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Des Patriot israéliens à Kiev ? Les enjeux derrière l’atterrissage mystérieux d’un avion à Moscou

(Rome, 08 décembre 2025). Un discret aller-retour d’un jet gouvernemental israélien à Moscou ravive les interrogations sur l’équilibre fragile entre Israël et la Russie. Alors que des batteries Patriot modernisées en Israël auraient atterri à Kiev, et qu’un contrat majeur d’Arrow 3 a été conclu avec l’Allemagne, le pacte tacite qui, jusqu’ici, empêchait toute confrontation indirecte, semble vaciller. Entre pressions américaines, soupçons russes et risques d’escalade avec l’Iran, Tel-Aviv pourrait tenter d’éteindre un incendie diplomatique avant qu’il n’éclate

Nous savons que des informations confidentielles peuvent parfois s’avérer importantes, voire fondamentales. Nul n’ignore que Benyamin Netanyahu et Vladimir Poutine ont conclu un accord tacite stipulant la non-ingérence russe dans le conflit israélo-iranien et iranien, et la non-ingérence israélienne dans la guerre en cours dans le Donbass. La Russie n’a, jusqu’à présent, fourni ni systèmes de missiles S-400 ni avions Sukhoi Su-35 à l’Iran, et Israël, malgré les pressions de l’administration Biden, n’a jamais fourni à l’Ukraine de technologies offensives. Uniquement des systèmes de défense civile, tels que des systèmes d’alerte aux bombardements par téléphone portable, ainsi que des ambulances et du matériel médical, ont été fournis.

Le 3 décembre, comme le rapporte Michael Sfaradi dans le quotidien italien «Il Tempo», une information a brièvement circulé concernant un avion Gulfstream israélien qui, ces derniers jours, aurait atterri à Moscou avant de repartir pour Israël environ six heures plus tard. Sur ce sujet, nous avons posé plusieurs questions à nos sources habituelles, mais même les plus bavardes ont refusé de se prononcer. Ce silence alimente des soupçons quant à une possible rupture du pacte tacite entre Jérusalem et Moscou. Les questions qui restent sans réponse sont les suivantes : qui se trouvait à bord ? Si une délégation s’est rendue en Russie pour des discussions, et que l’on n’a pas utilisé un avion de ligne, mais un jet gouvernemental (beaucoup plus coûteux) pour un aller-retour éclair, à quoi est due cette précipitation ?

Il faut souligner que ce vol «secret» d’un jet gouvernemental vers Moscou est inhabituel ; d’une part, Israël n’envoie normalement pas de délégations directes depuis le début de la guerre en Ukraine, de l’autre, un voyage éclair de 6h à Moscou suggère un message urgent.

En l’absence d’information ou de commentaire officiel, nous pouvons fonder notre recherche de la vérité sur des événements récents pour tenter de comprendre ce qui a pu se passer.

Premier point : les États-Unis disposent des dépôts d’armes en Israël, sous le contrôle direct du Pentagone, d’où des fournitures ont été envoyées à l’Ukraine. Même si les États-Unis n’étaient pas directement impliqués, cette situation a été embarrassante pour Jérusalem.

Deuxième point : Israël disposait, en prêt, ou à titre d’usage temporaire, d’anciennes batteries antimissiles Patriot que des ingénieurs israéliens avaient modernisées avec des technologies récentes. Les Américains en ont exigé la restitution et, une fois arrivés à la base américaine de Ramstein en Allemagne, ces missiles Patriot ont été remis à l’Ukraine. On ignore si ces missiles avaient été remis dans leur état d’origine, obsolète, avant leur retour, ou si, avant leur restitution, ces missiles avaient été ramenés à leur état d’origine, donc obsolète, ou s’ils étaient encore équipés des améliorations techniques installées lors de leur séjour en Israël. Si tel était le cas (et il est peu probable que Jérusalem se soit ainsi exposé), le fameux pacte tacite aurait des raisons de vaciller.

Dernier détail, peut-être le plus important : en respectant un contrat de plusieurs milliards d’euros, Israël a fourni à l’Allemagne des batteries antimissiles Arrow 3. En supposant, à tort mais avec certitude, que c’est précisément ce point qui a créé des tensions entre Israël et la Russie. Peut-être (et le conditionnel est obligatoire) que la délégation israélienne arrivée à Moscou avait pour mission d’expliquer à qui de droit que les missiles Patriot étaient américains et dépassés, que les Arrow 3 sont une arme défensive et, surtout, qu’elles ont été vendues à l’Allemagne et non à l’Ukraine. Si Moscou n’a aucune intention d’ouvrir un front avec l’Allemagne, elle n’a aucune raison de s’inquiéter.

À ce stade, il ne reste plus qu’à attendre. Si nos prévisions sont justes, ajoute Michael Sfaradi, deux scénarios se dessinent : soit le Kremlin comprend la situation et maintient le statu quo ; soit il ne le comprend pas, et nous verrons bientôt des S-400 déployés pour protéger des sites iraniens sensibles et des Sukhoi Su-35 voler au-dessus de Téhéran.

Pour Israël, c’est un cauchemar stratégique : ces armes protégeraient les sites nucléaires iraniens et limiteraient la capacité de Tel-Aviv à agir militairement.

Au-delà du mystère entourant ce vol express vers Moscou, un fait demeure : les équilibres qui régissent les relations entre Israël, la Russie et les puissances régionales n’ont jamais été aussi précaires. Si Tel-Aviv et Moscou parviennent à rétablir la confiance, le statu quo pourra tenir encore quelque temps. Dans le cas contraire, un glissement pourrait s’opérer rapidement, avec un rapprochement militaire renforcé entre Moscou et Téhéran qui redessinerait profondément la dynamique stratégique au Moyen-Orient.

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