(Rome, 08 août 2025). La décision du gouvernement libanais d’approuver la feuille de route américaine déclenche des protestations au Liban. Pour les États-Unis, il s’agit en revanche d’une décision historique
Une «marche d’humiliation» et un acte de capitulation face à Israël et aux États-Unis. C’est ainsi que Mahmoud Komati, chef adjoint du conseil politique du Hezbollah, a qualifié la décision du gouvernement libanais, sur proposition des États-Unis, de désarmer le Hezbollah, qui suscite de vives protestations dans le pays. «Aucun État ni gouvernement au monde ne s’opposerait à la résistance sur son propre territoire alors que l’ennemi y est toujours, l’occupant et commettant des agressions contre le Liban chaque jour», a-t-il déclaré à Al-Jazeera. Komati a ajouté que le Hezbollah maintiendrait son droit de résister à Israël en vertu de la Charte des Nations Unies, qui consacre le «droit inhérent à la légitime défense individuelle ou collective». «Notre présence est légale, légitime, éthique et humaine, et il en va de même pour nos armes en tant que mouvement de résistance», a-t-il ajouté. Hier, comme le rapporte «Il Fatto Quotidiano», le gouvernement libanais a accepté les principes de la proposition américaine, notamment «la fin progressive de la présence de groupes armés non étatiques sur l’ensemble du territoire, tant au nord qu’au sud du fleuve Litani».
Notons que, selon la presse locale, un appel à une mobilisation de sympathisants du Parti de Dieu vient d’être lancé, notamment via les réseaux sociaux, afin de dénoncer la décision prise la veille par le gouvernement de récupérer le monopole des armes, dont celles du Hezbollah. L’appel est en effet lancé par le «Rassemblement des jeunes de la banlieue sud» appelant à une mobilisation via un convoi motorisé qui partira à 18h de l’église Saint-Michel à Chiyah (un fief du Hezbollah), jusqu’à la route de l’aéroport international de Beyrouth. Il appelle les participants à «ne pas faire de la vitesse» lors du convoi et «ne pas s’en prendre aux militaires et aux forces de sécurité (FSI)».
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Cependant, parmi les principes signés figure aussi l’exigence du «retrait d’Israël du territoire libanais et de la cessation de toutes les hostilités, y compris les violations terrestres, aériennes et maritimes», ainsi que l’établissement d’une frontière permanente entre le Liban et Israël et entre le Liban et la Syrie. Le ministre libanais de l’Information, Paul Morcos, a réaffirmé que la mise en œuvre de ces principes dépend de l’engagement de toutes les parties concernées dans l’accord (y compris Israël) à respecter les obligations décrites dans le document.
Les États-Unis ont clairement exprimé leur satisfaction : l’envoyé américain Tom Barrack a en effet déclaré que le gouvernement libanais avait pris une décision «historique» en acceptant de désarmer le Hezbollah. Dans une publication sur X, Barrack a félicité les dirigeants libanais pour avoir «pris cette décision historique, courageuse et judicieuse de commencer à mettre pleinement en œuvre» le cessez-le-feu de novembre 2024, qui avait mis fin à plus d’un an d’hostilités entre le Hezbollah (décapité) et Israël. «Les résolutions du Conseil des ministres cette semaine ont enfin concrétisé la solution ‘Une Nation, Une Armée‘ pour le Liban. Nous sommes aux côtés du peuple libanais», a déclaré Tom Barrack.
Voici les principaux points de l’accord :
- Le Liban s’engage à mettre en œuvre l’accord de Taëf, la Constitution libanaise et les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, en particulier la résolution 1701 (de 2006), en prenant les mesures nécessaires pour étendre sa pleine souveraineté sur l’ensemble du territoire. L’objectif est de renforcer le rôle des institutions légitimes, de garantir le monopole de l’État en matière de décision de guerre et de paix, ainsi que sur le monopole de l’État sur la détention d’armes.
- Assurer la pérennité du cessez-le-feu, y compris la fin de toutes les violations terrestres, aériennes et maritimes, via des mesures organisées en vue d’une solution durable, globale et garantie.
- Mettre fin progressivement à la présence armée de toutes les factions non étatiques, y compris le Hezbollah, sur l’ensemble du territoire libanais, au sud comme au nord du fleuve Litani, tout en fournissant un soutien adéquat à l’armée libanaise et aux forces de sécurité intérieure.
- Déployer des unités de l’armée libanaise dans les zones frontalières clés et les régions intérieures, avec un soutien adéquat à l’armée et aux forces de sécurité intérieure.
- Le retrait d’Israël des «cinq points» contestés, et l’engagement à résoudre les questions frontalières et les questions des prisonniers par des négociations indirectes et la voie diplomatique.
- Assurer le retour des habitants des villages et localités frontaliers.
- Garantir le retrait complet d’Israël du territoire libanais et la fin de toutes les hostilités, y compris les violations terrestres, aériennes et maritimes.
- Délimitation et définition permanente de la frontière internationale entre le Liban et Israël.
- Délimitation et définition permanentes de la frontière entre le Liban et la Syrie.
- Organisation d’une conférence économique avec la participation des États-Unis, de la France, de l’Arabie saoudite, du Qatar et d’autres pays amis du Liban, afin de soutenir la reconstruction de l’économie libanaise, en application de la vision du président Donald Trump visant à faire du Liban un pays prospère.
- Apporter un soutien international accru aux forces de sécurité libanaises, en particulier à l’armée, en leur fournissant les moyens militaires nécessaires à la mise en œuvre de cette initiative, afin d’assurer la protection du pays du Cèdre.
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