(Rome, 08 décembre 2024). Selon une source du Kremlin, la Fédération de Russie estime nécessaire de reprendre les négociations pour une solution en Syrie sous la supervision des Nations Unies
Damas est tombée, la Syrie est sous le contrôle des rebelles et, toute la journée, une grande question plane sur le sort de Bachar Al-Assad. Jusqu’à ce qu’un communiqué de l’agence Tass, ait révélé que le président syrien Bachar Al-Assad et des membres de sa famille sont arrivés à Moscou. Après des jours de rumeurs, de démentis et de spéculations, le Kremlin a annoncé que le président syrien déchu s’était enfui à Moscou avec sa famille. Et la Russie, alliée historique du raïs ruiné, leur a accordé l’asile «pour des raisons humanitaires», mettant fin au mystère qui a fait, pendant des jours, courir les hypothèses les plus disparates sur le sort du raïs déchu, du refuge à Téhéran, aux Emirats ou en Afrique, à ceux qui l’avaient même donné pour mort, son avion ayant été abattu avant de quitter le pays, comme le rapporte «Il Fatto Quotidiano».
Moscou a ensuite fait savoir qu’il avait demandé une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU pour lundi. «En lien avec les derniers événements en Syrie, dont l’ampleur et les conséquences pour ce pays et l’ensemble de la région n’ont pas encore été mesurées, la Russie a appelé à des consultations urgentes à huis clos du Conseil de sécurité de l’ONU», a déclaré sur Telegram le représentant adjoint de la Russie aux Nations Unies, Dmitri Poliansky.
La fuite à Moscou était l’hypothèse la plus accréditée pour expliquer la disparition de l’ancien boucher syrien. La Russie a toujours été un fervent soutien d’Assad, pour qui elle est intervenue militairement en 2015 pour lui donner un coup de pouce dans la guerre civile : une intervention cruciale, à l’époque, pour le salut du régime alaouite et des bases stratégiques russes dans le pays. Il y a à peine une semaine, alors que l’offensive éclair des rebelles prenait forme, le raïs s’était rendu dans la capitale russe pour s’entretenir avec Vladimir Poutine. Et les liens avec la Russie s’étendent également aux membres de la famille du tyran syrien déchu : Hafez al-Assad, le fils aîné, étudie dans la capitale russe depuis 2016 et vendredi dernier (précisément à l’époque où son père était en visite à Moscou), il a obtenu un doctorat en Sciences physiques et mathématiques, en présence entre autres de sa mère Asma, qui soigne actuellement une leucémie. Selon le «Wall Street Journal» citant des responsables arabes et syriens, l’épouse et les enfants d’Assad sont restés en Russie depuis fin novembre, tandis que ses beaux-frères sont partis pour les Émirats arabes unis.
Après la chute de Damas et l’annonce par les rebelles de la fuite du raïs, c’est Moscou qui a confirmé qu’Assad avait quitté la Syrie ainsi que ses fonctions de chef de l’Etat, dans un communiqué selon lequel (confirmant certaines rumeurs rapportées samedi soir par Bloomberg) le raïs désormais évincé avait négocié sa sortie de scène avec «certains participants au conflit». Selon une source régionale, Moscou se trouverait déjà en contact avec les rebelles syriens, ces derniers ayant garanti «la sécurité des bases militaires et des institutions diplomatiques russes sur les territoires de la Syrie». Une source bien au fait, indique que Moscou souhaite à présent «la poursuite du dialogue politique dans l’intérêt du peuple syrien et le développement des relations bilatérales entre la Russie et la Syrie».
On ignore quand Assad s’est enfui : selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), qui dispose de nombreuses sources sur le terrain, l’ancien raïs est parti à bord d’un vol privé qui a décollé de l’aéroport de Damas à 22 heures, heure locale, dans la nuit de samedi à dimanche. Selon deux officiers supérieurs de l’armée syrienne cités par Reuters en ligne, Assad est monté à bord d’un avion tôt dimanche matin à Damas.
Confirmant cette thèse, un vol de la compagnie aérienne syrienne a décollé de l’aéroport de la capitale au moment où la ville était prise par les rebelles, selon les données du site «Flightradar». L’avion s’est d’abord dirigé vers la région côtière syrienne, un bastion historique alaouite, avant de faire brusquement demi-tour et de disparaitre de la carte au bout de quelques minutes. Une disparition vraisemblablement due à la désactivation du transpondeur afin de ne pas être repéré. Mais qui a, dans un premier temps, donné lieu à des spéculations (de sources syriennes citées par Reuters) selon lesquelles l’avion avait peut-être été abattu. Quel que soit le vol utilisé, après avoir quitté Damas, Assad a probablement atteint la base russe de Hmeimim, dans le gouvernorat de Lattaquié, avant de décoller pour Moscou. Avant la confirmation du Kremlin, une deuxième hypothèse qui circulait depuis des jours voulait que le dirigeant syrien déchu se trouverait à Téhéran, un autre allié historique du régime qui a pourtant fait preuve plus de pragmatisme que de soutien dans les dernières heures du raïs. Une troisième destination, émise par le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahman, serait les Émirats arabes unis, premier pays du Golfe à rétablir les liens rompus avec Damas en 2018. Tandis que la Coalition nationale de l’opposition syrienne avait même émis l’hypothèse d’un débarquement dans un quelconque pays Africain, affirmant que le raïs avait trouvé de nombreuses portes closes parmi ses alliés, dont Moscou.