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Le B-52 aux frontières de la Russie: ce que révèle le parcours du bombardier américain

(Rome, Paris, 13.03.2023). Un B-52 américain arrive à 125 km de Saint-Pétersbourg. On parle d’un message américain à la Russie, mais les sources critiques du Kremlin le démentent : Moscou était au courant du survol effectué en combinaison avec les chasseurs polonais

Samedi 11 mars, un B-52 américain a effectué des manœuvres planifiées dans la zone de la mer Baltique et a volé jusqu’à 125 kilomètres de Saint-Pétersbourg, la deuxième ville de Russie. La trajectoire du bombardier américain, capable de transporter d’importantes quantités d’armements conventionnels et aussi d’opérer comme porteur d’ogives nucléaires, a été reconstituée par la chaîne RusNews via FlightRadar24.

Dans son décryptage, Andrea Muratore nous apprend dans les colonnes du quotidien italien «Il Giornale», que l’avion, vraisemblablement un B-52 de « l’Air Force Global Strike Command », parti de la base de la Royal Air Force à Fairford dans le sud-ouest de l’Angleterre, a survolé le territoire polonais avant de passer au-dessus de la Baltique. Il est passé à l’Est de l’île suédoise de Gotland et est entré dans le goulet d’étranglement de la Baltique entre la Finlande et l’Estonie, survolant une étendue de mer non loin de Saint-Pétersbourg. Avant d’entrer dans le ciel de l’île de Gogland, qui appartient à la Russie, il a fait une embardée vers le sud puis a survolé l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie pour finalement revenir vers l’ouest.

Deux versions du voyage du B-52

Le fait peut être interprété de différentes manières. «YLE», l’un des principaux médias finlandais, a rapporté le commentaire de Mika Aaltola, directeur de l’Institut finlandais des affaires internationales, qui parle d’un « message clair » des États-Unis adressé à Moscou, ajoutant  que « la Russie a intensifié ses activités provocatrices de l’Alaska à l’Arctique. Il s’agit d’un contre-signal » en réponse à l’ingérence de la Fédération de Russie. Mais en est-il vraiment ainsi ?

Meduza, un portail russe critique à l’égard de la ligne du Kremlin, rapporte une version différente, soulignant que la mission de vol était prévue depuis un certain temps et que même la flotte baltique de la Fédération de Russie avait été avertie afin d’éviter tout incident. A l’appui de cette hypothèse, le ministre polonais de la Défense Mariusz Błaszczak a écrit sur Twitter que le B-52 s’est déplacé avec la couverture d’escorte de l’armée de l’air de son pays et que, par conséquent, la manœuvre serait une opération classique de l’OTAN de convergence entre différents forces aériennes visant à tester l’interopérabilité entre les chasseurs d’un pays et les bombardiers d’un autre.

Un signal pour les alliés de l’OTAN

L’augmentation des opérations des B-52 Stratofortress dans les régions d’Europe de l’Est et du Sud, avec une intensité jamais vue depuis la guerre froide, ne fait aucun doute. Mais lire chaque exercice dans un message visant à répondre aux provocations de Moscou en Ukraine ou à la frontière avec l’OTAN lors de chaque exercice risque d’induire en erreur. Certes, le passage des B-52 au-dessus de la Baltique montre que ces appareils au passé glorieux, que l’US Air Force veut maintenir en service jusqu’en 2040, peuvent aller jusqu’à menacer directement la Russie en cas de conflit. Mais la manœuvre apparaît plus comme un signe de présence américaine pour des alliés inquiets dans la région qu’un mouvement visant à faire pression sur la Russie.

Preuve en est l’absence de tout commentaire sur ce déplacement de la part des forces armées de Moscou qui, si elles avaient vu voler un bombardier américain colossal entouré de chasseurs polonais dans des zones suspectes sans aucun avertissement, auraient au moins exprimé leur exaspération. Ce silence suggère que la Russie a compris que dans la nouvelle confrontation musclée avec les USA, les démonstrations de puissance sur le modèle de la guerre froide font également partie du jeu. Et elle accepte les conséquences d’un contexte rendu de plus en plus incendiaire par l’invasion de l’Ukraine il y a un an, qui a ramené, entre autres, les « forteresses volantes » de l’USAF dans les cieux d’Europe. Pour montrer aux alliés, avant même la Russie, comment la sécurité de l’Occident est avant tout une affaire américaine.

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