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L’«avertissement» de Pékin à Meloni: «évitez les faux signaux à Taïwan»

(Rome, Paris, 26 septembre 2022). « Nous espérons que le nouveau gouvernement italien continuera à avoir une politique positive et pragmatique envers la Chine » et qu’il continuera « à travailler ensemble pour approfondir la coopération bilatérale et les échanges dans divers domaines au profit des deux pays et des deux peuples ». Au lendemain des élections politiques italiennes, qui ont couronné le centre-droit et Giorgia Meloni vainqueurs des élections, Pékin a envoyé un premier message à l’adresse de «Fratelli d’Italia».

Selon le décryptage de Federico Giuliani dans le quotidien italien «Inside Over», le nœud épineux, très épineux concerne Taïwan. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin, a déclaré que la Chine exhorte les « personnes concernées en Italie » à reconnaître « le caractère hautement sensible de la question de Taiwan », en évitant d’envoyer de « faux signaux » aux forces sécessionnistes. En outre, la Chine a exhorté Meloni à la « pleine reconnaissance » de la politique d’une seule Chine, qui signifie essentiellement la souveraineté chinoise sur l’île.

L’affaire prend une importance considérable. Non seulement parce que les propos de Wang ont été tenus au lendemain du vote, mais aussi et surtout parce que la réponse de Pékin est à mettre en liaison avec les nombreuses critiques que Giorgia Meloni a, elle-même, adressées à la Chine lors d’une interview, accordée la semaine dernière, aux médias de l’île. Et dans laquelle la cheffe de FdI a attaqué, entre autres, les actions de la République populaire envers Taipei.

Le message de la Chine

Le principe d’une Chine unique, avec Taïwan faisant partie intégrante de la République populaire, est « universellement reconnu au niveau international » et constitue « le fondement politique de ceux qui décident d’avoir des relations » avec la République populaire de Chine, selon Pékin. En d’autres termes, le Dragon a tracé une ligne rouge à ne pas franchir : reconnaître Taïwan, ou fournir des signaux apaisants susceptibles de nuire à la politique d’une seule Chine, pourrait donner lieu à un mur contre mur, avec des résultats désastreux pour toutes les parties concernées.

Mais qu’a dit Meloni pour crisper le leadership chinois ? Il faut relire son interview à l’agence de presse centrale taïwanaise. La cheffe de file du FdI a qualifié la question taïwanaise de « fondamentale » en cas de victoire électorale de la coalition de centre-droit et a critiqué Pékin pour le « comportement inacceptable » envers l’île.

Madame Meloni avait alors qualifié l’adhésion de l’Italie à la nouvelle route de la soie (ou Belt and Road, BRI) de « grosse erreur », mettant en doute le renouvellement du protocole d’accord avec la Chine si elle se trouvait au Palazzo Chigi (le siège de la Présidence du Conseil des ministres). La Chine et l’Italie sont des « partenaires stratégiques mondiaux » et le développement « sain et stable » des relations sino-italiennes est « dans l’intérêt commun des deux parties », soulignent-ils depuis Pékin.

Non seulement Taïwan

Ce serait une erreur de considérer Taiwan comme le seul sujet de friction potentiel entre Meloni et la Chine. La dirigeante de FdI a en effet cité de nombreux événements survenus après la signature du protocole BRI en 2009, à l’appui de sa position contre le renouvellement du projet d’infrastructure. Il s’agit notamment de la répression présumée de la Chine à l’encontre des militants de Hong Kong, de la discrimination contre les Ouïghours et d’autres minorités, de la position prétendument ambiguë de Pékin à l’égard de la Russie en Ukraine et de ses démonstrations de force répétées à l’encontre de Taïwan.

C’est précisément la Ceinture et la Route qui risquent de devenir l’autre grand point de discorde. En tout cas, il est une chose de faire des discours prononcés pendant la campagne électorale (ce qui a servi au FdI à se distancer des étiquettes peu engageantes), mais il en est une autre de faire des politiques concrètes une fois le nouvel exécutif italien formé. Il faudra donc comprendre quelle sera la position réelle de Meloni sur le dossier chinois une fois qu’elle prendra ses fonctions.

Entre-temps, le journal chinois Global Times a écrit que le succès des forces politiques « d’extrême droite » est un « signal d’alarme » pour la politique européenne et reflète les incertitudes politiques de l’Union européenne. Favorable à la montée des partis nationalistes en Europe, le journal pointe plusieurs facteurs, dont la crise de la dette, la crise des réfugiés qui « a remis en cause l’ordre social et les valeurs traditionnelles », laissant l’UE devant un « dilemme moral et concret », et enfin la pandémie de Covid-19, avec ses effets sur l’économie, et la guerre entre la Russie et l’Ukraine, avec ses conséquences sur les prix de l’énergie.

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