(Rome, Paris, 01 février 2022). Les spécialistes russes de la guerre hybride, les sous-traitants du groupe Wagner, se déplacent de l’Afrique vers la frontière ukrainienne. Un signal qu’une campagne de déstabilisation est déjà en cours
Selon le site américain Daily Beast, un transfert de contractants militaires du groupe Wagner d’Afrique vers les zones russes proches de la frontière ukrainienne, où sont déjà amassés plus de 100.000 soldats russes équipés de matériel de combat, est en cours. Cette information a peu de chances d’être officiellement confirmée, car ces mouvements désormais bien connus sont généralement couverts par des écrans de fumée de désinformation et par le fait qu’il s’agit des activités d’une entreprise privée. Ce dernier aspect est utilisé par Moscou comme un alibi, une méthode visant à créer une séparation et un déni plausible – alors qu’en fait, de liens entre le Kremlin et Wagner, entre Vladimir Poutine et le «deus ex machina» de l’entreprise, Yevgeny Prigojine, ont été reconstruits à plusieurs reprises, comme le rapporte Emanuele Rossi dans le quotidien «Formiche».
Si toutefois cette démarche de Wagner est confirmée (peut-être par le biais de photos volées et publiées sur les réseaux sociaux) il s’agira alors d’un développement significatif. S’il semble plus difficile pour la Russie, bien qu’on ne puisse l’exclure, d’agir avec une invasion à grande échelle contre l’Ukraine, une campagne hybride contre Kiev est déjà en cours avec pour objectif la déstabilisation interne afin de créer un tissu social plus favorable à la Russie et rendre l’Ukraine plus vulnérable et donc contrôlable. Dans ces activités qui mêlent information et guerre psychologique aux actions militaires clandestines, sabotage, piratage et autres actions d’ingérence, Moscou est constamment engagé, et Wagner est l’un de ses instruments spécialisés.
Des officiers qui travaillent au commandement militaire central de Bangui, la capitale de la République centrafricaine où Wagner est présent pour assurer la sécurité du gouvernement (comme c’est le cas dans d’autres pays comme le Mali, également vecteur d’influence de Moscou), expliquent qu’ils sont ont été avertis que certains entrepreneurs russes ont quitté le pays, mais ne l’ont jamais fait en si grand nombre. Quelques dizaines sont partis en janvier et d’autres partiront ce mois-ci. Ce n’est pas la première fois que Wagner déplace ses hommes, bon nombre parmi eux sont d’anciennes membres des forces spéciales issus des corps de renseignement militaires ou paramilitaires, d’Afrique ou d’autres zones de combat, conformément à l’évolution des objectifs de la politique étrangère de Poutine – bien que le Kremlin nie tout lien. Plus de 200 Russes ont été envoyés en Biélorussie pour déstabiliser le pays avant les élections présidentielles d’août 2020 depuis d’autres points chauds où le groupe Wagner était déjà déployé, notamment la République centrafricaine. Les hommes de Wagner étaient déjà protagonistes de l’opération complexe qui a conduit à l’annexion de la Crimée en 2014.