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Syrie : la chute d’Assad marque un tournant dans la guerre contre la drogue. La fin du Captagon

(Rome, 22 décembre 2025). La production de Captagon en Syrie aurait été largement stoppée après la chute du régime du «boucher de Damas» Bachar al-Assad, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime. Grâce à une coopération renforcée entre les pays arabes, plusieurs laboratoires ont été démantelés, entraînant une baisse notable de la disponibilité de cette drogue synthétique, longtemps au cœur d’un trafic régional massif

En Syrie, la production à grande échelle de Captagon, drogue de synthèse illégale, a été stoppée à la suite du renversement du régime de Bachar al-Assad il y a un an, a annoncé l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) à Vienne, attribuant ce changement à une meilleure coopération entre les pays arabes de la région dans la lutte contre la drogue. Selon les conclusions préliminaires d’une enquête sur le marché de la drogue dans ces mêmes pays, les nouvelles autorités syriennes ont démantelé 15 laboratoires industriels et 13 entrepôts, réduisant ainsi la disponibilité des comprimés de Captagon dans le pays. La Syrie était devenue le premier producteur et exportateur mondial de ce psychostimulant de type amphétamine, comme le rapporte le quotidien «Il Tempo».

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Le régime d’Assad a été accusé d’être impliqué dans la production illicite de cette drogue, qui tire son nom d’une marque de fénéthylline. Cette variante, qui s’est répandue au Moyen-Orient ces dernières années et peut être composée de divers types de substances chimiques, présente une grande capacité d’adaptation qui a contribué à sa prolifération, conjointement à la simplicité de son processus de fabrication. «Si l’expansion du marché de la drogue ces dernières années a divisé la région, la nécessité d’agir aujourd’hui est en train de l’unir», a déclaré Bo Mathiasen, directeur des opérations de l’ONUDC à Vienne. «Les pays coopèrent, partagent des renseignements et mènent des opérations conjointes, ce qui a permis des saisies record en 2025», a-t-il ajouté.

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«Les données vérifiées par l’ONUDC indiquent qu’au moins 177 millions de comprimés de la drogue en question, soit environ 30 tonnes, ont été interceptés dans la région arabe au cours des douze derniers mois, et que les plus importantes saisies de l’année ont été réalisées grâce aux efforts conjoints des autorités de plusieurs pays». Les pays du Golfe restent le principal marché de destination du Captagon, mais des signes de pénurie se font sentir. Toutefois, des millions de comprimés auraient été produits avant la chute du despote de Damas et pourraient continuer à approvisionner le marché pendant plusieurs années. Enfin, l’ONUDC avertit que les trafiquants de drogue explorent de nouvelles routes, notamment à travers l’Europe et l’Afrique du Nord, et que l’interruption du marché du Captagon pourrait favoriser la propagation d’autres drogues de synthèse comme la méthamphétamine.

La fin de la production massive de Captagon en Syrie met aussi en lumière le rôle central qu’aurait joué l’ancien régime dans l’essor de ce trafic. De nombreuses enquêtes internationales ont effectivement mis en cause des réseaux liés aux frères Bachar et Maher al-Assad, en coopération avec le Hezbollah libanais pro-Téhéran, dans l’industrialisation et l’exportation de cette drogue. Ce système aurait permis d’inonder durablement les marchés du Moyen-Orient et les pays du Golfe, en particulier l’Arabie saoudite, faisant du Captagon un outil à la fois criminel, économique et géopolitique. La coopération régionale actuelle marque ainsi une rupture avec des années de tolérance, et constitue un test décisif pour la stabilité et la sécurité de la région.

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Il est utile de rappeler que parallèlement à la Syrie, c’est le Liban qui apparaît comme un autre maillon clé de cette économie illicite, longtemps paralysé par l’emprise du Hezbollah. Des usines de production de Captagon y auraient prospéré pendant des années, bénéficiant d’une protection politique et militaire qui empêchait toute intervention de l’État. Leur récent démantèlement par l’armée marque aussi une rupture inédite, dans un pays où de telles opérations étaient jusque-là impossibles, voire interdites.

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