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Un cessez-le-feu entre l’Ukraine et la Russie, est-il désormais difficile à obtenir ?

(Rome, 07 octobre 2022). La guerre en Ukraine a-t-elle vraiment atteint un point de non-retour ? Les récents développements sur le terrain semblent confirmer cette hypothèse pour plusieurs raisons. Les avancées ukrainiennes ont permis à Kiev d’espérer une récupération totale du territoire. Maintenant que l’inertie du conflit est en faveur de l’armée sous les ordres de Zelensky, personne en Ukraine n’est prêt à renoncer à de nouvelles avancées pour négocier des compromis territoriaux. En Russie, au contraire, avec une armée en difficulté, le Kremlin, avant d’engager de sérieuses négociations, entend se concentrer sur les renforts qui arriveront dans les mois à venir en raison de la mobilisation annoncée en septembre. Mais surtout, ni Kiev ni Moscou ne croient aujourd’hui à la solidité d’un quelconque accord de cessez-le-feu. Tous deux veulent tout mettre en œuvre pour atteindre leurs objectifs respectifs sur le plan militaire, selon l’analyse de Mauro Indelicato dans le quotidien «Il Giornale/Inside Over».

Les avancées de Kiev

La contre-offensive ukrainienne n’a pas été tenue en haute estime jusqu’à l’été. Les annonces d’une contre-attaque à Kherson se heurtent alors aux difficultés des soldats de Kiev à pénétrer le long de la ligne de défense russe. Tout a changé début septembre et surtout entre le 8 et le 10 du même mois. En 48 heures, les Ukrainiens ont repris le contrôle de villes stratégiques comme Izyoum et ont poussé jusqu’à la rivière Oskil dans l’oblast de Kharkiv. Autour de la deuxième ville du pays, les troupes de Kiev achevèrent la reconquête de l’ensemble de l’arrière-pays, commencée discrètement en mai.

Un scénario répété un mois plus tard à Kherson, où les soldats ukrainiens se sont emparés d’environ un tiers du territoire de l’oblast. La contre-offensive fait appel à plusieurs facteurs qui se sont avérés décisifs : la supériorité numérique des forces de Kiev, l’effet de surprise causé aux Russes, l’absence de grandes barrières défensives par les troupes envoyées de Moscou.

Désormais, l’Ukraine est en mesure de continuer de traquer les russes. Au sud de Kharkiv, les premières avant-gardes ont posé leurs bottes dans certaines parties de l’oblast de Lougansk, perdu entre mars et juillet. A Kherson, les Ukrainiens pourraient profiter d’un recul progressif des Russes pour atteindre rapidement les portes de la capitale de la région. Dans ces conditions, personne à Kiev n’a intérêt à stopper l’offensive. Les généraux ukrainiens voudraient profiter du moment présent pour prendre le plus de territoires possibles avant l’hiver et avant l’arrivée des renforts russes. La guerre, du côté ukrainien, est donc destinée à se poursuivre.

Les annexes russes

On peut toutefois dire la même chose du côté de Moscou. Vendredi dernier, lors d’une cérémonie tenue dans la salle Saint-Georges au Kremlin, le président Poutine a signé le décret d’annexion des oblasts de Donetsk, Lougansk, Zaporizhzhia et Kherson. Depuis lors, pour le gouvernement russe, ce sont des territoires de la fédération. Même s’il y a des combats en leur sein et, comme mentionné précédemment, les Ukrainiens sont dans une position avantageuse.

Les deux gouvernements revendiquent les mêmes territoires. Kiev les considère, comme la Crimée, comme des régions occupées. D’autre part, Moscou considère plutôt ces zones comme fédérées à sa propre nation. Personne ne veut pour l’heure négocier un compromis sur ces points. Le Kremlin espère, une fois que les réservistes appelés sous les drapeaux, pourront se rendre sur le terrain, et pouvoir inverser le cours actuel du conflit.

Personne ne veut une réédition des accords de Minsk

Un autre élément est à prendre en considération, non seulement en ce qui concerne l’Ukraine. L’intervention russe qui a commencé le 24 février a probablement créé un précédent important quant aux futurs accords de cessez-le-feu. Aucun acteur engagé dans un conflit, politique ou territorial, n’aura tendance à « geler » un conflit dans le futur. En un mot, la guerre en Ukraine a marqué l’échec des accords de Minsk, signés en 2014 pour mettre en place un cessez-le-feu entre Kiev et les séparatistes pro-russes. Et, avec eux, tous ces accords visant à geler un différend sont voués à l’échec.

Kiev interpréterait aujourd’hui tout type d’armistice comme une possibilité d’offrir à la Russie de se renforcer et de reprendre les hostilités après un certain temps. De même, la Russie, voyant le renforcement de l’armée ukrainienne après les accords de 2014, si elle parvient à inverser le cours du conflit, elle tentera d’aller jusqu’au bout.

Les deux camps vont tenter de l’emporter définitivement sur l’adversaire. Quoi qu’il en coûte. L’Ukraine, exploitant l’inertie actuelle et une mobilisation qui a débuté avant même les opérations du Kremlin, la Russie tente plutôt de donner un sens à la mobilisation partielle proclamée en septembre.

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