Après avoir mis en échec la feuille de route française pour le Liban, le Hezbollah mobilise contre Paris sous couvert des caricatures

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(Rome 31 octobre 2020). Le Hezbollah persiste à couper le Liban de son environnement régional et international pour le ruiner et mieux le soumettre à huis clos. Méthodiquement, il a provoqué des crises diplomatiques avec les principaux soutiens financiers du Liban, particulièrement les monarchies du Golfe, en multipliant les critiques à leur égard, et en menaçant leur sécurité depuis le Yémen mais aussi au Liban. Ce faisant, la milice chiite liée à l’Iran a fait fuir les investissements et les touristes du Golfe et a provoqué l’expulsion de centaines voire de milliers de travailleurs libanais du Golfe, privant leurs familles et leur pays de revenus indispensables à surmonter la crise. Cette politique avait déjà été employée par le Hezbollah dans les années 1980 à travers les attentats contre les Occidentaux et les prises d’otages, les poussant à déguerpir le Pays du Cèdre au profit de la Syrie.

Aujourd’hui, le Hezbollah reproduit le même scénario au profit de l’Iran et exploite la publication des caricatures de Mahomet pour mobiliser contre la France. Hassan Nasrallah avait déjà mis en échec la feuille de route présentée par Emmanuel Macron pour sauver le pays du Cèdre et débloquer les aides internationales, indispensables à son redressement, en bloquant la formation d’un gouvernement d’experts indépendants. Le Hezbollah qui a entièrement soumis le président Michel Aoun, son gendre Gebran Bassil et le Courant Patriotique Libre, et qui contrôle la présidence du Parlement à travers son allié chiite Nabih Berri, a favorisé le retour d’un Saad Hariri affaibli au gouvernement. Le Premier ministre désigné semble ainsi avoir les mains et les pieds liés au bon vouloir du Parti de Dieu. Pour achever sa mainmise sur le Liban, ce dernier orchestre la formation du gouvernement dans lequel il continuera à occuper les ministères des Finances et de la Santé, et cherche à attribuer à ses alliés tous les postes stratégiques et à exclure les souverainistes. Selon plusieurs sources, le Hezbollah et ses alliés obtiendraient non seulement le tiers de blocage, mais surtout les ministères de la Défense, de l’Intérieur et de la Justice, pour verrouiller le système répressif et achever le Hirak.

Selon une source libanaise, le Hezbollah croit en effet avoir réussi à étouffer la révolte du 17 octobre 2019 (le Hirak) et à résorber l’élan de solidarité international (financière et politique), et plus particulièrement la feuille de route française. Il passe désormais à la contre-attaque. Sur le plan intérieur, le verrouillage du gouvernement vise à empêcher toute reprise du Hirak. Sur le plan international, sa cible est désormais la France. C’est l’objectif de la manifestation anti-française organisée le 30 octobre à Beyrouth, et de l’allocution télévisée de Hassan Nasrallah, le même jour. Selon le quotidien libanais « Nidaa Al-Watan », les rapports parvenus à Paris démontrent que « les centaines de manifestants venus de Tripoli (dans le nord) à bord de bus, brandissant des drapeaux noirs de Hezb Al-Tahrir (un groupuscule radical sunnite soutenu en sous-main par le Hezbollah), ont été mobilisés et financés par le Parti de Dieu ». Selon nos sources, sa manœuvre sournoise vise plusieurs objectifs: défier la France en mobilisant des Sunnites contre ses intérêts; diviser la communauté sunnite et fragiliser le Premier ministre – quel qu’il soit – et amplifier la menace radicale à Tripoli, jadis qualifiée de Qandahar par le Hezbollah et sa propagande.

Enfin, pour parachever son plan anti-français, Hassan Nasrallah s’en est violemment pris à la France en particulier et à l’Occident en général, dans une allocution télévisée à l’occasion du Mawlid (anniversaire de naissance du Prophète), dans la soirée du 30 octobre. Pour la forme, il a condamné les attentats de Conflans-Sainte-Honorine et de Nice, mais dans le fond, il les a justifiés en attribuant leur responsabilité à la politique occidentale dans le monde! Nasrallah a exigé que « soit mises des limites à la liberté d’expression, pour interdire à quiconque de porter atteinte à autrui et de blasphémer… ». Dans son offensive, Nasrallah refuse que les comportements criminels des individus puissent engager leur religion, mais oublie de préciser que ces comportements criminels sont suggérés par les textes religieux. Il oublie par exemple comment sa télévision « Al-Manar » diffusait les « Dou’aa » (prières) contre les impies, les mécréants et les juifs, priant Dieu d’assécher le sperme des pères et de stériliser le ventre des mères… Voici en vidéo un enregistrement de Dou’aa d’Al-Manar:

Dans sa stratégie, le Hezbollah ne semble pas chercher à affronter la France de façon direct – il pourrait le faire à travers les militaires français déployés dans le cadre de la FINUL au Sud Liban – mais il chercherait davantage à intimider Paris et le pousser à abandonner son soutien au Liban pour qu’il puisse l’annexer à huis clos, sans témoins et sans oppositions. Mais il a oublié que dans l’histoire, les envahisseurs du Liban ont réussi ponctuellement à l’avaler mais jamais à le digérer. Ce qui était valable pour les conquérants d’antan (arabes, perses, fatimides, croisés, ottomans) le sera pour les contemporains. Nasrallah doit se souvenir que plus récemment, Yasser Arafat, Hafez Al-Assad et Ariel Sharon avaient aussi tenté leur chance, en vain.

Magdi W.