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Turquie: Osman Kavala, le philanthrope détesté d’Erdogan

(Rome, Paris, 24 octobre 2021). Il est rapidement devenu un acteur incontournable en Turquie pour la défense des droits de l’Homme. En 2002, il a fondé «Anadolu Kultur» (Culture anatolienne), soutenu par une équipe d’universitaires, d’artistes, d’entrepreneurs et de représentants de la société civile

Selon l’analyse de Giuseppe Didonna de l’agence italienne «AGI», Osman Kavala (1957), le philanthrope tant détesté par le président turc Recep Tayyip Erdogan, a commencé il y a 40 ans, alors tout juste diplômé, à partager son temps entre la gestion des affaires du groupe Kavala appartenant à sa famille, sans jamais perdre de vue sa passion pour l’engagement civique et la promotion des droits de l’Homme dans un pays ayant survécu au violent coup d’État militaire de 1980.
Le premier pas de Kavala fut une réponse au climat de peur que l’armée avait instauré en Turquie : il a contribué à la fondation de la maison d’édition Iletisim en 1983, avec comme objectif affiché, de mener un processus de démocratisation dans un pays dévasté.
Suite au terrible tremblement de terre qui a ravagé Kocaeli en 1999, et qui a également détruit Istanbul, Osman Kavala abandonne le conseil d’administration de l’entreprise familiale pour se consacrer à plein temps à la société civile, promouvant et finançant des milliers d’initiatives et de projets de diffusion de l’art et des droits humains, souvent fondée sur le dialogue entre les cultures.
Culture anatolienne
Kavala est rapidement devenu un acteur clé en Turquie et, en 2002, il a fondé Anadolu Kultur (Culture anatolienne), flanqué d’une équipe d’universitaires, d’artistes, d’entrepreneurs et de représentants de la société civile.
L’objectif déclaré est de favoriser la production, la diffusion et le partage de l’art et de la culture turcs, de soutenir les initiatives locales, de renforcer les collaborations et les contacts au niveau international afin de favoriser la rencontre entre différents courants et cultures. Comme il l’écrit dans son manifeste «créer une société avec la culture de la paix».
Ces initiatives comprennent la création des centres artistiques de Diyarbakır, la plus grande ville kurde de Turquie et à Kars, un lieu qui a toujours été un carrefour des cultures turque et arménienne, qui sont devenues au fil des ans des points de référence et de diffusion pour les cultures de régions très éloignées des métropoles d’Istanbul et d’Ankara.
En 2010, ajoute Giuseppe Didonna, lors des négociations de l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne, «Anadolu Kultur» a concentré son engagement sur la création de relations, de jumelages et d’échanges entre les villes européennes et turques afin de créer des ponts culturels et de donner un nouvel élan à un processus qui, à cette époque, semblait avoir des chances d’aboutir.
Initiatives humanitaires
La philanthropie de Kavala n’a pas trouvé sa forme d’expression uniquement dans la sphère artistique, mais aussi dans la sphère humanitaire, à travers le financement de projets d’accès et de droit à l’éducation des groupes sociaux les plus faibles et les plus marginalisés ou isolés dans les lointaines provinces anatoliennes. Ces projets incluent le soutien aux personnes déplacées lors du terrible tremblement de terre qui a frappé la ville de Van en 2011 et des programmes de soutien aux réfugiés yézidis et syriens, victimes de l’EI et de la guerre en Syrie. Son emprisonnement a laissé un siège vacant dans d’innombrables conseils d’administration de fondations, d’organisations non gouvernementales et de tables organisées par la société civile. Ces dernières ont été privées, ainsi que l’ensemble de la Turquie, d’un personnage qui pendant 37 ans, jusqu’à son incarcération, a travaillé sans relâche pour promouvoir le dialogue entre les cultures et amener les gens à regarder au-delà des divers conflits qui ont toujours agité la politique et la société turques.

 

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