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Entre le dragon, l’éléphant et son propre parti, Trump risque d’être isolé

(Rome, 03 septembre). Alors que Donald Trump voulait redonner à l’Amérique sa grandeur (MAGA), sa politique étrangère et économique semble l’avoir conduite vers l’isolement. Le sommet de Tianjin en Chine a révélé l’émergence d’un nouvel axe mondial autour de Xi Jinping, Vladimir Poutine et Kim Jong-un, marquant l’échec d’une diplomatie américaine réduite à des coups de force. Entre dettes croissantes, rupture avec les alliés historiques et montée en puissance de nouvelles puissances, l’hégémonie américaine vacille, et risue d’isoler le magnat

Donald Trump souhaitait que l’Amérique retrouve sa grandeur, mais il se retrouve face à un pays de plus en plus isolé. Ses anciens amis sont contraints de modifier leurs alliances historiques, répondant à l’agression vaine d’un vieil allié qui, soudainement, se retrouve en proie au syndrome du «Marquis del Grillo», selon le décryptage de Gianfranco Polillo dans les colonnes de «Formiche.net»

Trump n’y parviendra pas. C’est le résultat le plus marquent du sommet de Tianjin, au-delà des mots, des rappels historiques ou de tout autre élément. Y compris un défilé militaire rappelant les vieilles liturgies du socialisme accompli. En tête, la triade : Xi Jinping, Vladimir Poutine et Kim Jong-un. Le nouveau monde, et plus encore celui de demain, si les politiques ne changent pas, sera très différent et, de loin, pire que celui que nous avons connu.

Dans ce scénario, aussi sombre que possible, se trouve toute l’ampleur de l’échec politique de Donald Trump. Il voulait une Amérique redevenue grande (MAGA : selon le slogan de campagne, affiché partout, non seulement sur la casquette qu’il porte à la moindre occasion), de plus, il se retrouve avec un pays toujours plus isolé. Ses anciens amis sont contraints de modifier leurs alliances historiques et leurs stratégies, pour  répondre aux agressions futiles de celui qui était jadis un allié, mais qui soudain agit comme s’il était dominé par le syndrome du Marquis del Grillo.

«Moi, je suis moi et vous n’êtes rien». Je peux donc disposer de vos économies et, si nécessaire, de vos vies. Une attitude magistrale, presque une version occidentale des satrapes orientaux, qui a réduit à néant en un éclair des années et des années de diplomatie, d’analyses de politique étrangère approfondies et de recettes à suivre dans la jungle moderne des relations internationales. Tout est réduit à l’état de la pacotille inutile. En face, cependant, se trouve une assemblée de 23 pays, impliqués à divers titres dans un projet ambitieux.

Avec un évident contenu anti-occidental. Un élément dérangeant, mais aussi inquiétant, qui pousse aussi à réfléchir. La différence historique de ceux qui ont choisi la cour de Xi ne se réduit pas à un simple formalisme. S’autoproclamer démocratie ne suffit pas à tracer une ligne de démarcation. Il faut plutôt suivre un code, que Trump, cependant, n’a pas respecté. Ni lorsqu’il a malmené Volodymyr Zelensky dans le Bureau ovale. Ni lorsqu’il a menacé tout le monde (du Canada au Japon, en passant par l’Europe) d’imposer la guillotine des droits de douane. Ni lorsqu’il a accueilli Vladimir Poutine avec tous les honneurs dus non pas à un chef d’État, mais à un allié. Voire à un complice, comme l’a commenté une partie de la presse internationale.

Ayant semé tant de vent, il était inévitable qu’à la fin ce soit la tempête. En d’autres circonstances, un échec aussi retentissant n’aurait pas été sans conséquences. Il aurait suscité des réactions qui, pour l’instant, restent invisibles. Il aurait ébranlé l’opinion publique intérieure, donnant lieu à des manifestations de désaccord et à une opposition radicalisée, qui, au contraire, reste silencieuse. Alors, que se passe-t-il dans l’Amérique profonde ? Toute énergie est-elle épuisée ? La position hégémonique qui a marqué toute la période d’après-guerre est-elle abandonnée sans combat ?

Par le passé, les théoriciens de «l’hégémonie» (Kindleberger, Keohane, Gilpin) n’excluaient pas la fin de la suprématie américaine. Elle était envisagée : susceptible de se manifester si les coûts économiques du maintien du système croissaient plus vite que la capacité des États-Unis à les assumer. C’est ce qui se produit aujourd’hui, notamment au lendemain de la crise financière mondiale de 2008. Depuis, la structure de l’économie américaine a beaucoup changé. Le déficit budgétaire est devenu chronique atteignant en moyenne des valeurs deux fois supérieures aux seuils prudents définis par les critères de Maastricht.

En conséquence, la dette publique a explosé, dans une dynamique à l’italienne. Comment y remédier ? C’est là que la faiblesse des politiques de Trump apparaît pleinement. Après avoir exclu toute possibilité d’austérité, contrairement à l’idée d’une nouvelle réduction de la charge fiscale des plus riches, le choix s’est porté sur l’imposition de droits de douane, dans l’espoir lever des fonds. Cela obligerait les exportateurs étrangers à verser une contribution allant de 15 % à 50 % pour consolider les finances publiques américaines déjà affaiblies.

Un geste non seulement contraire au «Washington consensus» — qui avait été le pilier des grandes institutions économiques internationales, héritage de l’hégémonie américaine —, mais encore aggravé par la brutalité de son application. Quant aux résultats, nous le verrons, plus tard, au bilan. Pour l’instant, il ne reste que les déclarations stupéfiantes du président. Existait-il, peut-être, une alternative ? La réponse est affirmative. Pas tant sur le plan technique que politique, en s’appuyant sur le principe de «partage».

Lorsqu’une hégémonie solitaire entre en crise, pour les raisons susmentionnées, il aurait fallu au moins tenter de consolider l’ancien système d’alliances. Voire l’étendre, si possible. Cela aurait impliqué un transfert de souveraineté. Le passage d’une monarchie absolue, telle qu’elle a été jusqu’à présent, à une monarchie constitutionnelle. Un renoncement ? Assurément. Mieux vaut cependant perdre quelque chose que de risquer de tout perdre face à de nouveaux «joueurs» qui ne cachent en rien leurs mauvaises intentions.

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