OMS : l’Afrique redoute le pire

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Le premier cas du Coronavirus est reconnu en Egypte le 14 février. Le 11 mars 2020, le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, définit la propagation de Covid-19 non plus comme une épidémie confinée à certaines zones géographiques, mais une pandémie répartis sur toute la planète. L’OMS s’est déjà inquiétée à plusieurs reprises ces derniers jours d’une poussée du coronavirus sur le continent africain, dont les systèmes de santé manquent cruellement de moyens.

  • Au Nigéria : Scènes surréalistes à Lagos, dimanche 22 mars, un prêtre prend la température à l’entrée d’une église, où les bancs sont quasiment vides dans un pays où les rassemblements religieux attirent des dizaines de milliers de personnes. Mais le Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, a interdit les rassemblements de plus de 50 personnes. Avec 27 cas de coronavirus recensés, les autorités tentent de convaincre les habitants de rester chez eux. Un message difficile à faire passer. « Rien ne m’empêchera jamais de venir à l’église », assure une Nigériane.
  • Systèmes de santé très fragile : Au Kenya, dimanche matin, la police a dispersé commerçants et acheteurs d’un marché avec du gaz lacrymogène. En Côte d’Ivoire, le préfet d’Abidjan est allé en personne demander aux cafés de fermer et aux clients de rentrer chez eux. L’Afrique subsaharienne compte plus d’un millier de personnes infectées au Covid-19 dans 41 pays. L’OMS s’inquiète d’une poussée de l’épidémie sur ce continent dont les systèmes de santé manquent cruellement de moyens.
  • Manque de lits… et d’eau : En Chine et en Europe, 15 à 20 % des malades nécessitent une hospitalisation. « Cela s’annonce compliqué, voire impossible dans de nombreuses régions d’Afrique », s’inquiète l’ONG Alima. En moyenne, l’Afrique de l’Ouest compte vingt fois moins de lits d’hospitalisation qu’en France. Au Burkina Faso, plus de 130 centres de santé, cibles d’attaques de groupes djihadistes, ont fermé ces derniers mois, privant de soins rapides 1,5 million d’habitants, selon le gouvernement.
  • Que font les autorités ? Comme en Europe, chaque pays tente de parer à l’urgence, de manière décousue. La plupart des pays d’Afrique subsaharienne, Nigeria en tête, ont déjà interdit les rassemblements, fermé les écoles, les bars-restaurants et limité le trafic aérien. Le Burkina Faso a instauré ce week-end un couvre-feu ; la Tunisie a imposé un confinement général, comme le Rwanda. Et le verrouillage des frontières gagne du terrain. Progrès notables, aussi, côté dépistage. Seuls deux laboratoires étaient en capacité de mener les tests le mois dernier, au Sénégal et en Afrique du Sud. Il y en a désormais une quarantaine, a annoncé vendredi Matshidiso Moeti, la directrice de l’OMS pour l’Afrique. Avec un bémol : les kits de dépistage vont vite manquer.
  • Le confinement, un leurre ? Difficile de convaincre la population de se calfeutrer quand les systèmes de couverture sociale sont faibles, voire inexistants. Et quand l’essentiel des revenus provient de l’économie informelle, faite d’emplois non déclarés et évidemment peu propices au télétravail. Difficile aussi de contrôler le respect du confinement, dans des villes tentaculaires. Au Nigeria, Lagos, a fermé ses bars, restaurants et boîtes de nuit à ses 20 millions d’habitants, vendredi. Mais beaucoup d’établissements continuaient d’accueillir des clients, hier…
  • Finies les prières collectives ? Priez de chez vous, c’est l’appel lancé par les autorités religieuses dans plusieurs pays, hier. Le Nigeria (200 millions d’habitants) a bien fermé ses lieux publics et ses deux aéroports internationaux, samedi. Mais les rassemblements religieux, qui peuvent attirer des milliers de personnes dans les mosquées et églises, perdurent. Idem au Maroc, où des fidèles sont descendus prier dans les rues, vendredi. Ou encore au Sénégal : dans ce pays à 95 % musulman, les mosquées ont été fermées jeudi, mais des prières collectives se sont tenues en plein air, dès le lendemain.
  • La faiblesse des services de santé au centre des inquiétudes : En Afrique de l’Ouest aussi, deux chefs d’Etat, le sénégalais Macky Sall et l’Ivoirien Alassane Ouattara ont annoncé lundi soir des mesures similaires : instauration de l’état d’urgence et couvre-feu nocturne. Le coronavirus « gagne du terrain » dans plusieurs régions sénégalaises (79 cas officiellement recensés), selon Macky Sall. En Côte d’Ivoire (25 cas, aucun décès selon le dernier bilan publié dimanche), un confinement progressif se met en place, « par aires géographiques ». Les déplacements entre Abidjan, la capitale économique où se concentrent la majorité des cas, et l’intérieur du pays, seront soumis à autorisation. « Dans cette lutte contre la propagation du Covid-19, notre principal ennemi sera l’indiscipline et le non-respect des consignes de prévention », a souligné le président Ouattara, appelant à « l’union sacrée ». L’Afrique a pourtant été jusqu’à présent relativement épargnée par la pandémie par rapport au reste du monde : au moins 1.628 cas, dont une cinquantaine de morts, ont été déclarés sur le continent, contre plus de 360.000 cas d’infection et 16.000 décès au total sur la planète, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles. Mais la très grande faiblesse des services de santé dans les pays africains laisse craindre que la pandémie puisse être dévastatrice. (Médias)