(Rome, Paris, 21 février 2025). Ceux qui pensaient que la BEI servait à financer des hôpitaux, des écoles et des chemins de fer devront reconsidérer leur position. Car, sous la pression de la Commission européenne et des États membres (qui, par coïncidence, sont aussi actionnaires de la BEI), la banque luxembourgeoise devient de plus en plus le coffre-fort de l’armement européen. Elle n’est pas encore officiellement la «Banque de Guerre», mais c’est en bonne voie, écrit Giuseppe Gagliano dans le média italien «Inside Over».
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Le sommet pour militariser l’Europe
Les dirigeants européens se réuniront à Bruxelles lundi prochain pour discuter des dépenses militaires. Non pas pour résoudre la crise économique ou le problème de l’inflation, mais pour réfléchir à la manière d’augmenter la part du PIB à consacrer à l’armement. Parce que, dans le monde de Trump, les alliés de l’OTAN devraient consacrer au moins 5 % de leur PIB à la défense. Un seuil dont seule la Pologne frôle aujourd’hui, tandis que des pays comme l’Italie et l’Espagne n’atteignent même pas 2%.
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Malgré la crise sociale et économique qui frappe des millions d’Européens, le débat porte sur la manière de trouver les fonds pour remplir les arsenaux. Le rapport Draghi est clair : entre 700 et 800 milliards par an seront nécessaires. Une bagatelle, comparée aux sacrifices demandés aux citoyens européens par le Pacte de stabilité.
Giorgia Meloni fait également pression pour trouver une solution, après avoir téléphoné au chancelier Scholz pour aligner les stratégies en vue du sommet. Et bien que la présidente de la BEI ait précisé que la banque «n’est pas le ministère de la Défense», elle a confirmé sa volonté d’élargir le champ d’action vers le secteur militaire. En somme, de l’argent public pour des guerres privées.
Des armes partout, même déguisées en projets civils
Il y a un petit détail : selon les statuts, la BEI ne peut pas financer des projets à usage exclusivement militaire. Il faut donc faire preuve d’ingéniosité, et l’astuce est simple : il suffit d’affirmer que le projet a aussi une utilité civile. C’est ainsi que la banque européenne a déjà financé la modernisation des ports danois pour les navires de l’OTAN, le développement de satellites à double usage en Pologne et un fonds technologique pour l’industrie de guerre.
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Mais le véritable débat aura lieu lundi : modifier les statuts de la BEI afin de financer directement le secteur de la défense, sans même le prétexte d’un service public civil. Un diplomate européen a déjà donné le ton : « Il n’y a pas encore de consensus, mais il y a urgence à explorer toutes les options». En d’autres termes, ce n’est qu’une question de temps.
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L’Europe de la paix qui finance la guerre
Alors que la Commission européenne débloque un milliard d’euros pour la recherche militaire, un groupe d’eurodéputés italiens tente de s’élever contre cette «dérive». Parmi eux, se trouvent des membres du Parti démocrate (PD), des Verts et du Mouvement 5 étoiles (M5S), qui parlent d’une Europe qui «au lieu de placer la paix au centre, investit dans les armes et les plans de guerre». Mais la réalité est que le train du réarmement est déjà en marche.