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L’Iran brûle: voici les raisons des protestations

(Rome, Paris, 23 septembre 2022). Au moins 31 personnes (50 selon le dernier bilan, ndlr) ont été tuées dans les affrontements qui ont eu lieu en Iran ces derniers jours. Un bilan porté par certaines ONG et légèrement supérieur à celui fourni par la télévision d’Etat iranienne, selon laquelle les victimes sont au nombre de 17. Au-delà des chiffres froids, ce qui semble important de souligner, c’est que même les autorités et les médias officiels ont admis l’existence des manifestations de rue capables de paralyser plusieurs villes. Selon les récits qui ont émergé sur les réseaux sociaux, ce serait l’une des manifestations les plus violentes de ces dernières années, comme le rapporte Mauro Indelicato dans son décryptage dans le quotidien italien «Inside Over».

Pourquoi protestent-ils en Iran

Tout a commencé avec la mort d’une jeune femme iranienne. Elle s’appelait Mahsa Amini, elle avait 22 ans et elle était d’origine kurde. Il y a quelques jours, la jeune fille a été arrêtée par la police de Téhéran pour ne pas avoir porté (correctement) le foulard, obligatoire en Iran pour toutes les femmes. Après avoir été emmenée par des policiers dans l’un des commissariats de la capitale, Mahsa est décédée dans des circonstances encore mystérieuses.

On ignore pour l’heure ce qui s’est réellement passé à l’intérieur du bâtiment où la jeune femme était détenue. Nous savons seulement avec certitude que sa mort a allumé la mèche qui était prête à exploser en Iran depuis un certain temps. Après que la nouvelle de sa mort se soit répandue, plusieurs citoyens sont descendus dans les rues de Téhéran pour protester. Dans certains cas, les femmes ont retiré le voile traditionnel dans la rue, défiant ainsi les interdits.

De nombreux iraniens, parmi ceux qui ont organisé les premières manifestations, ont répandu l’idée que Mahsa est morte après avoir été battue au poste de police. Les soupçons sont alimentés par le fait que le corps de la jeune fille n’a pas été montré au père, même pas le jour des funérailles : « Peu importe combien j’ai supplié, ils ne m’ont pas permis de voir ma fille », a déclaré le parent à BBC Persia. Ici, où au cours de l’entretien, il a également indiqué, entre autres, avoir remarqué des fractures sur la seule partie non couverte du corps de sa fille, à savoir les pieds.

De leur côté, les autorités se sont défendues en niant toute possibilité d’agression physique contre la jeune fille. Au cours des dernières heures, la police a montré des images de vidéosurveillance prises au commissariat où Mahsa était détenue, dans lesquelles on voit la jeune fille s’évanouir soudainement, peut-être en proie à un malaise. Une façon de réitérer comment la mort est due à des causes naturelles. Sur la télévision publique Irib2, le neurochirurgien Massoud Shirvani a annoncé que la fille, à l’âge de huit ans, avait subi une intervention chirurgicale pour une tumeur au cerveau. Une circonstance qui, en soi, selon le médecin, n’aurait pu provoquer aucun collapsus mais dont les effets secondaires, en cas de stress sévère, seraient néanmoins capables d’entraîner des conséquences graves sur la santé de la jeune femme.

Où se déroulent les manifestations en Iran

Cependant, l’impression est que les protestations ne concernent pas seulement la mort de Mahsa. En d’autres termes, les places ne se sont pas uniquement remplies pour demander justice pour la fille décédée, mais aussi pour dénoncer les raisons pour lesquelles la jeune femme avait été arrêtée. En un mot, Mahsa, quelles que soient les véritables causes de sa mort, pour les manifestants, elle n’aurait même pas dû entrer dans ce commissariat. Cela explique pourquoi de nombreuses femmes ont publiquement brûlé le voile et pourquoi la protestation s’est propagée comme une traînée de poudre dans une grande partie du pays.

À Téhéran, ainsi qu’à Mashad, Kish et Tabriz, plusieurs manifestations ont été signalées ces dernières heures. Les femmes ne sont pas les seules à être descendues dans la rue. La mort de la jeune femme a déclenché un effet domino, soufflant sur l’intolérance latente au sein de nombreuses couches de la société iranienne. Ces dernières années, l’effet combiné des sanctions et de la crise internationale a contribué à faire fléchir davantage l’économie du pays. La classe moyenne en paie lourdement les conséquences, devant subir la hausse des prix des produits de première nécessité et une aggravation des conditions de vie. Dans de nombreux cas, les jeunes Iraniens manquent également d’une certaine perspective d’avenir.

Dans un tel contexte, un seul fusible suffit à faire exploser la situation. Et c’était ainsi. Dans les villes, des gens manifestent et meurent, tant d’un côté que de l’autre de la barricade : en effet, parmi les victimes, on trouve non seulement des manifestants mais aussi des policiers. Signe d’une violence qui désormais, à Téhéran, risque d’être difficile à contrôler.

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