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France : Emmanuel Macron défie la droite, Le Pen nomme Bardella

(Paris, Rome, 10 juin 2024). Revirement de situation, coup de poker, défier, parier : la liste des termes utilisés pour désigner le geste d’Emmanuel Macron est longue, qui, dimanche soir, quelques minutes après l’annonce des résultats des élections européennes, a dissous le Parlement et convoqué des élections dans un délai de trois semaines. Objectif : faire sortir l’extrême droite, mais aussi débusquer les Français et leur demander s’ils ont réellement l’intention, au-delà d’un vote de contestation anti-Macron, d’être gouvernés pour la première fois de l’histoire par les lepénistes, comme le rapporte «Blue News».

«J’ai confiance dans la capacité des Français à faire le bon choix, pour eux-mêmes et pour les générations futures», a assuré Emmanuel Macron. Mais c’est un pari risqué. Où, comme l’écrit Jérôme Fenoglio, directeur du quotidien «Le Monde», «c’est nous qui sommes en jeu».

Marine Le Pen, 20 ans de réhabilitation d’abord au Front National (FN) hérité de son père Jean-Marie, puis au sein de son Rassemblement National (RN), a relevé le défi : «nous sommes prêts à gouverner». Et elle projette déjà son dauphin Jordan Bardella, qui avec 31,36% des voix, soit plus du double des macroniens, a mis en déroute ses adversaires vers le fauteuil de Premier ministre.

A 28 ans et sans expérience institutionnelle cohabitant avec un président expérimenté et prêt à tout, cela ressemble plus à la roulette russe qu’à une partie de poker. Mais la décision est désormais prise, dans trois semaines le vote aura lieu, dans 6 jours les listes doivent être présentées.

Dirigeants et partis réunis

Frappés par l’inattendu, dirigeants et partis, presque toujours incapables de se mettre d’accord, se sont réunis lundi après-midi pour ce que les observateurs appellent «les grandes manœuvres». Lesquelles, pour l’heure, n’ont donné aucun résultat.

Celles de la droite ont été plus prometteuses sur l’incompatibilité atavique entre gauche réformiste et gauche radicale. Depuis hier soir, en effet, la gauche (la France Insoumise de l’extrémiste Jean-Luc Mélenchon-LFI), qui cède pourtant peu à peu sa place au plus ouvert François Ruffin, le Parti socialiste (PS), les communistes (PC) et les écologistes (EELV), est divisée entre «l’union de la gauche», le front populaire, le front républicain et autres variantes de la catégorie.

L’hypothèse du Front populaire, qui remonte aux années 1930 et qui est l’hypothèse d’une alliance fondée sur des propositions politiques de gauche, gagne du terrain. Contre la droite, mais aussi anti-Macron. A la différence du Front Républicain, l’accord électoral entre tous les partis a fonctionné pendant des décennies et a servi à barrer la route à l’extrême droite en soutenant son adversaire dans toutes les circonscriptions, quelles qu’elles soient. Elle semble aujourd’hui l’hypothèse la moins viable, compte tenu du clivage irrémédiable entre macroniens et gauchistes. Tous les regards sont tournés vers celui qui a ramené les socialistes à un niveau acceptable, Raphaël Glucksmann (13,8% des voix), mais son incompatibilité avec les radicaux de La France Insoumise complique une équation déjà difficile.

Le rôle de Jordan Bardella

Parmi les vainqueurs, il y a eu la «main tendue» de Jordan Bardella à Marion Maréchal, la nièce de Marine Le Pen qui menait la liste d’Eric Zemmour, le polémiste d’extrême droite, dépassant le seuil des 5%. Dans l’après-midi, Marion est allée sonder sa tante et Bardella, certaine qu’elle avait «un choix» devant elle. Bardella a reconnu son «attitude constructive, contrairement à Zemmour».

Mais pour l’heure, «ce ne sont que des discussions». Bardella sait que «gagner seul est difficile». Et il a d’ailleurs eu des contacts avec certains représentants des Républicains. Marion, quant à elle, a déjà rendez-vous avec le leader peu malléable de son parti, Eric Zemmour, mais ira aussi consulter Nicolas Dupont-Aignan, président du minuscule parti souverainiste «Debout la France».

Dans cette phase très délicate, tout apport de voix ou de ressources politiques peut être décisif. L’extrême droite, jamais aussi proche du pouvoir en France, tente de relever la barre à 40 %, niveau qu’elle pourra atteindre en unissant Bardella-Le Pen, Zemmour et les autres représentants mineurs qui n’ont jamais recueilli que des préférences symboliques. Cette fois, ils entrevoient le mirage de la gouvernance du pays.

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