Ukraine : ce que pourrait changer dans la guerre et comment les Russes vont réagir à l’arrivée des F-16

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(Rome, Paris, 01 août 2024). L’armée de l’air de Kiev a reçu ses premiers avions de chasse F-16. Après une longue attente, une partie d’un escadron de chasseurs multirôles de fabrication américaine a atteint le territoire ukrainien et participera bientôt (si ce n’est pas déjà fait) à des opérations de guerre. Le premier lot d’avions de combat produits par Lockheed Martin, attendu depuis longtemps et enfin «atterri» en Ukraine, est prêt à être déployé. C’est ce qu’a annoncé hier soir l’agence de presse Reuters, qui citait comme source un responsable américain qui, s’exprimant sous couvert d’anonymat, «a affirmé que la livraison était terminée». Parallèlement, les premières photos d’un chasseur multirôle F-16 «Fighting Falcon» dans la livrée classique gris clair avec la petite cocarde bleue à bordure jaune et le blason avec le trident dans le bouclier bleu (anciens armoires des princes Rjurikidi, aujourd’hui armoiries nationales) ont commencé à circuler sur les chaînes Telegram, écrit Davide Bartoccini dans «Inside Over».

Reconstruire une petite force aérienne

Selon les États-Unis, il s’agit d’un effort qui aidera Kiev à reconstruire les rangs de l’armée de l’air ukrainienne réduite et affaiblie. Une force qui a continué à résister et à opérer au cours des deux dernières années malgré la grande infériorité numérique. L’avion de combat de 4ème génération, équipé d’un canon de 20 mm et pouvant accueillir une large gamme de bombes et de missiles, ne changera pas la donne, mais contribuera sans aucun doute à la défense du ciel où les forces aérospatiales russes n’ont jamais réussi à obtenir la suprématie aérienne et, surtout, «les capacités de frappe ukrainiennes vont augmenter». Pour les responsables ukrainiens, les F-16 représentent une «mise à niveau vitale» pour l’armée de l’air de Kiev, mais selon certaines rumeurs émanant des cercles de l’OTAN, les avions actuellement déployés en Ukraine «ne seraient pas plus de 6». Un demi-escadron donc.

Malgré ce nombre limité d’appareils livrés pour l’heure, cela reste un évènement important dans le conflit russo-ukrainien. Grâce à eux, Kiev espère, à terme, pouvoir repousser les forces russes qui grignotent petit à petit du terrain dans l’est du pays, estime une source occidentale.

Selon Reuters, le Danemark s’était engagé à faire don de 19 avions de ce type, tandis que les Pays-Bas en promettaient 24, pour un total de 43 unités. «Les deux pays ont été les forces motrices d’une coalition internationale visant à fournir à l’Ukraine des F-16». La Norvège a également annoncé qu’elle ferait don de six avions de combat F-16 à l’Ukraine. Selon la presse occidentale, 80 appareils ont été promis à l’Ukraine par la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas et la Norvège, mais la plupart d’entre eux ne seront pas livrés dans l’immédiat.

Un manque de pilotes

Il ne faut pas oublier que le déploiement de cette nouvelle arme du ciel va de pair avec la formation des pilotes ukrainiens, qui ont rencontré une certaine difficulté à faire la transition avec (l’ex) actionnaire «soviétique» à laquelle ils étaient habitués. Toute la flotte ukrainienne de chasseurs et de chasseurs-bombardiers était en effet basée sur des MiG et des Sukhoï. Le processus de qualification a été très long et se poursuivra jusqu’à ce qu’il y ait suffisamment de pilotes prêts à décoller sur les chasseurs de l’OTAN.

Pour rappel, de nombreux retards ont compliqué l’arrivée de ces avions sur le sol ukrainien, comme la question des pièces de rechange et la barrière de la langue entre les instructeurs de l’OTAN et les pilotes de l’armée de l’air ukrainienne. Ces derniers se sont entraînés pendant de longs mois aux États-Unis et dans plusieurs pays européens.

Les analystes et responsables occidentaux affirment que «les F-16 ne représentent pas un tournant dans la guerre» et que la Russie a eu «tout le temps» pour préparer ses défenses afin d’essayer «d’anéantir l’impact des F-16 ukrainiens». «Nous devrions séparer le symbolisme de l’impact réel sur le champ de bataille, qui sera utile mais modeste, surtout au début», avait déclaré à la mi-juillet Mark Cancian, conseiller principal du programme de sécurité internationale au Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS).

Les Ukrainiens soutiennent que pour apporter une contribution significative au conflit, il est nécessaire de déployer entre 60 et 120 chasseurs F-16, avec des pilotes et du personnel au sol parfaitement formés.

Une cible privilégiée

Cette première livraison de F-16 peut aider l’Ukraine à renforcer son bouclier aérien et rendra ce nouvel atout important pour mener des frappes aériennes via des missiles de précision à longue portée. D’ici la fin 2024, l’Ukraine espère disposer d’au moins 20 pilotes prêts à voler et à combattre à bord des F-16. Un nombre insuffisant si l’on se réfère aux perspectives énoncées précédemment. Mais ce n’est pas le seul problème. L’armée de l’air russe pourrait concentrer ses attaques, avec des missiles de précision, sur les infrastructures qui accueilleront les avions F-16 afin de tenter d’éliminer le problème, les nouveaux chasseurs étant une cible à privilégier d’un point de vue stratégique mais aussi de propagande.

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L’Ukraine pourrait alors être contrainte d’installer des défenses antimissiles pour les protéger, ce qui faciliterait l’identification de bases désignées, tout en privant d’autres secteurs des systèmes de défense aérienne plus essentiels, tels que les Patriot. Contraint de les affecter à des bases éloignées des secteurs les plus chauds et à portée des armes russes, ou bien recourir à la vieille tactique utilisées au début du conflit pour protéger ses meilleurs avions de combat des raids russes : les cacher dans des bases de fortune et les faire décoller depuis des pistes de fortune.