Antony Blinken à Kiev pour rassurer l’Ukraine. Mais sur le front…

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(Paris, Rome, 14 mai 2024). La visite surprise d’Antony Blinken à Kiev coïncide avec des nouvelles peu encourageantes en provenance du front, où les Russes ont recommencé à faire pression. En prévision d’une action estivale plus large

Un voyage surprise, décidé au dernier moment. Après une brève escale sur le sol polonais, le secrétaire d’État américain Antony Blinken est arrivé à Kiev dans la matinée du mardi 14 mai. Il s’agit du quatrième voyage de Blinken sur le sol ukrainien depuis le début du conflit. La première depuis l’approbation du plan d’aide accordé par le Congrès à Washington il y a quelques semaines. Selon les informations disponibles, outre une rencontre avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky et d’autres hauts responsables de l’administration de l’État, Blinken prévoit de prononcer un discours pour célébrer l’afflux de l’aide américaine et pour décrire la tentative ratée de la Russie de prendre le contrôle du pays comme un succès stratégique pour l’Ukraine, tout en soulignant que l’Ukraine doit continuer à progresser en matière de gouvernance démocratique et de réformes anti-corruption si elle veut s’intégrer à l’Occident.

Mais le ton du discours de Blinken pourrait à ce stade paraître plutôt propagandiste, nous explique Lorenzo Piccioli dans «Formiche.net». Sur le front, la situation continue de se dégrader : après une pression constante (mais non décisive) des forces russes le long de la région du Donbass ces dernières semaines, dans la nuit du vendredi 10 mai, les Russes ont lancé une nouvelle offensive dans l’Oblast de Kharkhiv. Les gains territoriaux ont été marginaux et les défenses ukrainiennes ont résisté ; cependant, malgré les déclarations officielles du Kremlin sur l’intention de créer une « bande de sécurité » pour la ville de Belgorod, cette action a été davantage perçue comme une « reconnaissance armée » visant à tester la capacité de défense des adversaires, en préparation d’une offensive , en été, annoncée à l’avance. Grâce à quoi l’armée moscovite, en attaquant dans la région de Kharkiv, viserait plutôt à frapper par derrière les troupes de Kiev déployées dans le Donbass, comme le note le général Carlo Jean. « Nous renforçons nos forces à Kharkiv. Que ce soit le long de notre frontière nationale ou sur toute la ligne de front, nous détruirons sans répit l’occupant afin de heurter toute intention offensive russe », a déclaré le Président Zelensky peu après le début des affrontements.

Mais ce n’est pas le président ukrainien, c’est plutôt le commandant en chef des forces terrestres, le général Oleksandr Pavliuk, qui insiste sur le concept clé : « La Russie sait que si nous recevons suffisamment d’armes d’ici un mois ou deux, la situation peut se retourner contre cette dernière ». Moscou jouit à l’heure actuelle d’un solide avantage sur le terrain, tant en termes d’hommes que d’équipements ; toutefois, cet avantage pourrait au fil du temps s’éroder, à mesure que de nouvelles recrues formées, grâce à l’abaissement de l’âge de conscription, entreront en service actif et que des systèmes militaires de fabrication occidentale arrivent en Ukraine, des systèmes anti-aériens aux capacités à longs rayons, jusqu’aux avions F-16 (dont le premier lot devrait être opérationnel dans les semaines à venir).

Le Kremlin en est conscient et c’est précisément pour cette raison qu’il pourrait tenter un revirement tant que la situation lui reste favorable. Dans le but de repousser davantage les forces ukrainiennes et de renforcer sa position, en vue d’éventuelles évolutions sur le front des négociations, qui pour l’heure ne se profilent pas à l’horizon, mais qui pourraient soudainement devenir une réalité concrète.