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Donald Trump-Volodymyr Zelensky : la reprise des négociations au nom du Pape François

(Rome, Paris, 27 avril 2025). L’adjectif le plus utilisé pour décrire la rencontre entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky avant les funérailles du pape François est un défi de taille : un moment «historique». Les deux présidents, assis sur deux chaises sous la voûte de Michel-Ange, peu avant les funérailles du Pape de la Paix et des Ponts, ont exprimé un sentiment clair : Jorge Mario Bergoglio a accompli sa dernière médiation, écrit Andrea Muratore dans le quotidien «Inside Over».

«Face à la rage de tant de guerres ces dernières années, avec des horreurs inhumaines et d’innombrables morts et destructions, le Pape François n’a cessé d’élever la voix implorant la paix et appelant à la raison, à des négociations honnêtes pour trouver des solutions possibles, car la guerre, disait-il, n’est que la mort de personnes, la destruction de maisons, d’hôpitaux et d’écoles», a rappelé le cardinal doyen Giovanni Battista Re lors de l’homélie pour la messe des funérailles du Pape, ajoutant que «la guerre laisse toujours le monde pire qu’il n’était auparavant : elle est toujours une défaite douloureuse et tragique pour tous». Dans ce sens, la rencontre Trump-Zelensky est le dernier acte que, de fait, son œuvre a permis d’accomplir.

La réunion bilatérale avant les funérailles du Pape

Le moment touchant et intense, qui s’est déroulé à quelques pas du blason avec le sceau pontifical de Jean-Paul II, ne doit cependant pas être capturé par la simple rhétorique de l’image. Trump et Zelensky, qui se sont affrontés à plusieurs reprises sur la question de la fin de la guerre en Ukraine, sont tous deux de très habiles communicateurs et ont su attirer l’attention du monde en marge d’un événement qui ne pouvait manquer d’avoir des répercussions diplomatiques. Vue de loin, la conversation semble ouverte à l’interprétation : est-ce Trump qui a demandé audience à Zelensky ou l’inverse ? Si ce qui se passe actuellement est l’équivalent séculier d’un confessionnal, lequel des deux est le pénitent ? Et surtout, à quoi va aboutir ce dialogue ?

Autant de questions pertinentes et clairvoyantes qui devraient nous inciter à éviter des jugements superficiels ou hâtifs. Ce qui a pu commencer au Vatican est un puzzle diplomatique centré à la fois sur l’axe Etata-Unis-Ukraine et le Saint-Siège, focalisée sur des objectifs bien précis : amener à la table des négociations un accord pour une «paix juste», comme le pape François l’a souvent rappelé en invitant au «courage de négocier», ce qui implique non seulement la promotion du dialogue russo-américain, mais aussi l’ouverture des marges de discussion entre Washington et Kiev.

En second lieu, le cadre du dialogue parle clairement et révèle la discrète direction de la diplomatie vaticane, qui a trouvé ces derniers temps un espace de débat avec les États-Unis grâce à la rencontre entre le vice-président J.D. Vance et le secrétaire d’État Pietro Parolin, peu avant la mort du pape, et avec l’Ukraine, elle a construit des ponts surtout après l’engagement actif de l’envoyé spécial de François, le cardinal Matteo Maria Zuppi, pour ramener dans l’ex-pays soviétique environ 450 enfants ukrainiens enlevés et transférés en Russie après l’invasion.

Enfin, il est évident que le dialogue Trump-Zelensky influencera profondément les scénarios qui s’ouvriront à l’Église dans l’après-Conclave. Voir les deux présidents se parler sous les décorations et les peintures de Saint-Pierre a été l’accomplissement ultime pour le défunt pontife, mais maintenant l’effort pour «l’Ukraine déchirée», comme le Pape l’appelait, devra inévitablement s’intensifier une fois son successeur choisi. Ce moment est, littéralement, prophétique autant que politique. Prophétique parce que «parler avant», parler pour la paix, parler pour l’équilibre et le soutien diplomatique, est en soi un acte révolutionnaire à une époque de confrontations musclées et de murs.

Trump et Zelensky face à la mémoire du Pape

«Le jour des adieux au Pape, qui avait les périphéries dans son horizon, voit le cœur du plus petit État de la planète redevenir le centre du monde. Les leaders qui, en février, s’étaient insultés à Washington, apparaissent aujourd’hui comme deux hommes portant sur les épaules des destins bien au-delà de leurs propres frontières», observe Nello Scavo dans le quotidien «Avvenire». A ces deux présidents revient l’honneur et le fardeau d’être à la hauteur du moment historique que leur rencontre a produit.

La réunion bilatérale au Vatican avait, après tout, un invité indésirable auquel tout le monde pensait en regardant Trump et Zelensky dialoguer : Vladimir Poutine. La Russie est restée un spectateur silencieux et à distance de la confrontation et tout le jugement politique du dialogue sera basé sur l’attitude que l’Ukraine et, surtout, les États-Unis adopteront vis-à-vis de Moscou dans les semaines à venir. Pour Zelensky, l’objectif pourrait être de comprendre le «courage de négocier», tandis que pour Trump, il s’agit d’éviter de se présenter devant Moscou avec un allié délégitimé et frappé.

Ouvrir des portes là où il y a des murs

Il semble est que les États-Unis se sentent freinés par les manœuvres de Poutine, qui, d’une part, négocie et, de l’autre, exploite l’impasse diplomatique pour avancer sur le terrain. Moscou a annoncé hier la reconquête de l’oblast de Koursk, où les Ukrainiens avaient pénétré en août. Trump a attaqué son homologue russe sur Truth : «Poutine n’avait aucune raison de tirer des missiles sur des villes et des zones civiles ces derniers jours. Cela me fait penser qu’il ne veut pas arrêter la guerre, qu’il se moque de moi et qu’il devrait être traité différemment, par des sanctions bancaires ou des sanctions secondaires ? Trop de gens meurent».

Le sentiment est qu’un accord n’est réalisable qu’en rassemblant les bonnes volontés pour prendre les mesures nécessaires et en rétablissant la confiance diplomatique en vue de sa mise en œuvre et de sa concrétisation. Voici le vaste programme qui est transmis aux chancelleries après la rencontre Trump-Zelensky et qui appelle directement la Russie à prendre, à son tour, les mesures en question. La puissance discrète de la diplomatie vaticane vise à ouvrir des portes là où tout le monde voit des murs. Concernant la relation personnelle entre Trump et Zelensky, les résultats sont déjà là. Quant au reste, les prochaines semaines révéleront l’issue du processus.

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