(Rome, 13 novembre 2024). Le monde arabo-musulman affiche ses positions entre la volonté des dirigeants et les instincts des communautés. La présence d’une cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement à un sommet extraordinaire à Riyad doit aussi être placée dans la perspective de l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche
À Riyad, plus de cinquante dirigeants arabes et musulmans se sont réunis pour un sommet conjoint de la Ligue des États arabes et de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), convoqué par le roi Salman et présidé par le prince héritier Mohammed ben Salman (MBS). Le sommet s’est concentré sur la situation au Moyen-Orient, en particulier les conflits en cours à Gaza et au Liban, et sur la nécessité d’une résolution fondée sur le droit international, nous explique Emanuele Rossi dans le quotidien «Formiche.net».
Dans un contexte régional de plus en plus complexe, caractérisé par des dynamiques anciennes et une affirmation renouvelée d’acteurs tels que l’Iran, une position critique sur l’évolution de la situation émerge du sommet, mais que les sources qualifient d’«optimiste» quant au retour de Donald Trump à la Maison Blanche. Avec le Républicain qui, selon un diplomate présent parmi les nombreux participants, «contrairement à vous en Europe, il est considéré par nous au Moyen-Orient comme un élément potentiel de stabilisation, ou du moins c’est ce que nous voulons penser». Un signal direct adressé à la future administration américaine semble émerger de la réunion saoudienne, anticipant les positions et les attentes du monde arabo-musulman.
Les dirigeants, dans une déclaration commune composée de 38 points, ont réaffirmé avec force le droit des Palestiniens à un État indépendant à l’intérieur des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale. La cause palestinienne, définie comme «universelle», est présentée comme un impératif non négociable, soulignant que la résistance palestinienne symbolise les aspirations de tous les peuples opprimés.
En soutien à l’unité palestinienne, le sommet a reconnu le rôle de l’OLP et les efforts égyptiens visant à renforcer un gouvernement unifié entre Gaza et la Cisjordanie, représentant ainsi l’ensemble de la cause palestinienne de manière cohérente et unifiée.
Un élément central a été la dénonciation de «l’agression israélienne à Gaza et au Liban», appelant à un cessez-le-feu immédiat et à l’intervention de la communauté internationale pour protéger les droits humains fondamentaux. Cette position ferme pourrait être interprétée comme un avertissement : le monde arabo-musulman ne tolérera pas de nouvelles escalades sans une réponse forte et décisive.
L’assemblée a formulé un appel à un embargo international sur les armes à destination d’Israël, soutenu par un groupe de pays, dont la Turquie.
Cette proposition constitue un avertissement politique à l’égard de tous les pays, essentiellement occidentaux, qui entretiennent encore une relation d’approvisionnement active avec Israël. Les dirigeants ont également appelé à l’intervention de la Cour pénale internationale (CPI) pour poursuivre les responsables de crimes contre le peuple palestinien, considérant qu’une telle action constitue une obligation morale de la communauté internationale.
Dans cette optique, Jérusalem a été déclarée «ligne rouge» pour les nations arabes et musulmans. Les dirigeants ont exprimé leur inquiétude face aux tentatives visant à modifier l’identité culturelle et religieuse de Jérusalem-Est, appelant au respect des lieux sacrés et demandant à nouveau l’intervention de la communauté internationale (dans ce cas également) pour protéger la liberté de culte.
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Appréciant les efforts de l’Égypte et du Qatar pour négocier un cessez-le-feu, les participants ont réitéré la responsabilité d’Israël dans l’échec des pourparlers. Cette position a été particulièrement mise en avant par Doha, qui a récemment annoncé qu’il se retirait temporairement du processus de négociation en raison du peu de progrès réalisés, et a ensuite demandé aux dirigeants du Hamas présents sur son territoire de quitter le pays. C’est également la raison pour laquelle le sommet a renouvelé l’engagement mondial en faveur du dialogue, indiquant que la paix ne peut être réalisée que grâce à une approche multilatérale et inclusive.
Condamnant les violations de la souveraineté libanaise, le sommet a ensuite exprimé son plein soutien au Liban, exigeant le respect de la résolution 1701 de l’ONU et la protection des civils et des soldats de la paix.
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Ces points représentent non seulement des déclarations de principe, mais un aussi un message politique clair adressé à la future administration américaine, qui sera certes très ouverte avec Israël mais voudra maintenir très actifs les échanges avec les grands pays du Golfe, à commencer par les Saoudiens. Dans un Moyen-Orient caractérisé par de nouvelles alliances et des équilibres en évolution, le monde arabo-musulman veut dès à présent afficher sa ligne de fermeté. Les dirigeants régionaux semblent vouloir définir la portée de leurs attentes et de leurs priorités.
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La présence d’une cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement à ce sommet extraordinaire souligne l’unité d’objectif et la pertinence socio-culturelle de certaines positions, esquissant une plate-forme commune visant à influencer la future politique américaine dans la région.
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Ces dirigeants non seulement répondent aux besoins de l’establishment, mais signalent par leurs paroles que les communautés régionales ont une position qui doit être respectée, du moins dans le récit public et stratégique.