C’est ainsi que le «bouclier norvégien» verrouille Odessa

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(Paris, Rome, 13 juin 2022). Ces dernières heures, de nombreuses vidéos émergent de Marioupol dans lesquelles les Russes semblent engagés à enlever un authentique « tapis » de mines le long de la côte. Chaque bande de plage avait été fortifiée par les Ukrainiens avant l’arrivée des troupes de Moscou, ce qui empêcha probablement les opérations amphibies même dans une zone, comme celle de la mer d’Azov, où les Russes montrèrent une certaine supériorité. Ce qui a été observé à Marioupol peut donner une idée de ce qui se passe également à Odessa. Principal port du pays, ville importante sur le plan économique et plus encore sur le plan politique, sa défense pour les Ukrainiens est essentielle pour ne pas perdre l’accès à la mer Noire. Les plages d’Odessa, comme Marioupol, ont été fortifiées. Pas un seul point le long de la côte où des munitions ou des pièges n’ont été placés. Mais la ville n’est toujours pas à l’abri d’éventuels débarquements. Et donc les Ukrainiens comptent maintenant sur les harpons. Il s’agit de systèmes de missiles anti-navires fournis par les pays de l’OTAN et fabriqué en Norvège. Remis à Kiev depuis le Royaume-Uni, leur utilisation permet de surélever encore un bouclier dont l’objectif est de protéger Odessa des assauts par la mer, comme le rapporte Mauro Indelicato dans le média italien «Inside Over».

Le bouclier norvégien pour Odessa

En plus des mines le long de la côte, la ville ukrainienne dans les premiers mois de la guerre a essayé de se défendre en utilisant les Neptune. Ces derniers sont des missiles de fabrication locale d’une portée de 280 km. Peu de spécimens étaient disponibles, alors qu’avant le conflit tout le monde ne pariait pas sur leur efficacité. Pourtant, ce seraient deux Neptune qui auraient coulé le vaisseau amiral Moskva au large de l’île aux Serpents en avril dernier. Un coup très dur pour le Kremlin et qui a encore diminué les chances de débarquer à Odessa. En tout cas, pour défendre la côte de la mer Noire, l’Ukraine a demandé encore plus d’armes et plus de systèmes capables non seulement de frapper les navires russes mais aussi de créer un certain effet de dissuasion.

Les Harpons, selon de nombreux analystes militaires, répondent à ce besoin. Leur portée est de 140 km, mais ils sont beaucoup plus précis et ils comptent parmi les missiles anti-navires les plus sophistiqués dont dispose l’OTAN. Tirer un harpon sur une cible russe, c’est lancer, comme le soulignent Guido Olimpio et Andrea Marinelli dans le «Corriere della Sera», une «flèche» très puissante. Pour Moscou, il s’agit d’un écueil supplémentaire. Avec le vaisseau amiral coulé et divers autres navires touchés, les forces navales russes sont déjà affaiblies et ne sont pas prêtes à faire face à un éventuel assaut contre les côtes ukrainiennes. Maintenant que Kiev dispose également de harpons, les différents navires du Kremlin sur la mer Noire sont contraints de garder une distance de sécurité. Notamment parce que la couverture anti-missiles fournie par le navire Moskva fait défaut et que les travaux visant à renforcer les défenses anti-aériennes sur l’île des Serpents sont toujours en cours. Odessa apparaît donc plus protégée : le bouclier des Harpons arrivés de Norvège pourrait repousser la flotte russe et rendre les côtes (quasiment) sûres.

Les ambitions de Moscou pour Odessa

Mais la ville est-elle toujours dans le viseur des Russes ? S’interroge Mauro Indelicato. La question est l’une des plus débattues, tant en Ukraine que parmi les alliés de l’OTAN. Pour l’heure, les efforts de Moscou se concentrent tous sur le Donbass. Des durs combats s’y déroulent, en particulier à Severodonetsk alors qu’il n’est pas un mystère que les forces russes ciblent également des villes comme Slovjansk et Kramatorsk (les forces ukrainiennes ont reconnu ce lundi avoir abandonné le centre de Severodonetsk), à la suite d’une nouvelle offensive russe sur cette ville clef de l’est de l’Ukraine, que les deux belligérants se disputent depuis des semaines. Des opérations qui pourraient encore prendre des semaines, comme dans le cas de Severodonetsk, voire des mois. Cependant, Odessa n’est pas une priorité pour les forces du Kremlin pour le moment. Toutefois, il n’est pas certain que cela ne soit le cas à l’avenir.

La ville est stratégique pour diverses raisons. Plus de 90 % des exportations de céréales ukrainiennes et la grande majorité des autres exportations ukrainiennes dépendent de son port. Contrôler Odessa signifierait pour la Russie de laisser l’Ukraine enclavée et d’avoir en main les clés de son économie. Se trouve ensuite un autre objectif, peut-être plus politique. Il s’agit de créer un long corridor russophone qui s’étend de la Transnistrie, la région autonome moldave bordant l’oblast d’Odessa, vers la Crimée et le Donbass, jusqu’à Lougansk.

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En bref, le spectre d’un raid russe est toujours latent. D’où la nécessité pour les Ukrainiens de renforcer le bouclier autour d’Odessa. Par mer, la ville apparaît blindée, tandis que par voie terrestre le front s’est arrêté depuis trois mois à 40 km de Mykolaïv, le dernier grand centre ukrainien avant le principal port sur la mer Noire.