(Rome, 2 mars 2021). A Nassiryia, dans le sud de l’Irak, les manifestations contre le gouvernement et les autorités locales se poursuivent malgré les restrictions imposées au coronavirus. Pendant des semaines, la population est descendue dans la rue pour exiger la démission du gouverneur de la province, Nazem al-Waeli, en raison de la détérioration des services publics et des conditions de vie en général, mais les manifestations se sont rapidement transformées en affrontement avec la police.
Au cours des derniers jours, au moins quatre personnes ont perdu la vie, tandis que 120 autres manifestants et 57 policiers se sont retrouvés à l’hôpital en raison de leurs blessures, selon l’agence de presse Reuters. Jeudi, des manifestants ont tenté de se rassembler autour du palais du gouverneur en lançant des pierres sur les forces de sécurité chargées de la défense du bâtiment, qui à leur tour ont riposté en tirant en l’air pour tenter de disperser la foule. Cependant, la présence de la police n’a pas empêché les manifestants d’organiser de nouvelles manifestations dans les jours suivants, signe du mécontentement croissant de la population locale.
Les habitants de Nassiriya se plaignent principalement du manque d’électricité, disponible seulement quelques heures par jour, et d’eau potable, ainsi que d’une détérioration générale des services publics. Les problèmes actuels se font également sentir dans d’autres régions du pays, mais ils pèsent encore plus dans la province méridionale de Dhi Qar, connue pour ses gisements de pétrole et pourtant particulièrement pauvres.
Pourtant, ce n’est pas la première fois que la population locale proteste contre les autorités locales et les conditions de vie précaires. En 2019, les manifestations qui ont conduit à la démission du Premier ministre de l’époque Adel Abdel Mahdi ont commencé à Nassiriya, puis se sont propagées au reste du pays et à la capitale Bagdad. Cette fois, cependant, on ne sait pas dans quelle mesure les manifestants peuvent réussir à attirer l’attention de la population irakienne en général, mais les récentes manifestations surviennent à un moment particulièrement délicat.
La visite du pape
Le gouvernement central est en effet confronté à l’urgence sanitaire provoquée par la propagation de coronavirus dans le pays, mais surtout il doit faire face à la visite imminente du pape François. Le Souverain Pontife est attendu dans le pays du Moyen-Orient du 5 au 8 mars et dès le 6 mars, il devrait se rendre dans la plaine d’Ur, ville considérée comme le lieu de naissance d’Abraham située dans la province de Nassiriya.
Précisément pour assurer la sécurité du pape François, le gouvernement de Bagdad serait en pourparlers avec les manifestants pour mettre fin aux manifestations et éviter une augmentation des risques liés à la sécurité du pape. Selon le site du journal Asharq al-awsat, le Premier ministre Moustafa al-Kadhimi a déjà envoyé une délégation à Nassiriya pour résoudre la situation dans la province, mais à ce jour les manifestants ne semblent pas disposés à quitter la rue. D’un autre côté, ce n’est même pas la première fois que le gouvernement envoie ses délégués pour trouver une solution aux problèmes du sud de l’Irak. Dès novembre 2020, certains responsables s’étaient rendus à Nassiriya pour enquêter sur les disparitions et la mort de plusieurs manifestants, sans produire de résultat.
Le manque d’accord entre le gouvernement et la population locale pèse également sur le manque de confiance de cette dernière en l’autorité centrale, accusée d’avoir abandonné la province méridionale à son sort et de négliger les besoins de ses citoyens. Comme le rapporte également le site Asharq al-awsat, plusieurs manifestants estiment que Bagdad n’intervient à Nassiriya que pour contenir les manifestations en vue de l’arrivée du Pape, plutôt de vraiment remédier aux problèmes des habitants de la province.
La visite du Pape représente un défi que Bagdad ne peut pas perdre compte tenu de l’importance historique et de l’impact qu’elle aura au niveau tant religieux que social et politique, mais de nombreux doutes subsistent quant à la capacité effective de l’autorité centrale à garantir la sécurité du Pape. Nassiriya sera l’un des premiers défis pour al-Kadhimi et ses ministres.
Futura D’Aprile. (Inside Over)