Libye : échange d’accusations entre la Russie et les États-Unis

0
265

La bataille fait rage aux abords de Tripoli. L’artillerie lourde du gouvernement de l’Accord national attaque les forces de Haftar à l’intérieur de l’aéroport de la capitale. Après près d’un an de siège, les forces d’Al Sarraj, grâce à l’aide décisive de la Turquie, ont forcé l’armée de Haftar à perdre des positions, abandonnant les quartiers de la banlieue sud de Tripoli. En se retirant, les hommes de Haftar jonchent les bâtiments de pièges explosifs. Hier, lors d’un appel téléphonique avec le Premier ministre Conte, Al Sarraj a demandé l’aide de l’Italie pour nettoyer les zones minées, ainsi que pour renouveler les protestations contre la mission navale européenne Irène, en cours, au large de la Libye pour garantir le respect de l’embargo sur la armes. Selon Tripoli, Irène favorise Haftar, qui continue de recevoir des renforts par voie aérienne ou à travers la frontière avec l’Égypte, tandis que le blocus naval ne fait qu’entraver l’arrivée de l’aide militaire turque par voie maritime. Mais Conte a assuré que la mission, voulue par Bruxelles, se déroule selon des principes de neutralité absolue. La question libyenne, ces derniers jours, est revenue au centre de l’attention diplomatique. Le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, est en contact permanent avec Al Sarraj et, après des mois de silence, il rend à nouveau explicite le soutien de Washington à la cause du gouvernement d’accord national, reconnu par l’ONU. Les États-Unis pointent l’indice contre le soutien de Moscou à Haftar. Ils accusent la société d’État russe Goznak d’imprimer des dinars libyens « contrefaits » pour le général de Cyrénaïque, indiquant comme « preuve » la saisie, qui a eu lieu ces derniers jours à Malte, d’un chargement de billets de 1,1 milliard de dinars destinés à la banque centrale Benghazi. « La seule banque centrale légitime en Libye est celle de Tripoli, dit le Département d’Etat, la Russie imprime des dinars contrefaits exacerbant les problèmes économiques du pays ». Moscou répond par une note de son ministère des Affaires étrangères: «La Libye a deux banques centrales parce que le pays est entre les mains de deux gouvernements différents. Les billets destinés à Benghazi sont liés à un contrat d’approvisionnement régulier. Les dinars ne sont donc pas contrefaits ». Cette controverse fait suite depuis quelques jours à celle qu’a soulevée l’ambassade américaine à Tripoli pour l’arrivée de 12 chasseurs-bombardiers Mig russes à la base aérienne d’Al Jufra, en soutien à l’ANL. « Des actions déstabilisantes » disent les Etats-Unis, qui réfléchiraient à l’opportunité de déployer leur propre brigade en Tunisie. Contacts intenses, dans les dernières heures, également entre Tripoli et le Qatar, l’autre allié d’Al Sarraj. Aujourd’hui, le président français Macron a discuté de la situation en Libye lors d’un appel téléphonique avec le président égyptien Al Sissi, qui a toujours été du côté de Haftar. L’Égypte, en particulier, dénonce l’entrée de la Turquie dans le conflit depuis des mois, la considérant comme une nouvelle tentative «d’invasion ottomane» de l’Afrique du Nord. L’évolution de la crise libyenne a fait l’objet de discussions téléphoniques, en ces heures entre l’Égypte, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite. Sur le terrain, il y a des repositionnements massifs de troupes et de miliciens, comme si les deux prétendants, et leurs alliés respectifs, se préparaient à des opérations qui pourraient conduire à un tournant imminent et définitif du conflit. Entre temps, la production pétrolière libyenne reste paralysée, avec puits et oléoducs en main, depuis fin janvier, des tribus fidèles à Haftar. Tandis que l’activité des trafiquants d’êtres humains, le long des côtes contrôlées et surveillées par Tripoli, se poursuit sans être dérangée. Al Sarraj aurait demandé à l’Italie un « soutien » supplémentaire pour permettre à ses garde-côtes de lutter plus efficacement contre le phénomène. (Rai News)