Le Parlement libyen a reporté à mercredi la séance consacrée au vote de confiance au nouveau gouvernement, né d’un processus parrainé par l’ONU et qui doit contribuer à sortir la Libye du chaos en la menant jusqu’à des élections fin décembre 2021. Réunis mardi pour la deuxième journée de suite dans la ville de Syrte, à mi-chemin entre les régions rivales de l’Est et de l’Ouest, les députés ont longuement débattu de la composition du gouvernement, de la répartition géographique des postes et de sa feuille de route. Après quatre heures de débats, le président du Parlement Aguila Saleh a levé la séance. Elle doit reprendre mercredi « pour finaliser les délibérations avant de voter la confiance », a déclaré à l’AFP le député Ismail al-Charif. Mardi, les travaux avaient commencé par un discours du Premier ministre désigné Abdel Hamid Dbeibah, exhortant les députés à accorder la confiance à son gouvernement afin d’unifier le pays plongé dans le chaos depuis la chute de Mouammar Khadafi en 2011. « Mon premier objectif a été de choisir des personnes avec lesquelles je serai en mesure de travailler, peu importe d’où elles viennent ». Elles « doivent être capables de travailler pour tous les Libyens », a-t-il lancé. Fustigeant une « campagne féroce » visant à détruire la Libye, M. Dbeibah a d’autre part appelé au départ des 20.000 mercenaires et combattants étrangers présents sur le sol libyen. « Notre souveraineté est bafouée à cause de leur présence », a-t-il martelé. Milliardaire de 61 ans originaire de Misrata (Ouest), Abdelhamid Dbeibah, a été désigné Premier ministre le 5 février par 75 responsables libyens de tous bords réunis à Genève sous l’égide de l’ONU, en même temps qu’un Conseil présidentiel de trois membres. L’équipe proposée par M. Dbeibah est composée de deux vice-Premiers ministres, 26 ministres et six ministres d’Etat. Deux ministères régaliens, les Affaires étrangères et la Justice, ont été attribués à des femmes, une première en Libye. Le poste hautement stratégique de la Défense est en revanche resté vacant: « toutes les parties se disputent ce portefeuille », a concédé Dbeibah ce mardi.
Selon l’agence italienne Nova, après des discussions frénétiques et des négociations sur la composition de l’exécutif chargé de conduire le pays aux élections prévues le 24 décembre, les travaux ont d’abord été suspendus et finalement reportés à demain, 10 mars. Selon les sources de «Nova», le chef du gouvernement a accepté de remplacer le vice-Premier ministre Saqr Boujwari, ancien maire de Benghazi, par l’ancien membre du Conseil présidentiel de Cyrénaïque, Ali Faraj al Qatrani, et de «geler» le fauteuil du ministère des Affaires étrangères, qui dans la liste initiale devait être attribué pour la première fois à une femme: Lamia Fathi Abusedra de Benghazi, accusée d’être proche de l’islamiste Abdelhakim Belhaj, ancien commandant du groupe de combat islamique libyen. Les changements toucheraient également le Département de la Santé, qui devrait être affecté à l’ancien sous-secrétaire à la Santé du Gouvernement d’Accord National (GNA), Ali Al Zanati, ainsi que le Ministère de la Justice. Le département de la défense devrait plutôt rester vacant. Théoriquement, la nouvelle ardoise gouvernementale a besoin d’une majorité simple de 90 voix pour gagner la confiance.
Le gouvernement a jusqu’au 19 mars pour être approuvé par le Parlement, avant de tenter d’assurer la période intérimaire. Lundi, une première séance du Parlement sur le vote de confiance a été qualifiée « d’historique » par l’ONU. Elle a rassemblé 132 députés sur 188 alors que la Chambre, profondément divisée, s’était très rarement réunie ces dernières années. L’issue du vote de confiance est également incertaine car parmi les 132 députés réunis à Syrte, il y a ceux qui demandent à reporter le vote jusqu’à la publication du rapport des Nations Unies (prévu pour le 15 mars) sur les cas de corruption présumée au Forum pour le dialogue (de Tunis) qui impliquerait le clan Dabaiba, ainsi que ceux qui voudraient voter sur un amendement constitutionnel (qui nécessite un quorum de 120 députés). La formation présentée à la présidence de la Chambre des représentants (le parlement libyen élu en 2014 et aujourd’hui divisé en trois sections qui se réunissent à Tobrouk, Tripoli et Tunis) avait pour but d’assurer une large participation de la communauté libyenne et une répartition géographique équitable entre les régions du Pays, à savoir la Cyrénaïque (à l’est), le Fezzan (au sud) et la Tripolitaine (à l’ouest).