(Rome, 1er décembre 2024). Environ 200.000 Kurdes syriens sont «assiégés par des factions pro-turques» et les communications ont été interrompues dans les zones à majorité kurde, faisant craindre d’éventuels «massacres»
Les affrontements se poursuivent en Syrie entre l’armée régulière et les rebelles djihadistes pro-turcs qui ont lancé une offensive dans le nord du pays. Après avoir conquis Alep, son aéroport et des dizaines de villes voisines, les combattants menés par le groupe «Hayat Tahrir al-Cham (HTS) sont entrés dans Hama. Là, les troupes syriennes ont revendiqué un certain succès : «les unités de nos forces armées qui ont renforcé pendant la nuit les lignes défensives avec toutes sortes d’équipements et de personnel militaires, ont affronté les organisations armées et ont empêché toute avancée», ont-elles annoncé.
Des miliciens pro-Ankara, comme le rapporte Cecilia Scaldaferri de l’agence «AGI», ont chassé les milices kurdes de la ville stratégique de Tal-Rifaat, en prenant le contrôle dans le cadre d’une offensive parallèle, a pour sa part rapporté l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Environ 200.000 Kurdes syriens sont «assiégés par des factions pro-turques» et les communications ont été coupées dans les zones à majorité kurde, faisant craindre d’éventuels «massacres», ajoute l’ONG.
Pendant ce temps, à Damas, le président Bachar al-Assad a reçu le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, venu réitérer le «ferme soutien» de Téhéran dans la lutte contre le terrorisme. Pour sa part, le raïs syrien a souligné «l’importance du soutien des alliés contre les attaques terroristes soutenues par l’étranger».
Pour aider Assad, la Russie a repris ses bombardements sur Alep, comme cela ne s’était pas produit depuis 2016. Moscou a fait savoir que ses avions de combat coopéraient avec l’armée syrienne afin de repousser les rebelles dans les provinces septentrionales d’Idlib, de Hama et d’Alep. Les raids aériens syriens ont visé le CHU de la deuxième ville du pays, faisant au moins douze morts. Huit autres civils ont perdu la vie dans des bombardements à Idlib, tandis que des avions russes ont frappé le collège franciscain «Terra Sancta» à Alep, causant de lourds dégâts.
Le ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani a lancé un «appel à toutes les parties au conflit en Syrie pour qu’elles protègent la population civile».
«Nous continuons à assurer toute l’assistance possible aux Italiens en Syrie», a assuré le locataire de la Farnesina (Ministère des AE). Et les premiers Italiens déplacés d’Alep sont arrivés dans la capitale grâce à un convoi de l’ONU, mais les déplacements restent difficiles en raison des combats. Un nombre limité de religieux ont décidé de rester dans la ville conquise, comptant sur les bonnes relations établies par les franciscains avec l’ensemble des communautés. L’ambassadeur italien (en Syrie) Stefano Ravagnan est en contact permanent avec eux ainsi qu’avec l’évêque d’Alep, a indiqué la Farnesina, la Cellule de crise surveillant le convoi et suivant de près l’évolution de la situation.
A la lumière de l’attaque russe contre le collège franciscain, suite à l’indication du ministre Antonio Tajani, l’ambassadrice d’Italie à Moscou, Cecilia Piccioni, sera reçue demain au ministère russe des Affaires étrangères pour une réunion déjà programmée, et présentera la demande de renforcer les procédures afin d’éviter que de nouvelles attaques militaires ne frappent par erreur d’autres instituts religieux ou installations civiles à Alep et dans la région où se déroulent les combats.
Le ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan, lors d’un appel téléphonique avec le secrétaire d’État américain Antony Blinken, a réitéré le soutien d’Ankara aux efforts visant à «réduire les tensions» en Syrie voisine, exprimant l’opposition de la Turquie à «tout développement qui accroît les tensions et l’instabilité dans la région».
En Israël, le Premier ministre Benyamin Netanyahu a fait savoir qu’il surveillait de près l’évolution de la situation et qu’il avait convoqué deux réunions de sécurité, dont une sur les développements au Liban et en Syrie.
Ce qui se passe représente une menace sérieuse pour la sécurité régionale et internationale, a déclaré l’envoyé de l’ONU pour la Syrie, Geir Pedersen, appelant à «un engagement politique urgent et sérieux pour éviter l’effusion de sang et se concentrer sur une solution politique conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité» datant de 2015. De son côté, le ministère britannique des Affaires étrangères a accusé «le régime d’Assad» d’avoir «créé les conditions d’une escalade» dans le pays avec «son refus constant de s’engager dans un processus politique et sa dépendance à l’égard de la Russie et de l’Iran».
Selon l’OSDH, le bilan de l’offensive lancée il y a cinq jours par les rebelles djihadistes dans le nord de la Syrie s’élève désormais à au moins 412 morts, dont 214 rebelles du HTS et factions alliées, 137 membres des forces Assadistes et 61 civils, dont 17 ont été tués le 1er décembre.