(Rome, Paris, 14 avril 2025). La lettre des réservistes de l’armée de l’air appelant à la fin de la guerre et à un accord avec le Hamas visant à libérer les otages, a provoqué un véritable séisme en Israël. Malgré la réponse ferme du gouvernement, qui a commencé à licencier les signataires de cette première missive, des lettres similaires continuent d’affluer, signées par des membres du personnel militaire et civil des renseignements, des corps blindés, des parachutistes et d’autres branches de l’armée, aussi bien par des soldats que par des officiers supérieurs, comme le rapporte Davide Malacaria dans le quotidien «Inside Over».
C’est ce qu’indique un article du journal Haaretz, qui mentionne qu’à ces vois, se sont ajoutés 3.500 universitaires. Un développement nouveau et inattendu dans ce conflit, que les autorités israéliennes ne peuvent certainement pas ignorer, même si celles-ci maintiennent une offensive qui produit des massacres. Hier encore, une attaque a eu lieu contre l’hôpital baptiste al-Ahli, un établissement de santé chrétien situé au cœur de Gaza, qui a été dévasté le dimanche des Rameaux (une triste coïncidence, probablement pas fortuite).
L’éditorial de Haaretz du 14 avril, qui stigmatise cet assaut, l’assassinat des quinze soignants qui a scandalisé le monde, ainsi que le bombardement qui a détruit un immeuble à Choujaiyya, un quartier de la ville de Gaza, et qui aurait tué un autre commandant du Hamas, et avec lui 35 autres civils.
«Dans la guerre actuelle», écrit Haaretz, «le principe de proportionnalité a été mis de côté. Tuer des dizaines de civils pour éliminer un jeune commandant du Hamas n’est pas considéré comme anormal, bien qu’il soit très probable qu’il s’agisse d’un crime de guerre».
«Parallèlement à la proportionnalité, d’autres valeurs et principes ont également été abandonnés : la pureté des armes (l’un des quatre principes cardinaux exigés de l’armée israélienne, ndlr), le respect du droit international, la prise en compte des souffrances infligées aux civils innocents et la réflexion sur ce qui devrait advenir après la fin de la guerre».
«Tout cela se déroule parallèlement à une décision politique visant explicitement à affamer la population de Gaza. Depuis six semaines, la bande de Gaza est totalement fermée à toute forme d’aide, y compris alimentaire. Les signalements de malnutrition généralisée, de famine endémique et de propagation de maladies se multiplient, tandis que l’armée israélienne pousse sans relâche les civils épuisés et affamés à fuir d’un endroit à l’autre».
«Cette politique brutale envers la population civile a terni à jamais la réputation d’Israël et nous en paierons un lourd tribut : boycotts ouverts et discret, dommages économiques, érosion de la légitimité internationale et des fondements moraux et humanitaires de la société israélienne».
«Il est temps que la vérité soit dite : la seule voie pour qu’Israël survive en tant que démocratie et non en tant qu’État paria, est de parvenir à un cessez-le-feu immédiat, à un accord incluant la libération des otages et des négociations menant à la création d’un État palestinien. Il n’y a pas d’autre issue». Malheureusement, cette dernière proposition semble aujourd’hui plutôt utopique, mais nous la signalons malgré tout, car l’espoir meurt en dernier.
Pour mémoire, il convient de noter que les négociations ont repris et semblent connaître un nouvel élan. Mais là aussi, l’espoir doit tenir compte des déceptions passées, lorsque Netanyahu a réussi à faire dérailler des accords pourtant quasiment conclus, un acte de sabotage qui, selon un haut responsable du Hamas, semble se répéter, bien qu’il ait assuré aux familles des otages qu’un accord serait proche.
De plus, comme le rappellent Aaron David Miller et Steven Simon dans le New York Times du même jour, «Netanyahou est poursuivi pour plusieurs chefs d’accusation, dont il pourrait ne se soustraire qu’en restant au pouvoir. Il n’a aucune intention de compromettre son emprise sur le pouvoir».
Il sait très bien que ses alliés du gouvernement ultra-orthodoxe l’abandonneraient en cas d’accord avec le Hamas. Ses adversaires, tant nationaux qu’internationaux, pourraient envisager une garantie d’impunité : ce serait injuste, certes, mais cela pourrait réussir à le convaincre de mettre fin à ces horreurs.