(Rome, Paris, 30 novembre 2022). Un exercice impliquant les deux pays est en cours dans le ciel de la Méditerranée orientale. Washington et Jérusalem veulent disposer d’un plan d’attaque contre Téhéran, alors que les autres options de sécurité s’estompent. Et sur l’intelligence… !
Le Pentagone et les Forces de défense israéliennes (FDI) sont engagés dans l’un des plus grands exercices aériens de ces dernières années, simulant des attaques contre le programme nucléaire iranien.
Selon les journalistes Emanuele Rossi et Gabriele Carrer du quotidien italien «Formiche», l’exercice – du mardi 29 novembre au jeudi 1er décembre – verra les moyens des deux pays survoler la mer Méditerranée et le ciel d’Israël. Il comprend des vols long-courriers, tels que ceux que les pilotes israéliens peuvent être amenés à effectuer, pour atteindre la République islamique. Il implique indirectement une série d’acteurs régionaux qui doivent au moins être informés de ces activités, et ensuite peut-être, rendre cette participation proactive. Par exemple, récemment, les Israéliens ont pratiqué le ravitaillement en vol avec la Grèce, qui a des intérêts (pour le dire, le projet d’organisation de la Coupe du monde 2030, avec l’Arabie saoudite, ou les relations compliquées avec la Turquie) en alignement avec Israël sur les questions iraniennes.
L’idée sous-jacente (qui n’est pas nouvelle) qui anime l’exercice est assez immédiate : l’Iran est en crise, incapable de contenir voire de réprimer les protestations populaires qui durent depuis trois mois ; les Pasdaran sont nerveux, les milices régionales mandataires sont mobilisées ; l’aide à la Russie en Ukraine n’a jamais cessé et les armes iraniennes sont devenues le symbole des attaques par lesquelles le Kremlin a ciblé les infrastructures d’électricité et d’eau de Kiev ; l’isolement international de Moscou menace de se propager comme une traînée de poudre à ses partisans, y compris Téhéran ; le programme nucléaire se poursuit.
Sans la possibilité de conclure un accord tel que le JCPOA pour le gel des plans atomiques des ayatollahs (auquel Israël n’a jamais cru), l’option militaire ne peut être négligée. Même si par le passé (notamment parmi les partisans occidentaux, et surtout face au naufrage du «Nuke Deal» par Trump) il y a eu une tentative visant à minimiser la valeur du JCPOA et de la limiter davantage à la question strictement technique du programme nucléaire, il est évident que cet accord de 2015 a servi de base à une architecture de sécurité régionale. Sans accord, il n’y a pas de sécurité, sans sécurité, il faut des plans militaires.
Les États-Unis et Israël ont signé un plan de coopération qui prévoit que les premiers assistent les seconds en matière de défense antimissile en temps de guerre, et ces dernières années, les deux armées ont organisé de nombreux exercices conjoints de défense aérienne.
L’Iran, qui possède plus de 1.000 missiles balistiques à courte et moyenne portée, continue de faire passer des armes en contrebande à des pays et à des acteurs non étatiques tels que le Hezbollah, qui disposerait d’un arsenal d’environ 50.000 missiles à la frontière nord d’Israël (plus de 100.000 selon les experts régionaux, NDLR).
L’exercice en cours a été évoqué par Aviv Kohavi, chef d’état-major de la défense israélienne, lors de sa visite à Washington la semaine dernière. Kohavi, qui est rentré en Israël un jour plus tôt que prévu à la suite d’un double attentat à la bombe meurtrier à Jérusalem, s’est entretenu avec de hauts responsables américains, dont les chefs d’état-major interarmées, le général Mark Milley.
« Nous travaillons ensemble sur tous les fronts pour recueillir des renseignements, neutraliser les menaces et nous préparer à divers scénarios dans une ou plusieurs arènes », a déclaré Kohavi depuis les États-Unis, ajoutant que les deux pays « développent des capacités militaires conjointes à un rythme accéléré », contre l’Iran et d’autres menaces au Moyen-Orient.
Israël a considérablement augmenté son niveau de préparation et a pris des mesures au cours de l’année écoulée pour préparer une option militaire crédible contre les installations nucléaires iraniennes.
L’intelligence est également à l’œuvre. Les autorités israéliennes ont relevé les niveaux de protection des hauts responsables des services de renseignement et de la sécurité, de peur qu’ils ne se retrouvent dans la ligne de mire de l’Iran. Cela a été rapporté la semaine dernière par le média public Kan, soulignant que ces mesures concernent en grande partie les membres, y compris les anciens, du Mossad et les personnes travaillant pour l’appareil de sécurité et de renseignement israélien et qui vivent à l’étranger. Une évolution que certains experts observent avec inquiétude, car elle semblerait confirmer à quel point la guerre « clandestine » entre Israël et l’Iran gagne en intensité et s’étend en Europe et au Moyen-Orient.