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Téhéran peut décoder les armes des Etats-Unis et de l’OTAN envoyées par la Russie

(Rome, Paris, 11.03.2023). La Russie a mis la main sur une partie des armes fournies par les États-Unis et l’OTAN à l’armée ukrainienne et les a envoyées en Iran, où Washington craint que Téhéran ne tente de décoder leurs systèmes. Plus précisément, le matériel obtenu par les Russes serait constitué d’une partie de l’aide militaire que le bloc occidental a envoyé au front, et que les forces de Kiev ont été contraintes d’abandonner sur le champ de bataille à la suite de défaites locales non précisées, comme rapporté par le quotidien italien «Il Giornale/Inside Over».

La nouvelle a été diffusée par CNN, qui a cité quatre sources anonymes informées des faits. Au cours de l’année dernière, ont expliqué les mêmes sources, les États-Unis, l’Alliance atlantique (OTAN) et d’autres responsables occidentaux ont été témoins de plusieurs épisodes au cours desquels les hommes de Vladimir Poutine ont réussi à récupérer du matériel d’armement, petit, monté sur l’épaule, notamment des systèmes antichar Javelin et des systèmes anti-aériens Stinger.

Il semble que dans bon nombre de ces cas, la Russie ait envoyé l’équipement en Iran pour démanteler et analyser chaque arme, probablement pour permettre aux Iraniens de créer leur propre version de ces armes. Moscou pense également que continuer à approvisionner l’Iran en armes occidentales capturées, serait une précieuse incitation à convaincre Téhéran de maintenir son soutien aux opérations militaires russes en Ukraine.

De la Russie à l’Iran

Selon des informations, les États-Unis ne pensent pas que l’envoi d’armes occidentales à Téhéran par les Russes soit systématique ou généralisé. Il est toutefois utile de rappeler que, depuis le début de la guerre, l’armée ukrainienne signale au Pentagone toute perte de matériel reçu. En même temps, il est cependant difficile de surveiller l’ensemble de la situation de manière à s’assurer qu’aucune arme ne puisse parvenir à Téhéran.

Il n’est pas clair si les Iraniens ont été en mesure de décoder l’équipement hypothétique reçu jusqu’à présent, mais les ingénieurs et scientifiques iraniens se sont jusqu’à présent avérés hautement qualifiés dans le développement de systèmes d’armes basés sur l’équipement américain saisi dans le passé.

D’ailleurs, une arme clé de l’arsenal iranien est le missile guidé antichar Toophan, une arme décodée avec succès par le missile américain BGM-71 TOW dans les années 1970. Un autre exemple ? En 2011, Téhéran a intercepté un drone de fabrication américaine, le Lockheed Martin RQ-170 Sentinel. Ils l’ont rétro-conçu, toujours avec succès, pour créer un nouveau drone qui, en 2018, a traversé l’espace aérien israélien avant d’être abattu.

Un risque à éviter

Que pourrait-il se passer si les armes occidentales utilisées par l’armée ukrainienne devaient être rétro-conçues par l’Iran ? S’interroge encore Federico Giuliani dans le journal italien. Il suffit d’écouter Jonathan Lord, chercheur principal et directeur du programme de sécurité au Moyen-Orient au sein du « Center for a New American Security ».

« (Les Iraniens, ndlr) ont procédé à la rétro-ingénierie du missile guidé antichar TOW, créant une réplique presque parfaite qu’ils ont appelée Toophan, et l’ont depuis diffusée aux Houthis et au Hezbollah. L’Iran pourrait faire de même avec un Stinger, qui pourrait menacer l’aviation civile et militaire dans l’ensemble de la région. Un Javelin rétro-conçu pourrait être utilisé par le Hamas ou le Hezbollah pour menacer un char Merkava israélien. Entre les mains des mandataires de l’Iran, ces armes constituent une menace réelle pour les forces militaires conventionnelles d’Israël », a expliqué Jonathan Lord.

A lire : Le soutien sino-iranien à la Russie inquiète l’Occident

Il est aussi utile de rappeler qu’au cours de l’année écoulée, la coopération militaire entre la Russie et l’Iran s’est intensifiée. La Maison Blanche pense que le Kremlin a demandé et reçu des centaines de drones de l’Iran, ainsi que des obus d’artillerie et des chars ; en échange, Téhéran aurait demandé à Moscou des milliards de dollars d’équipements militaires, notamment des avions de combat, des systèmes radar et des hélicoptères. La nouvelle ligne d’armes occidentales envoyées par les Russes en Iran ouvre une nouvelle discussion inquiétante.

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