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Syrie : les Etats-Unis maintiennent leur présence, avec une nouvelle base à Kobani

(Rome, Paris, 04 janvier 2025). Non seulement les États-Unis n’envisagent pas de quitter la Syrie, mais ils ont décidé de renforcer et d’élargir leur présence dans le nord du pays après la chute du régime de Bachar al-Assad. Six ans après avoir abandonné Kobani, les forces américaines semblent être revenues dans la ville située à la frontière avec la Turquie. Selon des rapports récents et des images apparues sur les réseaux sociaux, les États-Unis sont en train de construire une nouvelle base militaire dans la région : Kobani a longtemps été l’épicentre d’affrontements entre les Forces démocratiques syriennes (FDS), dirigées par les Kurdes et soutenues par les États-Unis, et la Turquie, écrit Roberto Vivaldelli dans «Inside Over».

La présence américaine irrite Ankara

Ankara est irrité par la présence américaine à Kobani. La Turquie, opposée depuis des années au soutien américain aux Forces démocratiques syriennes (FDS), intensifie en fait son offensive contre les Kurdes et leurs alliés. Les affrontements les plus violents se concentrent dans la ville de Manbij, où l’armée turque affirme être proche de la victoire. La prochaine étape de l’offensive turque semble être Kobani, déjà sous le coup d’attaques d’artillerie, où les FDS ont abattu un drone turc. Ankara cherche à éliminer les YPG, la principale faction kurde des FDS, et à empêcher les Kurdes de conserver l’autonomie acquise au cours de ces dramatiques années de guerre. La nouvelle direction islamiste à Damas, soutenue par la Turquie, partage cet objectif.

En effet, la semaine dernière, Ahmed Al-Charaa, connu sous le nom d’Abou Mohammed Al Joulani, chef du groupe islamiste Hayat Tahrir al-Cham (HTC), ancienne branche syrienne d’Al-Qaïda, a annoncé que toutes les armes présentes dans le pays, y compris celles détenus par les forces dirigées par les Kurdes, seront placés sous contrôle de l’État. Al-Charaa a fait ces déclarations le 22 décembre lors d’une conférence de presse tenue à Damas aux côté du ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan. La Turquie, après avoir soutenu l’opposition armée et joué un rôle crucial dans la chute du régime d’Assad grâce à l’offensive depuis Idlib, cherche désormais à capitaliser sur son intervention dans la région. Cependant, la présence de Washington à Kobani pourrait entraver ces ambitions.

Une opposition également iranienne

La République islamique d’Iran conteste également la présence américaine en Syrie. Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a averti les États-Unis que leurs bases militaires en Syrie étaient destinées à être «balayées par la jeunesse syrienne». Lors d’une cérémonie en mémoire de Qassem Soleimani, éliminé par les États-Unis il y a cinq ans, le Guide Khamenei a réaffirmé son opposition à la présence militaire américaine dans la région.

Le contexte de la mission américaine

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), les forces américaines ont transporté un convoi de 50 camions vers les zones contrôlées par les FDS dans le nord-est de la Syrie. «Les activistes de l’OSDH ont observé le convoi sur l’autoroute reliant Al-Hassaka à Al-Raqqa, se dirigeant vers la région d’Ain Al-Arab (Kobani), dans la campagne de l’est d’Alep. Le convoi était accompagné d’un véhicule militaire des FDS», a rapporté l’observatoire jeudi matin. Selon «North Press», ce convoi transportait du matériel logistique, notamment des blocs de béton, des modules préfabriqués, des caméras de surveillance et du matériel de construction. La base sera située au centre-ville, avec un hôtel désigné comme site principal. Pour l’heure, la nouvelle de la base n’a pas été officiellement confirmée.

La présence américaine en Syrie est actuellement estimée à environ 2.000 soldats, comme l’a récemment admis le Pentagone après que, pendant des années, les estimations officielles parlaient de seulement 900 soldats. L’objectif officiel reste la lutte contre l’EI, une menace qui ne se limite pas au Moyen-Orient. Il faut cependant reconnaître que la présence américaine en Syrie est controversée et critiquée pour sa légitimité douteuse au regard du droit international. Des personnalités comme l’ancien député républicain Matt Gaetz ont souligné que les troupes américaines étaient là pour protéger les ressources stratégiques, telles que le pétrole et les céréales, dans le nord-est du pays. Selon Dana Stroul du Pentagone, ce contrôle confère aux États-Unis une influence politique sur l’avenir de la Syrie. Et même le président élu Donald Trump avait déclaré que l’intérêt américain dans la région était principalement lié au pétrole.

Ces derniers jours, le ministre syrien du Pétrole, Ghiath Diab, a souligné le défi persistant posé par les puits de pétrole qui échappent au contrôle du gouvernement provisoire, alors que les forces américaines poursuivent leur occupation depuis 2014. Diab a déclaré que plusieurs puits de pétrole sont toujours «hors du contrôle du gouvernement syrien», qualifiant cette situation de «l’un des obstacles les plus importants et les plus pertinents» au redressement du pays. Bien qu’il n’ait pas explicitement nommé les États-Unis, il est clair que Diab faisait référence à la présence de soldats américains dans la région.

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