mais une entente peut être envisagée sur l’Afghanistan, la Corée du Nord, ou même la Syrie ».  Interrogé sur un possible échange de prisonniers lors de l’entretien accordé en début de semaine à la chaîne de télévision américaine NBC, Vladimir Poutine a également laissé entrevoir, sur ce point, la possibilité d’un accord, qui permettrait notamment à Trevor Reed et Paul Whelan de recouvrer la liberté et de rentrer chez eux.

Un négociateur « coriace »

Mais pour le reste, on se contentera à Moscou du service minimal : pas de communiqué commun, pas même de conférence de presse conjointe. Pour le journal Kommersant, jamais en 30 ans les deux pays n’avaient abordé une rencontre au sommet avec aussi peu d’ambitions. « C’est une première rencontre dans des conditions difficiles », concède Iouri Ouchakov, le conseiller de Vladimir Poutine sur les questions internationales, qui envisage ce sommet avec un « optimisme pratique mais faible » selon des propos rapportés par l’Agence France-Presse.

« Le sommet est certes organisé à Genève, comme celui de 1985 entre Gorbatchev et Reagan, mais la comparaison s’arrête là, analyse Andreï Kortunov. Pour Poutine, qui est un négociateur coriace, il n’est pas aussi crucial de s’entendre avec l’Occident que c’était le cas pour Gorbatchev ! Et l’on ne sait pas encore si Joe Biden sera un président américain aussi fort que l’était Ronald Reagan. Bien sûr, nous espérons tous qu’il y ait un résultat important, et qu’une nouvelle page puisse s’ouvrir dans les relations entre les deux pays…. Mais c’est encore trop tôt pour cela ».

(RFI)